Le flou persiste sur l’état de santé du président Zeman
Hospitalisé depuis dimanche dernier à l’hôpital central militaire de Prague, le président Zeman a pourtant réussi depuis à nommer le président d’un tribunal régional et à convoquer la session inaugurale de la nouvelle Chambre des députés au 8 novembre. Ce regain d’activités pour une personne en soins intensifs et qui a été emmenée à demi-consciente en ambulance, couplé au quasi black-out informationnel venant de son entourage le plus proche ne cesse d’interroger en Tchéquie.
C’est justement pour demander davantage de transparence que quelque 200 personnes se sont rassemblées, samedi en fin d’après-midi, devant le Château de Prague, de même qu’une dizaine de personnes, dimanche, devant le bâtiment de l’hôpital central militaire de Prague, où Miloš Zeman est pris en charge depuis une semaine maintenant. Ce manque de transparence, ils l’attribuent essentiellement à l’entourage du chef de l’Etat, son chef de cabinet Vratislav Mynář, son proche conseiller Martin Nejedlý et son porte-parole Jiří Ovčáček, auxquels ils reprochent d’utiliser l’état de santé du président tchèque à leurs propres fins.
Déjà à la mi-septembre, ce dernier, qui souffre officiellement de neuropathie diabétique, avait été hospitalisé pour « déshydratation et un léger épuisement ». Là aussi, la presse tchèque s’était déjà beaucoup interrogée sur les raisons réelles de cette hospitalisation, et celle qui a suivi quelques semaines plus tard ne fait que renforcer les doutes sur les capacités réelles du chef de l’Etat à exercer ses fonctions. L’exercice de deux de ses prérogatives présidentielles, la nomination d’un juge et la convocation de la chambre des députés, au cours de la semaine écoulée, génère de nombreuses questions, certains soupçonnant des manœuvres de son proche entourage.
A la fin de la semaine dernière, des membres de l’opposition ont d’ailleurs déposé plainte, estimant qu’il existait « des soupçons sur l’authenticité de la signature » apposée sur le document de convocation du Parlement. Celui-ci avait été présenté à la presse quelques heures plus tôt par le président sortant de la Chambre basse, Radek Vondráček (ANO), au sortir d’une visite au chevet du chef de l’Etat dont il assurait qu’il « racontait des blagues » en citant du Machiavel en allemand.
Quelques heures plus tard, pour rajouter à la confusion générale, la direction de l’hôpital central militaire assurait n’avoir jamais donné son feu vert à une telle visite. Depuis, la police tchèque a d’ailleurs fait savoir que le service de sécurité rapproché de Miloš Zeman n’autoriserait plus aucune visite « sans l’accord préalable de son médecin traitant » et a également réfuté avoir accompagné Radek Vondráček au service de réanimation, contrairement à ce qu’affirmait ce dernier. Bref, on le voit la situation est loin d’être claire.
Plusieurs titres de la presse tchèque ont tenté d’en savoir davantage sur le diagnostic médical du président Zeman. Comme le rapportait ce week-end l’hebdomadaire Respekt, l’ancien président Václav Klaus qui connaît bien son successeur et a été pris en charge dans le même hôpital il y a quelque temps, a décrit la maladie de M. Zeman comme « un problème de foie », lié à ses années de consommation excessive d'alcool et à une mauvaise hygiène de vie dont le président s'est toujours enorgueilli.
Radiožurnál et le quotidien Deník N ont rapporté que le chef de l’Etat souffrirait d’une accumulation d'eau dans sa cavité abdominale, appelée ascite, qui peut être liée à une cirrhose. Ce même quotidien a également indiqué que M. Zeman souffrait d'une encéphalopathie hépatique, qui se manifeste par divers troubles psychologiques et neurologiques et est causée par une insuffisance hépatique. Plusieurs personnes de l’entourage du président ont témoigné, sous couvert d’anonymat, du fait que le chef de l’Etat alternerait des phases conscientes et des moments de confusion et de désorientation.
En l’absence de réponses de l’entourage de Miloš Zeman sur son état de santé, le Sénat tchèque s’est résolu à demander officiellement un rapport à l’hôpital militaire de Prague, afin de déterminer si le chef de l’Etat est à même d’exercer ses fonctions. Ce lundi matin, le président du Sénat a accusé réception de ce rapport dont certains éléments pourraient être rendus publics d'ici lundi soir. L’enjeu est important puisqu’il revient au chef de l’Etat de confier au vainqueur des élections de former un gouvernement. L’éventuelle impossibilité physique du président à exercer ses compétences pourrait conduire au déclenchement de l’article 66 de la Constitution qui permettrait leur transfert aux présidents des deux chambres du Parlement.