Témoignages d’archives sur août 1968
Quarante ans après l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte de Varsovie, les archives apportent de nouveaux témoignages sur les événements d’alors. Vendredi dernier, l’Institut d’études des régimes totalitaires a présenté au public les enregistrements radiophoniques des journées d’occupation 1968 qu’on croyait détruits ou perdus à jamais.
« Ce peu qu’on a pu écouter, pour le moment, témoigne que la voix des animateurs changeait, d’un ton optimiste, au départ, se voulant rassurant sur le fait que la situation se calmera, jusqu’à la certitude que cela ne sera ni facile, ni rapide. »
Des centaines de bandes magnétiques sorties des archives comprennent des dizaines d’heures d’enregistrement et il faudra les numériser afin qu’ils puissent être étudiés en profondeur. Parmi les témoignages les plus précieux, le directeur de l’Institut Pavel Žáček cite ceux des dix dernières journées avant l’occupation du 21 août qu’il caractérise comme les plus libres à l’époque. On peut en apprendre, par exemple, que Gustav Husák, vice-premier ministre du gouvernement tchécoslovaque en août 68 et futur secrétaire général « normalisateur » des années 70, défendait, peu de temps avant l’invasion, le processus de démocratisation dans le pays connu sous le nom de Printemps de Prague:« Il y a une tendance à freiner le processus de démocratisation, de refermer la porte juste ouverte. Avant le congrès du parti communiste de Slovaquie, on a été témoin des tentatives de certains fonctionnaires de maintenir leurs positions et leur pouvoir. Je suis convaincu que ce nouveau courant représenté par Alexander Dubček est fermement enraciné dans le cœur des Tchèques et des Slovaques et qu’aucune force ne pourra ni l’arrêter, ni renverser, ni nous priver de toute perspective de développement démocratique. »Comment est-il possible que les bandes magnétiques soient restées aussi longtemps inexploitées dans les archives? C’est parce que l’Institut d’études des régimes totalitaires s’est vu seulement tout récemment confier la gestion des Archives des forces de sécurité, explique le directeur de l’institut, Pavel Žáček :
Nous rappellerons que lors des purges qui ont eu lieu au début des années 1970, plusieurs centaines d’employés qui s’étaient engagés dans le processus du renouveau ont été licenciés. Les rédacteurs ont perdu le peu de liberté créatrice dont ils jouissaient avant l’invasion.
Les enregistrements d’émissions radiophoniques d’août 1968 permettent d’élargir la connaissance sur ce chapitre de l’histoire tchèque, dit Pavel Žáček :« Pour moi et pour mes collègues, il est intéressant de suivre l’heure et la date des émissions, la façon dont elles reflétaient les événements d’alors, dans les réactions des personnes qui aidaient à préparer l’occupation avec les Soviétiques, qui s’apprêtaient à paralyser le ministère de l’Intérieur, l’aéroport ainsi que, naturellement, les émissions radiophoniques et télévisées. »
Les archives ont également apporté de nouveaux témoignages qui permettent de rectifier le nombre de victimes que l’occupation soviétique de la Tchécoslovaquie avait faite, entre le mois d’août et décembre 1968. Milan Bárta, historien de l’Institut d’études des régimes totalitaires :« On est parvenu à retrouver les noms de 14 citoyens tchécoslovaques qui sont morts à la suite du séjour des armées d’occupation en 1968. »
Le nombre officiel des victimes de l’occupation a augmenté pour passer à 108, par rapport aux 94 indiqués jusqu’à présent. Leurs noms, ainsi que leurs photographies et de nouveaux témoignages sur l’occupation soviétique de la Tchécoslovaquie sont dorénavant publiés sur les pages Internet de l’Institut: www.ustrcr.cz