UE et URSS : bonnet blanc et blanc bonnet selon Vaclav Klaus

Le président Vaclav Klaus avec le président Victor Youchtchenko, photo: CTK
0:00
/
0:00

Alors que ce jeudi s'ouvrait à Bruxelles le sommet de l'Union européenne, qui promet des négociations houleuses autour de son budget pour les sept années à venir, le président tchèque, au cours de son voyage officiel en Ukraine, a une fois de plus critiqué l'idée d'une Union comme super-Etat. Sa comparaison forte, avec l'Union soviétique d'antan, n'est guère une coïcidence dans le contexte d'un sommet de toutes les divisions, où, en filigranne, c'est la définition même de l'Union qui est en jeu.

Le président Vaclav Klaus avec le président Victor Youchtchenko,  photo: CTK
C'est un peu le monde à l'envers : alors que l'Union européenne connaît actuellement une de ses plus importantes crises depuis sa fondation, après le double refus de la Constitution par la France et les Pays-Bas, pourtant faisant partie des vieux routards de la construction européenne, d'autres pays ne demanderaient qu'à y entrer, et le plus vite possible. C'est le cas de l'Ukraine qui, après avoir fait sa « révolution orange » en décembre dernier, avait, par la bouche de son nouveau président élu, Victor Youchtchenko, immédiatement insisté sur ses valeurs communes avec l'Europe et, à l'horizon de ses ambitions, une intégration à l'UE.

Le président tchèque, Vaclav Klaus, se trouve justement depuis lundi dans le pays, pour un voyage officiel de trois jours. A l'ordre de sa rencontre avec l'ancien leader de l'opposition aujourd'hui président, les problèmes liés au travail des Ukrainiens en République tchèque, l'assouplissement des conditions d'obtention de visa, mais aussi et surtout les perspectives d'entrée de l'Ukraine dans l'Union européenne et au sein de l'OTAN. Si officiellement, le président Klaus soutient ces deux candidatures, cela ne l'a pas empêché de refroidir les ardeurs pro-européennes des Ukrainiens, lors d'une conférence de presse à Kiev. Certes l'Ukraine ne se fait pas d'illusions et sait que la route est encore longue avant même de se lancer dans de quelconques négociations d'adhésion. Néanmoins, parce que la République tchèque est en quelque sorte, l'« Occident » de l'Ukraine, comme la France ou l'Allemagne ont pu l'être dans le passé pour la République tchèque, en termes de modèle et de références, elle est considérée avant tout comme un membre de cette UE à laquelle l'Ukraine souhaiterait appartenir, cette même UE qui aujourd'hui apparaît comme un colosse aux pieds d'argile.

La question est, en effet, de savoir de quelle Union européenne on parle, à quelles valeurs on fait référence, à quel modèle économique on se rattache, en bref, quels sont les piliers de ce projet de vie commune à Ving-Cinq, a fortiori si l'on envisage un élargissement. C'est là que le bât blesse, et le président Klaus ne le que sait que trop bien, quand, dans une tentative de mise en garde contre trop d'angélisme pro-européen, il a comparé l'Union européenne à l'ancienne Union soviétique. S'il s'est déclaré un fervent partisan de la suppression des frontières, pour la libre circulation des personnes et des capitaux, il a encore une fois critiqué ce qu'il considère comme une tentative de Bruxelles de faire de l'Union un Etat supranational. La référence à l'Union soviétique peut faire mouche dans un pays qui en a fait partie, quand on sait qu'elle a des résonnances en Europe centrale même.

Le président Klaus affine donc sa rhétorique entamée il y a longtemps, et l'actuelle crise identitaire de l'Union lui laisse toute lattitude pour s'engouffrer dans la brêche créée par les deux « non » successifs à la Constitution. Une manière d'appuyer sa propre définition et vision de l'UE, tandis que de plus en plus de voix dans les Etat-membres, s'élèvent en faveur d'une pause dans le processus de ratification, et que la question même de l'élargissement fait pour l'heure figure d'un cadavre qu'on aurait placé dans un placard, jusqu'à nouvel ordre. Une vision de l'Europe selon Vaclav Klaus qu'il propose donc à des aspirants à l'intégration, alors que ses fondateurs même sont plus divisés que jamais.