Une commission pour réévaluer la période post Montagne Blanche

La bataille de la Montagne Blanche

En attendant le 400ème anniversaire de la bataille de la Montagne Blanche, qui s’est déroulée en 1620, catholiques et protestants s’apprêtent à réévaluer la période qui l’a suivie, encore méconnue aujourd’hui. Tel est le premier thème traité dans cette nouvelle revue de presse. On s’interrogera ensuite sur l’impact électoral de l’affaire dite du Nid de cigognes, dont le chef du mouvement ANO Andrej Babiš est le principal acteur. On apprendra également que le dernier dirigeant du régime communiste, Milouš Jakeš, 95 ans, demeure fier de ses activités en faveur de « l’édification du socialisme ». Nous vous présenterons un extrait de ses déclarations avant de conclure avec quelques mots au sujet de l’intention de la municipalité pragoise d’équiper les espaces publics de la capitale d’œuvres d’art contemporaines.

La bataille de la Montagne Blanche
Déjouer les légendes, les mythes et les fausses interprétations liés à l’ère qui a suivi la bataille de la Montagne Blanche (Bílá Hora) de l’an 1620. Tel est le but de la Commission spéciale pour l’histoire religieuse du XVIIe siècle, récemment constituée, et qui est composée de représentants religieux et de théologiens catholiques et protestants, ainsi que d’historiens. La bataille, une des plus importantes de la Guerre de Trente ans, a opposé catholiques et protestants. La défaite qui y a été infligée à l’armée des Etats de Bohême a décidé du sort et de l’orientation des pays tchèques pour les 300 années qui ont suivi. Elle a entraîné l’interdiction du protestantisme en Bohême et le départ de milliers de protestants, qui ont alors pris le chemin de l’émigration. Pendant longtemps, cette époque a été dans le pays présentée, à travers la littérature, les arts, les médias et les représentants politiques, comme une période d’obscurantisme très profond. L’hebdomadaire Respekt rapporte à ce sujet :

« Tout indique que les travaux de la commission, qui veut ‘mettre en ordre’ cet important chapitre de l’histoire tchèque, seront d’un grand intérêt. Disposant déjà de toutes les connaissances historiques, les experts concernés ne s’attendent pas à de nouvelles découvertes révolutionnaires. Tel n’est pas par ailleurs l’objectif de la commission. Ils espèrent toutefois l’ouverture d’un large débat sur les différentes interprétations religieuses, politiques, sociales et culturelles des événements de l’époque, alors que celles qui sont ancrées dans la mémoire et dans la conscience nationale ne correspondent pas aux faits historiques réels. »

Les historiens cités dans ce texte considèrent que les deux principaux mythes se rapportent au déroulement même de la bataille de la Montagne Blanche et à la Contre-Réforme qui s’en est suivie. De leur avis, la Contre-Réforme n’aurait pas été aussi forcenée qu’on aime le prétendre, sauf durant les premières années. Ils mettent aussi en relief le rayonnement de l’art baroque qui s’est produit dans les pays tchèques dès la fin de la guerre de Trente Ans. Selon l’auteur du texte publié dans l’hebdomadaire Respekt, ces mythes seraient dans une grande mesure responsables de la profonde aversion à l’égard du catholicisme au sein de la société tchèque et qui s’est manifestée, par exemple, lors de l’adoption de la loi sur les restitutions des biens confisqués aux Eglises qui a pris effet en 2013. Les travaux de la Commission spéciale pour l’histoire religieuse du XVIIe siècle s’étendront sur trois ans pour culminer par une grande conférence prévue pour l’an 2020, l’année du 400ème anniversaire de la bataille de la Montagne Blanche.

Le mouvement ANO à l’heure de l’affaire dite du Nid de cigognes

Le Nid de cigognes,  photo: CzechTourism
L’affaire des fraudes aux subventions européennes liée à la ferme dite du Nid de cigognes, dont le chef du mouvement ANO, Andrej Babiš, ancien ministre de Finances, est le principal protagoniste, ne va pas probablement avoir des retombées graves sur les intentions de vote en faveur de cette formation. C’est du moins ce qu’estime le sociologue Jan Herzmann qui en a fait part pour le quotidien Hospodářské noviny alors que la police a demandé à la Chambre des députés la levée de l’immunité d’Andrej Babiš et de Jaroslav Faltýnek, son collaborateur le plus proche. Une façon de pouvoir engager à leur encontre des poursuites judiciaires dans cette affaire. Jan Herzmann explique pourquoi :

