« Traite la mère des villes comme ta propre mère » : Prague demande plus de respect aux touristes
Lancée par l’office du tourisme de la ville, une campagne appelée « Enjoy Respect Prague » appelle les visiteurs de Prague à davantage respecter la capitale et ses habitants.
Composée de dix recommandations, en anglais et en tchèque, la campagne demande aux touristes de faire preuve de plus de considération envers les Pragois. Classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, la capitale tchèque est victime de son succès depuis plusieurs années déjà. Même si les chiffres ne sont pas encore revenus au niveau d’avant les confinements liés à la pandémie de Covid-19, Prague a néanmoins de nouveau accueilli près de six millions de visiteurs en 2022. Un phénomène de masse qui, comme dans les autres grandes destinations touristiques dans le monde, est source d’un certain nombre de nuisances pour les habitants et auquel les autorités tchèques s’efforcent de s’adapter.
« Après 22 heures, les heures de nuit s’appliquent. Ne faites pas de bruit ou ne soyez pas vulgaires. Les habitants de Prague se lèvent le matin pour aller travailler, respectez donc leur droit au repos » peut-on, par exemple, lire ou encore « Ne circulez pas dans les églises pendant les heures de culte - respectez la foi des fidèles ». Si toutes ces recommandations semblent aller de soi, Barbora Scherf, qui travaille pour Prague City Tourism, explique que leur rappel est devenu une nécessité :
« Bien sûr, nous sommes toujours ravis que les touristes viennent visiter la ville. Mais nous pensons aussi que nous devons être responsables, éduquer les gens et les informer sur comment se comporter envers la ville et ses habitants avec respect. »
Barbora Scherf souligne que cette liste de différentes recommandations n’a pas vocation à incriminer les touristes, mais plutôt à leur rappeler quelques règles élémentaires de bonne conduite et aussi, peut-être, à les inciter à réfléchir au sens de leur présence à Prague et en République tchèque :
« Il n’y a pas que des interdictions mais aussi des recommandations positives : par exemple acheter davantage de produits locaux, utiliser les transports en commun ou réserver des visites de la ville avec des guides qualifiés, car il y a vraiment beaucoup d’arnaques. »
Bien que l’intérêt croissant pour Prague ait des retombées très positives pour l’économie de la ville, ce tourisme de masse a aussi de nombreuses conséquences indésirables :
« Nous sommes actuellement confrontés à une véritable vague de boutiques de souvenirs frauduleuses. C’est pourquoi nous nous efforçons de faire la promotion et de cultiver des souvenirs de Prague qui sont à la fois confectionnés par des artistes locaux et respectueux de l’environnement. »
Lancée l’été dernier, la campagne « Enjoy Respect Prague » vise donc à mettre en avant une autre manière d’envisager l’industrie du tourisme, plus responsable, sous le nom de « slow tourism » (littéralement ‘tourisme lent’).
« L’idée du tourisme lent est de prioriser une véritable expérience de la ville, contrairement aux visites éphémères sans valeur dont nous sommes parfois les témoins. Certains groupes de personnes viennent passer quelques jours à Prague sans vraiment chercher à découvrir ou à mieux connaître la ville. Le tourisme lent consiste aussi à vouloir comprendre les habitants, leur culture, leur histoire et leurs besoins. »
Si Prague est une destination européenne connue pour son histoire et son architecture, elle est également devenue au fil des ans une destination prisée des étudiants et autres groupes de jeunes. Sa bière, encore bon marché malgré la forte inflation, et sa vie nocturne particulièrement attirent un public peu désireux de découvrir la culture tchèque. Barbora Scherf estime que Prague est victime de cette popularité :
« Nous voulons proposer une nouvelle conception de Prague en présentant la ville comme une destination européenne premium. L’objectif est de susciter l’intérêt de tous ceux qui s’intéressent à l’histoire ou aux expériences gastronomiques. Cette nouvelle approche sous-entend la nécessité de prendre le temps, d’une certaine lenteur, et même si cela est difficile, nous voulons faire disparaître ces courts séjours qui consistent essentiellement à se saouler pour pas cher sans aucun désir de connaître la ville. »
La capitale tchèque n’est bien évidemment pas la seule ville confrontée à ce genre de désagréments. La semaine dernière, la ville d’Amsterdam a ainsi lancé une campagne appelée « Stay Away » qui invite les jeunes hommes britanniques venus uniquement dans la capitale néerlandaise pour consommer drogues et alcool à l’oublier. Un problème plus général, donc, comme le précise encore Barbora Scherf :
« La campagne s’est construite sur une initiative de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). Il ne s’agit donc pas seulement de Prague, mais d’un concept plus vaste. Chaque capitale, je pense, doit faire face à un certain nombre de problèmes qui lui sont propres, et cette campagne est notre réponse à ce phénomène. »