Trois mois après l'élargissement : quel bilan pour les entrepreneurs tchèques?
Cela fait déjà un peu plus de 100 jours que la République tchèque a rejoint l'Union européenne. Comment les entreprises tchèques se sont-elles adaptées aux changements provoqués par cette adhésion. Pour tenter de faire un bilan, nous avons invité au micro de Radio Prague Vaclav Smejkal, de l'Institut européen de conseil (ECI).
"L'enquête réalisée sur les différentes opinions et expériences d'une cinquantaine d'entrepreneurs tchèques après 100 jours dans l'UE montre que près de la moitié d'entre eux a réussi à bien négocier son entrée dans l'Union. Ils sentent qu'ils ont été bien préparés, et qu'ils ont réussi à gérer cette préparation grâce à quelques changements dans l'administration de leur entreprise."
"La majorité d'entre eux n'a procédé qu'à des changements d'ordre administratif - moins d'un cinquième des entrepreneurs interrogés a procédé à des changements dans la stratégie ou le marketing. Seulement 3% ont effectué des changements dans les domaines des ressources humaines et du personnel."
Un bilan plutôt positif donc, d'après les chiffres de cette enquête. Mais est-il possible de faire un tel bilan après un laps de temps aussi court. Vaclav Smejkal.
"C'est difficile à dire après 100 jours mais bien sûr... Certaines entreprises se sentaient prêtes, mais peu d'entre elles ont réellement conscience du nombre de problèmes et du nombre d'obligations qu'elles vont devoir résoudre et respecter de manière à être réellement préparées à tous les défis que représente le marché unique européen."
"Et il est assez probable que de profonds changements dans la stratégie, le marketing et les ressources humaines soient entrepris dans le futur car l'enquête montre à quel point la majorité des entrepreneurs tchèques sont préoccupés par la question de l'intégration européenne et du marché unique. Plus de 90% d'entre eux confirment que leur priorité principale est de se préparer au mieux pour le marché unique."
"Un autre problème soulevé était celui de savoir si les entreprises étaient réellement en mesure de suivre toutes les dispositions législatives européennes en vigueur. D'un côté, 11% avouent ne rien suivre du tout et déclarent ne pas trop se soucier de ce qui se passe à Bruxelles et de ce qui est publié au journal officiel, et de l'autre, quasiment le même pourcentage, seulement 12% des responsables interrogés ont déclaré être totalement au courant de ce qui se passait, grâce au journal officiel de l'UE qu'ils suivent régulièrement."
Les médias tchèques, avant et après l'adhésion ont souvent parlé de véritable casse-tête pour les entrepreneurs nationaux "soumis du jour au lendemain à une nouvelle législation". Le problème de la standardisation de la Taxe sur la Valeur Ajoutée a par exemple fait l'objet de débats animés dans le pays.
"Je pense que ça a été un vrai cauchemar pour des milliers d'entrepreneurs. Bien sûr, en principe, les changements étaient connus à l'avance, comment la TVA fonctionne entre la France et l'Allemagne, la France et la Belgique dans leur commerce bilatéral, donc nous pouvions expliquer comment cela devait marcher après le 1er mai. Mais, jusqu'à l'avant-veille de notre adhésion, il n'existait aucune loi tchèque qui stipulait de quelle manière exactement le mécanisme allait fonctionner dans le cas tchèque." "Pour beaucoup d'entreprises ce fut donc un vrai travail 24 heures sur 24 pendant les semaines précédant l'adhésion pour préparer le changement. Et aujourd'hui encore, quelques sociétés ont toujours des problèmes pour remplir correctement les nouveaux formulaires de TVA, etc. Du point de vue du temps, de l'argent, et des investissements, le changement de TVA a probablement été le plus grand challenge au moment de l'adhésion."
Outre ce changement de TVA, quel est le domaine dans lequel les entreprises tchèques ont eu le plus de mal à s'adapter aux normes européennes?"Je pense que, du point de vue légal, les sociétés tchèques souffrent toujours d'un manque d'expérience et peut-être également d'un manque d'informations en ce qui concerne les possibilités de se défendre et de protéger leurs intérêts en surmontant les barrières commerciales et en utilisant le système légal européen."
"Et en ce qui concerne d'autres problèmes importants de normes législatives, après ce problème déjà résolu de la TVA, il est surtout question de la concurrence et des lois sur le domaine commercial, pour faire des affaires dans d'autres pays, envoyer des gens à l'étranger, investir à l'étranger, dans d'autres pays de l'UE."
"Il existe des normes communautaires, mais il reste par ailleurs des règles propres à chaque membre qui diffèrent d'un pays à l'autre. Les sociétés tchèques, pour parvenir à élargir leurs activités, afin de bénéficier réellement de ce plus vaste marché "domestique", doivent apprendre comment s'adapter simultanément aux normes européennes et aux règles particulières aux marchés allemand, polonais, slovaque par exemple pour être capables d'envoyer leurs employés là-bas, etc."
La plupart des patrons de PME tchèques doit encore apprendre à faire des affaires au sein de l'UE. Quelles sont les opportunités qui intéressent le plus les Tchèques? Quels sont les autres enseignements intéressants de cette enquête?
"Il est très clair d'après cette enquête que le "hit" de la saison sont les fonds de l'UE et en particulier les fonds structurels qui procurent de l'argent aux projets et entreprises dans les régions. Plus des deux tiers des sociétés tchèques ont vraiment l'intention de tenter leur chance dans la compétition pour obtenir de l'argent de l'UE.""En ce qui concerne les autres enseignements intéressants de cette enquête, nous apprenons que les responsables de PME tchèques préfèrent obtenir des informations sur les nouvelles normes européennes par le biais d'Internet, de préférence sur des pages web en tchèque. Il est également intéressant de noter que seuls 5% d'entre eux souhaiteraient obtenir ces informations de l'Etat tchèque et seuls 10% voudraient les obtenir par l'intermédiaire d'associations ou de chambres de commerce, etc."