Une funambule réunionnaise en ouverture du festival de cirque Letní Letná

Tatiana-Mosio Bongonga à Prague, photo: Tomáš Vodňanský, ČRo

Elle s’appelle Tatiana-Mosio Bongonga, elle est funambule depuis ses huit ans, et c’est cette Réunionnaise qui a été choisie pour ouvrir ce mercredi le festival de cirque Letní Letná. Arrivés à Prague il y a quelques semaines à cette occasion, elle et son équipe, le collectif Basinga, qu’elle a co-créé en 2014, finalisent les derniers préparatifs de la périlleuse traversée qu’elle a prévue pour l’occasion. Colin Gruel l’a rencontrée avant le grand saut.

Tatiana-Mosio Bongonga à Prague,  photo: Tomáš Vodňanský,  ČRo

« Je serai à 40 mètres de haut sur 400 mètres de long quasiment, donc c’est une belle marche ! On va partir de la Faculté de droit et traverser toute la rivière jusqu’au parc de Letná », annonce fièrement Tatiana-Mosio Bongonga.

Tatiana-Mosio Bongonga à Prague,  photo: Tomáš Vodňanský,  ČRo
Survoler la Vltava sur un fil, depuis la Faculté de droit jusqu’au parc de Letná, c’est le pari de la funambule Tatiana-Mosio Bongonga. Et à 34 ans, elle n’en n’est pas à son premier coup d’essai, s’étant déjà fait remarquer il y a un an lors de sa traversée de la butte Montmartre à Paris, à 35 mètres de hauteur. Ce nouveau défi pragois auquel elle s’attaque représente la traversée la plus longue qu’elle n’a jamais réalisée.

« Le moment où je suis sur le fil, c’est un moment chouette mais hors-temps, raconte-t-elle. Après la traversée, je ne comprends pas ce qui s’est passé, je ne me rappelle pas ce que j’ai fait. C’est seulement plus tard, en visionnant les images que je m’y reconnecte, comme si j’étais partie ailleurs. Après, dans le retour, ce qui est agréable, ce sont les gens qui viennent me prendre dans leurs bras, pas les autographes ou les questions des journalistes : plutôt les personnes qui sont touchées, et qui vont me faire de grands sourires, c’est la meilleure récompense. »

Une performance qui éblouit par l’étonnante impression de facilité qui s’en dégage, mais aussi par le danger que représente l’exercice. Difficile de ne pas retenir son souffle quand Tatiana-Mosio Bongonga, éclatante et souriante, promène son balancier sur un fil.

Tatiana-Mosio Bongonga à Prague,  photo: Tomáš Vodňanský,  ČRo
« Moi, j’ai l’impression que les gens projettent leurs peurs sur moi : ils se disent que ce n’est pas possible, que c’est une trop grande prise de risque. Et donc je me sens responsable, je dois les apaiser, leur dire que je ne fais que ce que je suis capable de faire et que je m’amuse ! », conclut-elle en soutiant.

Un message qui n’est pas passé chez tout le monde. De plus en plus, raconte-t-elle, elle fait face à des responsables qui veulent instaurer davantage de protocoles sécuritaires. Une dérive, selon elle, qui nuit à sa discipline.

« Des responsables, hauts placés, veulent réfléchir à notre place sur notre sécurité, mais ils ne sont pas du tout spécialisés en la matière. lls doivent nous faire confiance : nous sommes des artistes, professionnels, avec une excellente équipe technique, alors quand on dit qu’on est capables d’y aller sans une longe, c’est qu’on peut le faire ! Nous avons tout un protocole qui fait qu’en cas de souci, je peux descendre à tout moment, et alors les techniciens peuvent venir me chercher. Nous ne sommes pas des têtes brûlées ! »

Tatiana-Mosio Bongonga à Prague,  photo: Tomáš Vodňanský,  ČRo
La funambule a été formée à bonne école, notamment par Rudy Omankowsky Junior, le fils du fondateur des Diables blancs, cette troupe familiale justement originaire de Prague, qui forma notamment le funambule français Philippe Petit, célèbre pour avoir marché sur un fil entre les tours jumelles du World Trade Center en 1974. Un héritage qui, on l’espère, donnera des ailes à Tatiana-Mosio Bongonga ce mercredi.

« Je me suis entraînée avec Rudy Omankowsky Jr quand il était à Châlons-en-Champagne. Il me donnait des cours en cachette dans son école. Il était à la retraite, à l’époque. Ce qui est beau dans ce qu’il m’a donné, c’est qu’il m’a enseigné une méthode, une façon de faire. Et puis nous avions un rapport très différent de ce que ses élèves ont vécu. C’était une sorte de grand-père, nous avions une complicité, et j’avais une très grande liberté. J’ai eu beaucoup de chance. »

Rendez-vous donc mercredi à partir de 18h00, à la Faculté de droit de l’Université Charles, sur les bords de la Vltava, aux abords du parc de Letná, ou bien en direct sur notre page Facebook pour l’ouverture spectaculaire du festival Letní Letná, qui durera jusqu’au 1er septembre.