Un jeu vidéo inspiré de Franz Kafka
Le mois de juin 2024 marquera les 100 ans de la mort du célèbre écrivain pragois d’expression allemande, Franz Kafka. A cette occasion, le studio de jeu vidéo Charles Games, en partenariat avec l’Institut Goethe, a développé un jeu en 3D qui se déroule dans le monde des nouvelles de Kafka. La première partie du jeu, basée sur la nouvelle Le Procès, est déjà disponible. La version finale et complète du jeu sortira en mai et sera disponible en tchèque, anglais et allemand. Ondřej Paška, directeur technique de Charles Games, nous en dit plus.
« On avait approché l’Institut Goethe de Prague il y a deux ans pour lui proposer de travailler ensemble. Ensuite ce sont eux qui sont revenus vers nous avec l’idée d’un jeu sur Kafka, à l’approche du centenaire de sa mort. Ils avaient déjà fait un jeu sur Kafka auparavant, mais c’était juste une courte expérience en VR basée sur la nouvelle La Métamorphose. »
Combien de temps a duré le développement du jeu ?
« C’était un grand défi d’adapter le travail de Kafka pour un jeu. Nous avons décidé de le diviser en trois parties. Les deux premières parties sont basées respectivement sur les romans Le Procès et Le Château et la troisième sur l’œuvre autobiographique Lettre au Père. Il a fallu environ six mois pour développer un prototype. Ensuite, on a pris le temps d’analyser les retours et nous sommes en train de peaufiner les deux dernières parties. Donc le jeu nous a pris environ un an, mais nous n’avons pas travaillé à temps-plein dessus. »
Comment pourriez-vous décrire l’objectif de ce jeu ? Est-ce un jeu pour éduquer, pour divertir, ou les deux ?
« C’est les deux, mais le but principal est d’intéresser les gens qui pourraient décrocher des livres de Kafka ou qui pensent que Kafka n’est pas amusant. D’habitude, Charles Games développe des jeux éducatifs pour les enfants, mais avec ce jeu, on vise une audience plus large. Kafka est probablement trop complexe pour des jeunes de moins de 12 ans, mais au-delà, il peut intéresser tout le monde. Il n’y a pas de mécaniques de jeu et d’énigmes trop dures ou complexes. Notre objectif est de rendre le jeu accessible aux gens qui ne jouent pas régulièrement aux jeux vidéo et qui cherchent une nouvelle manière d’approcher le travail de Kafka. »
Vous avez sorti la première partie du jeu, inspirée par Le Procès, en juin 2023. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur le jeu et en quoi est-ce qu’il consiste ?
« Dans chacune des trois parties, on joue Joseph K, le protagoniste du roman. On se retrouve dans la même situation que lui au début de l’histoire. Donc vous regardez la scène à la troisième personne, comme si vous regardiez une scène de théâtre. Les personnages vont et viennent et parlent à Joseph K. On peut le déplacer comme une marionnette, et cela crée des interactions et déclenche des dialogues avec les autres personnages. C’est comme cela qu’on avance. A mesure que l’on progresse dans les différentes scènes, le monde devient de plus en plus bizarre, jusqu’à une fin très sombre. »
Pourquoi avoir choisi de faire des personnages avec des visages vides ?
« Un des thèmes principaux de Kafka que nous voulions représenter est l’aliénation et l’anonymat de la machine bureaucratique. D’où le choix de personnages et d’environnements très épurés. C’était une des grandes problématiques au début du projet, lorsque nous avons développé la direction artistique. Ainsi ce choix rend le jeu unique et cela permet d’exprimer des thèmes comme l’aliénation, l’anxiété, la bureaucratie, etc. »
Le jeu va sortir dans le contexte du centenaire de la mort de Kafka. Selon vous qu’est-ce qui rend le travail de cet auteur pertinent pour les jeunes lecteurs ?
« Je pense que les thèmes explorés par Kafka, comme la solitude et la peur existentielle face à des organisations bureaucratiques anonymes, sont plus pertinents que jamais, qu’il s’agisse de la bureaucratie d’Etat ou la machinerie des grandes entreprises technologiques. De même, sa description de sa vie personnelle et de sa relation avec son père est vraiment en avance sur les théories psychanalytiques de l’époque. Je pense que c’est très intéressant pour les jeunes, notamment pour leur relation avec leurs parents. »
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