Une arrestation dans la tempête pré-électorale
Une affaire judiciaire à coloration électorale ou une affaire électorale à coloration judiciaire ? C'est la question insoluble que soulève l'incarcération d'un certain Srejber. Les détails avec Omar Mounir.
Milan Srejber, ancien champion de tennis et homme d'affaires, s'est fait écrouer, la semaine dernière, après une condamnation pour transactions illégales avec des titres négociables. Une affaire de 1995, réputée avoir rapporté à Srejber la coquette somme de 14,1 millions de couronnes. Cette mise sous les verrous est intervenue alors que l'intéressé était couché à l'hôpital militaire de Plzen, après une opération. La police est allée le chercher dans une ambulance et l'a transporté à l'hôpital de la prison de Pankrac, à Prague. Or, nous sommes en période pré-électorale, et Srejber, puissant homme d'affaires, avait sponsorisé, en 1997, le Parti civique démocrate de Vaclav Klaus. A l'époque, ce sponsoring maladroit par prête-nom, avait donné lieu à un concert de spéculations. Srejber aurait récompensé l'ODS pour quelques passe-droits.
Mais une question se pose : pourquoi avoir laissé cavaler Srejber toutes ces années-là pour ne l'arrêter que maintenant ? Dans les faits, c'est lui qui a fait courir la justice, notamment par un long séjour aux Etats-Unis. Il n'empêche que Vaclav Klaus, dans un brûlot publié par Lidove noviny, dénonce ce qu'il appelle l'arrestation, à l'hôpital, d'un "malade encore ensanglanté". L'occasion pour lui d'allonger une longue liste de consciences qu'il juge "endormies", où pas même le président Havel n'est épargné. Autrement, cette arrestation n'a pas l'air d'émouvoir la place politique. Pour le ministre de l'Intérieur, Stanislav Gross (social-démocratie), la police a agi en conformité avec la loi. Hana Marvanova et Cyril Svoboda, respectivement présidents de l'Union de la liberté - Union démocratique et des chrétiens-démocrates, estiment qu'il serait déplacé de juger les modalités de cette arrestation, c'est l'affaire des avocats.
Mais Vaclav Klaus, au risque d'enfreindre le principe de la séparation du pouvoir, dit que le transport de Srejber s'est fait contre la volonté des médecins de l'hôpital de Plzen. Le vice-président du tribunal de Prague, Bohuslav Horky, ne le contredit pas. Il affirme seulement que les médecins de la prison, aussi bien que ceux de l'hôpital militaire de Plzen, ont déclaré que l'état de Srejber n'empêche pas l'exécution de la peine.