Un an après le départ de Václav Havel... vingt ans après la partition de la Tchécoslovaquie
Ce mardi 18 décembre, une année se sera écoulée depuis le décès de l’ancien président tchèque, Václav Havel, figure emblématique de la dissidence et de l’opposion au régime communiste dans les pays de l’Est. Toute une série d’événements sont prévus pour marquer ce premier anniversaire qui est largement évoqué, aussi, par la presse. Vingt ans après la partition de l’ancienne Tchécoslovaquie, les médias s’interrogent sur la situation et les différents aspects de l’évolution dans les deux pays. Et comme chaque année, la presse ne manque pas de se consacrer à différents thèmes liés à l’approche des fêtes de Noël.
« Je ne m’attendais pas à ce que je puisse être à tel point ému par la mort d’un homme politique et je sais que cela ne pourra plus jamais se reproduire. Je ne veux pas juger Havel en tant que président. L’important pour moi ce sont mes souvenirs des temps qui me semblent aujourd’hui tellement lointains. J’ai vu Havel pour la première fois en décembre 1988, lors de la première manifestation autorisée par les communistes. Il était le symbole de tout ce que le régime détestait et réprimait... Havel incarnait pour moi l’espoir. Et c’est ainsi qu’il reste gravé dans ma mémoire ».
Au cours des derniers mois de sa vie, Václav Havel était soigné dans sa résidence secondaire, Hrádeček, par des religieuses. Selon leur témoignage confié au journal, Havel se comportait à l’égard de tout le monde en homme simple et extrêmement poli... Une occasion aussi pour elles de souligner que, jusqu’au dernier moment, il a gardé son esprit combatif :
« Parfois, il se plaignait que les gens ne comprenaient ses idées que de façon superficielle. Il était triste de voir que la société sombrait dans la léthargie, tout en admettant toutefois que le peuple avait assez de force pour faire valoir sa voix ».
Le supplément de ce vendredi du quotidien Lidové noviny publie à son tour des témoignages de trois personnes très proches de Václav Havel : deux amis, hommes de théâtre, avec lesquels il collaborait étroitement et le chef du corps de garde. Tous les trois rappellent non seulement les derniers moments de la vie de l’ex-président tchèque, mais aussi des moments plus anciens et plus joyeux qu’ils ont pu partager avec lui dans son légendaire chalet de Hrádeček. Des souvenirs des temps où Vaclav Havel n’était pas encore président, mais un simple copain, appelé « Vašek ».
Dans un commentaire publié dans le quotidien Právo, au lendemain de la récente visite à Prague du président slovaque, Ivan Gašparovič, le politologue Jiří Pehe s’interroge : « Pourquoi la situation en Slovaquie est-elle meilleure qu’en Tchéquie ? » Il explique :
« La partition de la Tchécoslovaquie a profité à la Slovaquie, car, à la différence de la Tchéquie, celle-ci représentait pour elle un défi positif. Pour la première fois, elle pouvait édifier son Etat dans un milieu démocratique, tandis que l’identité de la Tchéquie relève encore aujourd’hui de ‘ce qui est resté de la Tchécoslovaquie’. Après son éclatement, l’importance géopolitique des Tchèques a diminué, alors que celle des Slovaques s’est vue renforcée. »
L’auteur de l’article met aussi en relief l’importance de la révolte de la société civile slovaque contre le régime de Vladimír Mečiar en 1998, rappelant l’une des idées de Václav Havel, selon laquelle les ex-pays communistes avaient besoin de deux révolutions : l’une contre le communisme et l’autre contre le post-communisme. Cette deuxième révolution semble effectivement avoir eu lieu en Slovaquie, mais guère en Tchéquie. De ce fait, la société civile en Slovaquie est plus robuste et plus viable.
« La Slovaquie a aussi moins de problèmes avec son appartenance à l’Union européenne, la position tchèque étant souvent schizophrène. Voilà pourquoi elle utilise, à la différence de la Tchéquie, l’euro », peut-on lire plus loin.
Jiří Pehe estime qu’un certain succès de la Slovaquie serait dû, aussi paradoxal que cela puisse paraître, à sa diversité nationale :
« La coexistence des Slovaques et de la minorité hongroise est loin d’être harmonieuse, il est vrai. Mais les Slovaques, encore à la différence des Tchèques, n’ont pas perdu un ‘miroir’ offrant un reflet critique. Cette diversité exige aussi de la politique slovaque la capacité de chercher des compromis difficiles. Presque homogène sur le plan ethnique, la société tchèque a de son côté tendance à guérir ses frustrations sur la communauté rom, relativement petite, et sur les immigrés ».
En conclusion, l’auteur de l’article constate :
« D’une manière générale, ce qui marque la différence principale entre les Tchèques et les Slovaques, c’est notre tendance à mener incessamment des ‘batailles du passé’. Les Slovaques, quant à eux, portent principalement leur regard vers l’avenir, tandis que le président tchèque et ses alliés politiques se réfèrent aux ‘traditions’. Au lieu de se pencher sur leur propre avenir et sur l’avenir européen, les Tchèques préférent lutter contre les spectres du passé : la perte de la souveraineté, les Allemands des Sudètes, les transferts patrimoniaux, les communistes de l’époque de la normalisation ».
Cette année, les Tchèques veulent dépenser moins d’argent pour les fêtes de Noël qu’auparavant. C’est ce qu’observe un article pubié sur le serveur ihned.cz qui se réfère aux données révélées par une récente enquête. Elles indiquent que le coût du repas du réveillon et du sapin de Noël inséparable de ces fêtes en Tchéquie, va se situer en moyenne autour de 4 000 couronnes (l’équivalent de quelques 160 euros) par famille. L’économiste Michal Kozub explique :
« En raison de la mauvaise situation économique, une grande partie des ménages tchèques ne veulent pas dépenser autant que durant les années précédentes. Compte tenu de la croissance de l’inflation, de la hausse du prix des denrées alimentaires et du taux de chômage qui est en hausse, les gens ne veulent pas prendre de risques. De ce fait, très rares sont cette année les Tchèques qui passeront les fêtes de Noël dans un restaurant ou à l’étranger ».
Comme le veut d’ailleurs la tradition, la majorité des Tchèques vont donc passer les fêtes de Noël en famille. La tradition semble prédominer, aussi, en ce qui concerne le choix et l’achat de cadeaux qui sont majoritairement faits dans des magasins « classiques ». Un phénomène nouveau quand même : parmi les gens qui achètent par internet on trouve de plus en plus de personnes de plus de soixante ans.
C’est une autre crise – celle liée à l’affaire de l’alcool frelaté qui a donné lieu à des intoxications en chaîne et à la mort de plus d’une trentaine de personnes – qui est la cause principale de la chute de la vente de boissons alcoolisées qui se situe actuellement autour de 10%. Le quotidien Mladá fronta Dnes souligne que les craintes provoquées par cette affaire persistent :
« Il s’avère que les gens sont aujourd’hui plus prudents. Cela concerne particulièrement certaines catégories de boissons, en premier lieu le rhum local et la vodka dont la consommation a baissé de près de 30% ».
Que boivent donc les gens à la place de ces boissons incriminées? Le mystère selon le journal est total car, comme il le signale, « la prohibition a touché, aussi, la consommation et la vente du vin et de la bière, à cause des sorties dans les restaurants qui sont actuellement moins fréquentes ».