Un mariage de raison

Photo: Commission europénne
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Réduction du taux d'émission de CO2, diminution du gaspillage de l'énergie, les nouvelles directives européennes veulent résolument réconcilier économie et écologie. Un défi de taille, qui revient fréquemment sur le devant de la scène médiatique tchèque. Si la République tchèque est engagée dans les divers processus environnementaux, les acteurs économiques réagissent encore mal aux nouvelles orientations.

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Le gouvernement Topolanek a déclaré accepter, sous certaines conditions seulement, le dernier projet de réduction des émissions de dioxyde de carbone de 20 %, formulé par l'Union Européenne. Ce plan a été présenté aux Etats membres le 9 mars dernier à Bruxelles. Le but est de baisser, d'ici 2020, les niveaux de 1990 d'un cinquième.

Plus que sceptique, le premier ministre a finalement donné son accord. Avec une condition : que les clauses soient revues de manière à donner à chaque Etat signataire le droit de ne pas atteindre les seuils fixés par l'UE.

Alors que les sources d'énergie renouvelable représentent en moyenne 6,5 % de la production totale d'énergie dans les pays de l'UE, en République tchèque, elles stagnent à 4,5 %. Pour le premier ministre tchèque, le pays peut atteindre, d'ici 2013, une part d'énergie renouvelable de 8 % mais les 20 % requis par la Commission Européenne pour 2020 ne lui semble pas réalistes. Rappelons que le seuil de 8 % pour 2013 a été formulé par le protocole de Kyoto.

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C'est aussi l'avis du président de la Confédération Tchèque de l'Industrie, Jaroslav Mil. Selon lui, le développement de nouvelles sources d'énergie aboutirait à une augmentation drastique de son prix et aurait également un impact négatif sur certains secteurs de l'économie. Fait-il allusion à l'industrie forestière, déjà fortement touchée par les intempéries de cet hiver.

L'industrie du charbon est également dans la ligne de mire. Martin Bursik, le ministre actuel de l'Environnement, nuance en précisant qu'il ne s'agit pas d'éradiquer totalement la production de charbon mais de la réduire au profit de sources d'énergie plus propres.

Il faudra néanmoins encore beaucoup de temps pour convaincre les entreprises des secteurs concernés. Exemple éloquent avec les récentes poursuites engagées par le producteur d'acier américain US Steel en Slovaquie, contre la Commission Européenne. La société est la plus grande émettrice de dioxyde de carbone dans le pays. Pour ses dirigeants comme pour le gouvernement slovaque, les tentatives de légiférer sur le CO2 mettent un frein à la croissance et aboutissent à une hausse du taux de chomâge. Vision à court terme ? Ce qui est sûr, c'est que l'écologie a ses raisons que l'économie ne connaît pas... Ou ne connaît pas encore !

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22% de la concentration en CO2 de l'atmosphère provient des activités humaines. L'utilisation massive des forêts, pour ne citer qu'un exemple, a largement favorisé ce phénomène. D'où la remarque de Topolanek : «même si nous abattions toutes nos forêts, nous ne pourrions pas atteindre les 20 % de réduction prévus par l'UE».

La République tchèque est 18ème sur la liste des pays émetteurs de CO2 par habitant établie en 2002 par l'ONU. Elle se place derrière les Etats-Unis mais bien avant la France, classée 50ème.

Les autorités tchèques semblent aujourd'hui rechigner à investir dans l'énergie solaire et les autres sources d'énergie renouvelables. Un constat plutôt étonnant vu la faible dépendance de l'économie tchèque des industries lourdes ou même minières, sources importantes d'émission de CO2. Et ceci différencie la République tchèque de ses voisins d'Europe centrale et orientale.

Il n'en reste pas moins que, depuis la chute du communisme, la République tchèque a quand même beaucoup fait pour imposer des technologies non polluantes. D'ici à la fin de l'année, les municipalités mais aussi les propriétaires ou les écoles devraient recevoir des subventions de l'Union Européenne afin de développer les sources d'énergie renouvelable. Une somme rondelette de 20 milliards de couronnes, répartis jusqu'à 2013.

Le ministre actuel de l'Environnement, Martin Bursík voit quant à lui encore plus loin, en placant, dans le gaz, l'espoir d'une alternative à l'énergie nucléaire, en raison de ses faibles taux d'émission de CO2.

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Et d'évoquer également ses avantages économiques, dont en premier lieu la flexibilité et l'adaptabilité aux changements fréquents du marché. Bursik met également en avant la rapidité avec laquelle on peut construire un centre de production gazier. Quelques années seulement contre une quinzaine dans le cadre de l'énergie nucléaire.

Si le gaz peut difficilement lutter contre l'électricité, produite à partir du lignite et bien moins onéreuse, il est un enjeu d'avenir, l'Europe essayant de diminuer sa dépendance à l'égard de la Russie dans ce domaine.

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C'est depuis environ 150 ans que la quantité de CO2 relâchée dans l'atmosphère a beaucoup augmenté, sous l'effet du rapide développement industriel. D'un niveau de 280 ppm en 1850, la concentration en dioxyde de carbone dans l'atmosphère est passée à 364 ppm en 1998.

Outre les dangers du CO2, le gaspillage de l'énergie est également de plus en plus soulevé, toujours en lisière de l'économie et de l'écologie. Pour y remédier, la Commission Européenne a lancé, en novembre dernier, un programme de construction d'habitats peu consommateurs d'énergie. La République tchèque a ratifié ce projet en juillet 2006. Son application doit se faire en plusieurs étapes. Ce sont d'abord les équipements domestiques, téléviseurs, photocopieur, éclairage, auxquels on appliquera les nouveaux standarts.

L'économie de demain, en Europe comme en République tchèque, sera écologique. Le défi est clair : allier deux concepts qui ne font a priori pas bon ménage. Le président tchèque Václav Klaus, anti-écologiste de longue date, a quant à lui déjà fait son choix ... Lequel ?