Transparency International fait pression pour la régulation des lobbies

Photo: adamr / freedigitalphotos

L’action des groupes d’intérêts, qui participent du processus de conception des lois, s’effectue en République tchèque dans la plus grande opacité. C’est le constat critique de la branche tchèque de Transparency International qui, à l’occasion d’une conférence de presse en début de semaine, a présenté différentes mesures, souvent inspirées de celles prises au niveau européen, pour réguler l’action des lobbyistes. C’est ce qu’a exprimé son président David Ondráčka pour Radio Prague :

David Ondráčka,  photo: ČT24
« Nous disons qu’il manque en République tchèque une définition claire du lobbying. Pour nous à Transparency International, il s’agit de tous les contacts entre le secteur public et privé pour influencer la décision publique. »

Selon cette définition, sont considérées comme des lobbies les organisations qui défendent l’intérêt d’entreprises ou de secteurs d’activité, mais également des associations issues de la société civile, à l’instar de Transparency International. Pour l’ONG, les activités de ces structures ne sont pas mauvaises en soi, mais l’absence de cadre dans lequel elles s’effectuent ouvre la voie aux pratiques les plus diverses et en particulier à la corruption. Surtout, les citoyens tchèques n’ont aucun moyen de déterminer dans quelle mesure certaines lois ont été écrites plus ou moins partiellement sous l’influence de groupes de pression. Les exemples seraient pourtant légion selon David Ondráčka:

« Il y a plusieurs exemples qui sont visibles. Je pense par exemple à la loi sur les assurances ou encore à la loi sur le jeu. C’est quelque chose qui est vraiment délicat. Il est difficile politiquement de trouver une solution équilibrée. Parce que nous ne savons pas qui est vraiment lobbyiste sur ces sujets. Il est difficile de dire où sont les groupes d’intérêts derrière ces lois. »

Photo: adamr / freedigitalphotos
Son collègue Radim Bureš évoque quant à lui la gabegie autour de la loi sur le photovoltaïque qui a coûté des millions de couronnes à l’Etat tchèque dans des subventions à l’utilité contestable. C’est donc de transparence qu’aurait besoin le processus législatif en République tchèque. Pour cela, l’organisation Transparency International propose diverses mesures qu’elle recommande de développer progressivement pour éviter qu’elles soient directement contournées par les organisations concernées.

L’idée est de rendre publique l’identité des lobbyistes et les sommes d’argent mobilisées par les grands groupes pour faire pression sur les décideurs. Il conviendrait de s’inspirer des nouvelles règles en vigueur au niveau de la Commission européenne à Bruxelles, le paradis des lobbyistes, puisque leur nombre y est estimé à entre 15 000 et 30 000. Ainsi depuis début décembre 2014, les commissaires européens et les membres de leur équipe doivent publier sur une page Internet l’agenda de leurs rencontres avec des représentants de groupes d’intérêts. Or pour pouvoir rencontrer des responsables européens, les lobbies doivent de leur côté s’inscrire sur le « registre européen de transparence », un registre que David Ondráčka aimerait bien voir copié à Prague et dont il décrit le fonctionnement :

« Ce registre existe à Bruxelles même s’il est volontaire. Aujourd’hui plus de 700 lobbyistes y sont enregistrés et les plus grandes entreprises publient également le montant d’argent qu’elles dépensent en lobbying dans l’Union européenne. »

Photo: Commission européenne
D’après David Ondráčka, le gouvernement tchèque est plutôt réceptif sur cette question d’un registre des lobbies puisque le conseil gouvernemental en charge de la lutte contre la corruption s’est décidé à plancher sur un projet de texte inspiré du modèle bruxellois. Les discussions sont moins poussées en ce qui concerne une réglementation accrue des entreprises sur le sujet du lobbying.

D’importants progrès restent donc à faire. Dans le cadre d’un comparatif européen réalisé récemment par Transparency International, la République tchèque fait moins bien en matière de régulation des groupes d’intérêts que des pays tels que la Slovénie, la Lituanie ou la Grande-Bretagne. Elle est toutefois meilleure élève que d’autres comme la France, la Slovaquie ou l’Allemagne.