Vaclav Klaus à Aix-en-Provence: oui à l'Europe des échanges et de la diversité, scepticisme à l'égard des "européistes"
Le futur de l'Europe : harmonisation ou concurrence ? Tel a été le thème de l'Université d'été de la nouvelle économie qui s'est déroulée, de dimanche à ce mercredi, sur le sol de l'Université Paul Cézanne, à Aix-en-Provence. Parmi les invités - le président de la République tchèque. Pourquoi Vaclav Klaus? Une question pour Jacques Garello, professeur émérite de l'Université et l'un des artisans du renouveau de la pensée libérale française.
«Sa position nous écarte du politiquement correct, nous savons que la volonté de la plupart des chefs d'Etat de l'Europe est de construire un nouvel ensemble politique et institutionnel et de doter l'Europe d'un pouvoir interne aussi bien qu'international. La position du président Klaus nous paraît beaucoup plus proche de ce que les libéraux français et du monde entier souhaitent, c'est-à-dire non plus une Europe pouvoir, mais une Europe espace. Un espace de libre circulation et je pense que les populations sont davantage en harmonie avec le président Klaus qu'avec les hommes de gouvernement qui, eux, ne regardent que l'intérêt de la classe politique... Vaclav Klaus a défini certain nombre de points qui montrent que, finalement, l'Europe envisagée à travers le projet de Constitution européenne de M. Giscard d'Estaing est une Europe dirigiste qui refuse le marché ou qui prétend le régler... Nous pensons que l'évolution de la société doit se faire spontanément. Ce que le président Klaus souhaite, c'est une Europe du marché, c'est une Europe du respect des droits individuels et des peuples, c'est une Europe qui accepte la diversité. Au fond, si vous voulez, le conflit est entre le nivellement que les européistes appellent harmonisation, mais qui est en fait un nivellement qui écrase toutes les cultures et toutes les différences, et d'un autre côté, une Europe de la diversité. »
Le discours de Vaclav Klaus est généralement considéré comme un discours eurosceptique. Est-ce juste ?
« Non, c'est injuste. Et c'est d'ailleurs le premier point qu'il a souligné, parce que moi-même j'avais l'imprudence d'appeler son exposé « Euroscepticisme contre européisme ». Et il a dit : je ne suis absolument pas d'accord qu'on me présente comme eurosceptique, car moi, je crois en l'Europe. Je pense que l'Europe est une réalité, culturelle, historique, humaine, sociale et que les Européens ont beaucoup à apprendre de ce qu'ils ont en commun et que l'Europe est un véhicule du changement... L'Europe, c'est un grand espoir. Donc Vaclav Klaus n'est pas du tout sceptique à l'égard de l'Europe. Il est sceptique à l'égard des européistes, c'est-à-dire de ceux qui veulent faire de l'Europe la reproduction précise de ce que sont les Etats nationaux, avec la centralisation, avec la bureaucratie... cette Europe, il n'en veut pas. Scepticisme à l'égard de l'eurotechnocratie sans doute, mais sûrement pas scepticisme à l'égard de l'Europe ».Le refus de l'approfondissement de l'intégration européenne ne risque-t-il pas, d'après vous, de réveiller les démons nationalistes, en Europe centrale ?
« Les démons nationalistes se réveillent en Europe centrale, c'est incontestable. Mais je pense que cela n'a rien à voir avec la construction européenne, ça a à voir précisément avec le choc créé par la mise en contact de certains peuples et de certaines catégories de gens avec la réalité de l'ouverture et de la mondialisation. Ces gens-là se réfugient dans un passé qui est à jamais révolu, ce sont des nostalgiques de la centralisation, du plan, rien d'étonnant à ce que le nationalisme s'associe très souvent à l'extrême gauche, au communisme voire même au socialisme. Au fond, tous ces gens avaient été déçus de la chute du Mur de Berlin. La réponse au nationalisme n'est pas le supranationalisme européen. La réponse au nationalisme, c'est l'ouverture, c'est l'échange. C'est l'esprit de compréhension et de respect des autres qui naît de la pratique du commerce, qui naît de la possibilité de voir la différence ».