Zdenka Braunerová, guide de Paul Claudel en Bohême
Vendredi, le centre tchèque de Paris accueillait la première partie d’un grand colloque intitulé Dissonances et accord, Paul Claudel et la Bohême, événement qui se poursuit ce lundi à Prague, au cloître Emmaüs. L’auteur du Soulier de Satin est en effet très lié aux pays tchèques, puisqu’il fut consul à Prague entre 1909 et 1911. Une Bohême qu’il découvre avant tout grâce à la peintre Zdenka Braunerová. Brigitte Brauner est française, et depuis quelques années s’intéresse passionnément à l’histoire de la famille de son mari, Vladimir Brauner, petit neveu de Zdenka. Elle précise quel a été le rôle de Zdenka Braunerová dans l’accueil de Paul Claudel à Prague.
« Elle remplit sa fonction avec bonheur, naturel et elle accueille d’abord Claudel en tant qu’intendante déléguée. C’est elle qui va l’aider à s’installer. Elle lui trouve un appartement ; c’est d’autant plus important qu’il attend son troisième enfant. La petite Reine Claudel, dont Zdenka sera la marraine, naît le 9 février 1910 à cette première adresse, au quai Rieger. Claudel fréquente assidûment Braunerova qui lui ouvre les portes et le met en contact avec Milos Marten qui a été son premier traducteur. A trois, ils vont former une sorte de trio qui va se renforcer, où ils se retrouvent sur le terrain intellectuel, le goût pour les arts, la littérature, le catholicisme fervent. Claudel est évidemment le catholique converti que vous savez, à Notre Dame, en 1987. Zdenka est une fervente catholique. De cette aide matérielle qu’elle a apporté à la famille Claudel s’est cimenté une amitié. Elle guide Claudel en Bohême, pas seulement à Prague. Elle l’aide à faire connaissance avec tout ce que Prague possède de trésors profonds, tout le baroque va lui être ouvert... Il n’a pas besoin d’elle pour tout, mais en tout cas, elle a été aussi une passeuse. »
Mais Zdenka Braunerová n’a pas été que la guide privilégiée de Paul Claudel à Prague. Il fera appel à elle pour illustrer ses ouvrages :
« Et puis, interviennent un petit peu plus tard les demandes de Claudel pour sa fonction d’illustratrice de ces livres, mais aussi comme décoratrice puisqu’elle s’occupera des décors de l’Annonce faite à Marie, donnée au début de 1914. Entre le départ de Claudel qui se fait le 25 septembre 1911 et son séjour à Francfort et Hambourg, il lui demandera une dizaine d’ex-libris. Zdenka a donc trois rôles : accueillir, aider à l’installation, veiller au bien-être de la famille Claudel ou à la protection de l’appartement car le séjour de Claudel a été émaillé d’aller-retours avec la France. Je crois qu’il y a vraiment une très belle amitié qui s’est tissée, malgré la brièveté de son séjour. Il est surprenant de voir que la correspondance s’éteint au moment de la guerre de 1914, qu’apparemment rien ne se passe jusqu’en 1933. En 1933, il y a une lettre superbe qui illustre toutes les qualités et tous les travers de cette femme. Elle écrit à Claudel pour lui demander de venir à un congrès de Jésuites à Prague. Elle lui envoie une lettre enflammée où elle lui fait part de son ardent désir de voir ce pays rester catholique. Pour elle il est important que le cœur de l’Europe reste catholique. Je trouve que c’est une lettre d’autant plus extraordinaire que c’est la dernière qu’elle lui enverra et qu’elle meurt très peu de temps après, en 1934. »
Retrouvez Brigitte Brauner dans Culture sans frontières ce week-end.