« Si cette affaire avait influencé les gens, ils se seraient détournés du mouvement ANO dès le moment où celle-ci a été débattue au Parlement. Mais je pense que même si une partie de ses électeurs va s’abstenir ou préférer un autre parti, le tout n’aura pas finalement un trop grand effet. Le noyau dur des sympathisants du mouvement ANO lui restera certainement fidèle. Seul un événement vraiment dramatique pourrait affaiblir sa position. Bref, tous ceux qui ont fait jusqu’ici confiance à Andrej Babiš continueront de le faire. »

Selon le sociologue cité, on ne saurait pourtant dire que les électeurs du mouvement ANO sont plus tolérants que les sympathisants d’autres partis vis-à-vis des affaires. Cette polémique a à ses yeux un caractère très spécifique :

« Ce qui est unique c’est que cette affaire touche les électeurs au moment où le mouvement ANO est de plus en plus populaire et où il a une chance de remporter les élections législatives avec un gros écart. Une situation qui ne s’est encore jamais produite auparavant. Voilà pourquoi il est difficile de tirer une leçon du passé. De même, on ne saurait exclure que les sympathisants de Babiš perçoivent cette affaire comme une tentative de renverser le résultat des élections, ce que ce dernier a d’ailleurs tendance à prétendre. »

L’ancien dirigeant communiste Milouš Jakeš, 28 ans après

Milouš Jakeš,  photo: Štěpánka Budková
Une participation à l‘édification du socialisme dans l’ancienne Tchécoslovaquie. C’est ce que le dernier numéro un de l’ancien régime communiste, Milouš Jakeš, considère comme le plus grand succès de sa vie, en dépit de la disparition de ce système. Il l’a confirmé dans un entretien accordé aux médias à l’occasion de son 95ème anniversaire, qu’il a célébré samedi dernier. Convaincu de la justesse de l’ancien système, cet ancien haut fonctionnaire communiste a en même temps critiqué le changement de régime qui n’aurait apporté « que des choses négatives, dont en premier lieu la privatisation des biens nationaux ». Et, comme d’habitude, il n’a pas omis de mentionner le prétendu rôle des services de renseignements occidentaux lors de la chute du régime :

« Ce n’est pas un hasard que le Congrès américain ait fait installer dans sa salle un buste de Václav Havel. On voit bien que ce sont ces forces-là qui ont soutenu et encouragé chez nous les opposants au régime, tous ceux par qui les problèmes sont venus. »

L’hebdomadaire Reflex, qui a apporté plusieurs extraits de cet entretien, remarque enfin que tout en ayant célébré son anniversaire en famille, Milouš Jakeš a obtenu de très nombreuses félicitations de la part de ses fidèles. Rappelons qu’aux dernières élections législatives, le Parti communiste de Bohême et de Moravie, successeur de l’ancien Parti communiste tchécoslovaque, a été plébiscité par près de 14% des votants. Un score que les actuelles intentions de vote lui prédisent également, pour les prochaines élections qui auront lieu dans deux mois.

Pour une Prague plus moderne

Les sculptures  (La fontaine dansante d'Anna Chromy à Prague,  Senovážné náměstí,  photo: Šjů,  CC BY 4.0
La maire de Prague Andrea Krnáčová veut éliminer du centre de Prague les œuvres d’art médiocres, pour les déplacer vers des quartiers périphériques, loin des parties de la ville fréquentées par les touristes. Elle s’est à ce sujet confiée au site echo24.cz :

« Je veux concentrer les objets d’art de mauvaise ou de moyenne qualité à un seul endroit, car à l’heure actuelle, Prague ressemble à un musée à ciel ouvert. En effet, ce n’est pas une ville pouvant se targuer d’œuvres d’art contemporaines. Cela ne veut pas pour autant dire que tout ce qui y a vu le jour dans le passé soit mauvais et devrait disparaître. Il faut toutefois évaluer sérieusement ce que l’espace public à Prague devrait abriter. Le problème, ce sont souvent les sculptures que la ville a obtenues en cadeau et dont la qualité ne répond pas aux critères et aux impératifs de l’époque actuelle. »

C’est désormais une commission apolitique qui aura en charge l’évaluation de la qualité des sculptures et la prise de décisions au sujet de leur conservation ou de leur éventuel déplacement. En cas de contentieux au sein de celle-ci, c’est au public qu’incombera l’autorité des décisions.