Union bancaire : la République tchèque menace de poser son veto

José Manuel Barroso et Herman Van Rompuy, photo: CTK

Les dirigeants européens se retrouvent ce jeudi à Bruxelles pour un sommet de deux jours qui est censé réfléchir à l’avenir de l’union économique et monétaire. En jeu notamment, le projet d’Union bancaire présenté en septembre qui doit être voté en décembre. Mais côté tchèque, on voit cette ambition de supervision des banques d’un très mauvais œil.

José Manuel Barroso et Herman Van Rompuy,  photo: CTK
La crise grecque, l’aide à l’Espagne, tels sont certaines des thèmes « chauds » du sommet de l’Union européenne qui s’ouvre ce jeudi en fin de journée à Bruxelles. Mais pas tant que le projet d’Union bancaire présenté en septembre par José Manuel Barroso. Ce projet, qui prévoit la supervision unique de toutes les banques de l’Union européenne, est considéré comme un chantier clé pour résoudre la crise des dettes en Europe. A Paris, on pousse à agir « le plus vite possible ». A Berlin, on prône la tactique du pas à pas. A quelques heures du début du sommet, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’union est loin d’être de mise au sein des Vingt-Sept.

Petr Nečas,  photo: CTK
Et mercredi, le Premier ministre tchèque Petr Nečas a menacé de bloquer la mise en place de la supervision bancaire, épinglant notamment les parties du projet qui risquent selon lui de porter atteinte à la stabilité du marché bancaire tchèque. Pour lui, la proposition telle qu’elle est présentée aujourd’hui comporte de nombreuses failles :

« Si les points problématiques ne sont pas réglés et que n’est pas garantie la stabilité du secteur financier tchèque, je suis prêt, avec l’accord du gouvernement, à bloquer ce projet. »

Pour appuyer son propos, le Premier ministre tchèque explique que les sociétés-mères de banques étrangères contrôlent 95% du marché local, et que cette situation invite à la prudence. Pour lui, pas question de mutualiser la dette. Jan Macháček, commentateur à l’hebdomadaire Respekt, estime qu’il ne faut pas voir les choses aussi dramatiquement :

« Il s’agit de craintes de la perte de notre influence sur la supervision de nos banques. Mais ces craintes sont également dues au fait que le projet a été conçu très rapidement, qu’il pourrait menacer la stabilité des banques tchèques qui sont très fortes en termes de capital et de dépôts, mais sont détenues par de grands acteurs bancaires de l’ouest. Donc la Banque centrale tchèque a peut-être peur que le projet ouvre la voie à des transferts importants depuis les banques tchèques vers leurs maisons-mères. Mais selon moi, c’est tout-à-fait contrôlable dans le cadre de l’Union européenne. »

La République tchèque, membre de l’Union européenne depuis 2004, reste peu enthousiaste à l’idée d’entrer dans la zone euro. Le Premier ministre a rappelé à plusieurs reprises qu'aucune date ne serait fixée avant l'expiration du mandat de son gouvernement en 2014. Prague n'adoptera pas l'euro avant huit ou dix ans, a-t-il souligné plusieurs fois. Pour certains acteurs économiques tchèques, l’Union bancaire n’est pas non plus une option : l’Association des exportateurs tchèques craint en effet que la plupart des sociétés locales orientées vers l'exportation soit « directement menacée ». Mais pour le journaliste Jan Macháček, la République tchèque n’a pas à menacer inutilement Bruxelles.

Photo: Commission européenne
« Il y a deux niveaux de lecture. Le premier, c’est que la République tchèque ne faisant pas partie de la zone euro, est-il nécessaire que nous fassions partie de cette supervision bancaire centralisée. Je pense que c’est vraiment un sujet de débat. Mais d’un autre côté, je ne vois aucune raison de poser notre veto et d’empêcher les autres de trouver un terrain d’entente. Si les autres veulent cette supervision, à eux de s’entendre. La zone euro a besoin de plus d’intégration et d’éléments de supervision bancaire commune. Donc si la République tchèque ne veut pas en faire partie et a les arguments pour, qu’elle s’abstienne, mais je ne vois pas pourquoi elle devrait mettre des bâtons dans les roues des autres. »

Ce sommet n’est qu’une première étape avant un vote, en décembre prochain, pour une mise en application du projet d’Union bancaire prévu pour janvier 2013.