Une mystérieuse société tchèque sème le trouble en Asie centrale
Une entreprise tchèque inconnue au bataillon, des projets de centrales hydro-électriques en Asie centrale, des soupçons de corruption au plus haut sommet de l’Etat tchèque… Depuis quelques mois, ce sont les ingrédients d’un important scandale commercial opposant la mystérieuse société tchèque Liglass Trading et le gouvernement kirghize. La semaine dernière, l’affaire a peut-être connu son dénouement. Retour sur ce dossier complexe.
Le gouvernement décide donc de se tourner vers la société tchèque Liglass Trading, qui assurait avoir mené des projets similaires en Slovaquie et en Italie. L’affaire aurait pu s’arrêter là, mais la société tchèque finit par attirer l’attention des journalistes des deux pays, et pour cause :
Liglass Tarding, dont la notoriété est proche de zéro, avait de surcroît été déconseillée par plusieurs diplomates kirghizes qui affirmaient n’avoir trouvé aucune preuve de l’existence desdits chantiers slovaque et italien. Comme l’explique par ailleurs Luboš Joza, diplomate économique tchèque au Kazakhstan, Liglass Trading n’a jamais fait appel aux services diplomatiques régionaux de la République tchèque :« Liglass Trading n’a jamais pris soin de nous rendre visite, ni même de nous contacter. Ils n’ont participé à aucune de nos activités au Kirghizistan, où sommes pourtant très actifs depuis deux ans. »
L’affaire a récemment pris un tour nouveau lorsque les médias tchèques et kirghizes ont mis en avant le fait que Liglass Trading avait été spécialement recommandée auprès du gouvernement de Bishkek par Vratislav Mynář, le directeur du Bureau présidentiel de Miloš Zeman. C’est le média Aktuálně.cz qui, au début de ce mois d’octobre, a apporté une première piste d’explication : les rapports financiers annuels du micro-parti du Droit des Citoyens (SPO), qui a financé la campagne de l’actuel président de la République Miloš Zeman, mentionnent un don de Liglass Trading à hauteur de 200 000 couronnes, environ 7 800 euros.
Vratislav Mynář, aujourd’hui président du SPO, a déclaré qu’il était alors seulement à la tête d’une branche régionale du parti et qu’il n’avait aucune idée de l’existence de cette source de financement, bien qu’elle figure dans les rapports financiers du parti. Il a par ailleurs justifié devant les caméras son soutien à Liglass Trading dans le cadre du contrat kirghize :« Je ne suis pas sûr que ce soit mon rôle d’enquêter sur chaque entreprise qui souhaite travailler à l’étranger. J’ai consulté les documents du ministère de l’Industrie, j’ai vérifié si l’entreprise était solvable ou si ces dirigeants étaient poursuivis… Le ministère m’a confirmé que tout était en ordre, et donc j’ai soutenu cette entreprise comme j’aurais pu en soutenir une autre. »
Les vérifications opérées par Vratislav Mynář ont visiblement été peu poussées puisque l’entreprise n’embauchait officiellement que deux personnes en 2016 et signalait des pertes à hauteurs d’un million de couronnes.La semaine dernière, le gouvernement kirghize a en conséquence officiellement annoncé qu’elle renonçait au contrat avec Liglass Trading. De son côté, Michael Smelik, manager de Liglass Trading, a dénoncé « l’acharnement médiatique » dont aurait été victime sa mystérieuse entreprise…