Un an après la prohibition, le danger de l’alcool frelaté persiste
Un an après le début de l’affaire de l’alcool frelaté, quand du méthanol a été découvert dans des bouteilles non estampillées, le problème persiste. Le méthanol a fait 47 victimes au total et a eu des conséquences graves sur la santé de 130 autres. Neuf personnes sont décédées cette année, alourdissant ainsi le bilan meurtrier, un des plus désastreux de l’histoire récente tchèque. L’heure est désormais au bilan.
« Nous avons d’abord cru qu’il s’agissait d’une absorption accidentelle de liquide de refroidissement, ce qui a été exclu lors des analyses de laboratoires. »
La police confisque ensuite un stock d’alcool frelaté dans certains magasins en Moravie-Silésie. Même s’il est question d’une course contre la montre, le diagnostique de l’intoxication est d’autant plus compliquée à réaliser, dans la mesure où certains patients se rendent alors à l’hôpital dans un état d’empoisonnement avancé, avec des symptômes d’autres maladies. Mais la rapide et large couverture médiatique de la situation a sans doute contribué à épargner la vie d’autres victimes potentielles.
Des recherches, menées depuis janvier 2013 sur les personnes ayant survécu à l’empoisonnement, ont révélé que les conséquences sur la santé étaient diamétralement différentes pour chacun : un individu qui aurait bu plusieurs vodkas frelatées s’en est sorti sain et sauf après quelques jours d’hospitalisation, tandis qu’un autre, qui aurait bu un seul verre de rhum frelaté, a eu le système nerveux central endommagé, le rendant aveugle. Selon les spécialistes, la différence de situation pourrait même résider dans les gènes de chacun. Jaroslav Hubáček, chercheur dans un laboratoire de génétique moléculaire, explique :« L’hypothèse est qu’il y aurait une enzyme qui faciliterait la réaction chimique dans le corps, à la fois de l’éthanol et du méthanol, une enzyme qui existerait sous deux formes. Et une de ses formes serait cent fois plus active. »
Et c’est précisément l’existence de deux formes d’une même enzyme présente dans le corps humain, qui expliquerait qu’on observe des réactions distinctes à l’égard du méthanol. Cela pourrait même fournir une piste pour déterminer pourquoi les femmes ont été deux fois plus victimes que les hommes.
Des lois censées complexifier la distribution d’alcool ont été approuvées par les députés il y a près d’une semaine, et doivent désormais passer devant le Sénat. L'alcool ne pourra plus être vendu dans des bouteilles de six litres, mais dans des bouteilles au maximum deux fois moins volumineuses. D’autres mesures ont été adoptées. Les contrôles seront plus stricts par le biais de prélèvements d’échantillons auprès des commerçants, effectués par l’Inspection générale de l’agriculture et de l’industrie alimentaire. Jindřich Pokora, le président du Bureau de contrôle des laboratoires et des certificats de cette même Inspection, précise que des actions de sensibilisation autour des spiritueux ont été mises en place et que les contrôles restent toujours intenses. Il évoque le type de magasins dont il faut se méfier :« Cela n’a pas beaucoup de sens de contrôler l’origine de l’alcool au sein des supermarchés, qui vendent les spiritueux par le biais de leur centre de distribution. De ce côté-là, il n’y a pas vraiment de raisons de s’inquiéter. Mais ce sont surtout des petits magasins, comme des stands, des commerces de détails, des épiceries de nuit, qui sont visés en premier ordre. »
Le premier procès public dans l’affaire du méthanol s’est achevé à la mi-août dans la ville d’Ostrava. Deux hommes ont été condamnés à huit ans de prison pour la mise en circulation de dizaines de bouteilles de vodka non estampillées. Au total, la police a accusé 71 personnes, dont 31 risquent entre 12 et 20 ans de prison, et même pour certains la prison à vie. Le procès, mettant en cause les acteurs principaux de cette affaire, se prépare dans la ville de Zlín et devrait débuter à l’automne. Malgré le fait que l’alcool frelaté n’a pas fait d’apparition depuis février dernier, la prudence des consommateurs est plus que nécessaire, car, selon la police, le danger existe toujours. Il y aurait environ 5 000 bouteilles, près de 2 000 litres d’alcool, encore en circulation.