45 ans plus tard, des manifestants pour la liberté ont été de nouveau arrêtés à Moscou
Ce dimanche, la police russe a arrêté dix personnes venues commémorer sur la place Rouge l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte de Varsovie en 1968. Une information que la Radio tchèque (Český rozhlas) a relayé malgré le silence des autorités russes. Plus qu’un simple fait divers, c’est bien de l’attitude de ces dernières face à la mémoire de l’occupation de la Tchécoslovaquie qui est en jeu.
Quarante-cinq ans plus tard, dix citoyens russes se sont réunis sur cette même place au centre de la capitale russe pour se souvenir de l’acte de ces huit personnes. Parmi eux se trouvait le cousin de Vadim Delone. Poète et dissident, ce dernier avait participé à l’action de 1968. La poète et traductrice Natalija Gorbaněvská, déjà présente le 25 août 1968, participait également à cette manifestation.
La traductrice et spécialiste des études slaves, Nina Falkovská, était sur place au moment du rassemblement. Contactée par la radio tchèque alors qu’elle se trouvait au poste de police à Moscou, elle explique les motivations de cette action :
« Nous sommes là pour commémorer l’évènement. Nous diffusons une affiche pour votre et notre liberté. »
Ce rassemblement n’avait pas été annoncé, puisque normalement aucun rassemblement n’est possible sur la place Rouge. Après avoir déployé une affiche « Pour votre et notre liberté », les manifestants n’ont pu passer que quelques minutes sur la place avant d’être arrêtés. Les huit participants sont ainsi assignés à comparaître le 29 août prochain pour violation de la loi sur les rassemblements publics. Ils risquent cette fois une amende de 20 000 couronnes (800 euros).Nina Falkovská assure pourtant que ce rassemblement n’avait pas de visée politique :
« Quand les policiers sont venus, nous leur avons expliqué que ce n’était pas une action politique contre quelque chose, mais que nous voulions commémorer l’anniversaire du jour où des citoyens conscients se sont opposés à l’invasion de la Tchécoslovaquie. »
Les réactions tchèques ne se sont pas fait attendre et la question est de savoir si ces arrestations signifient une remise en cause de la politique russe vis-à-vis de la mémoire de l’occupation de la Tchécoslovaquie. La Fédération de Russie, en tant qu’Etat successeur de l’Union soviétique avait pourtant présenté des excuses officielles au début des années 90.
Pour Miroslava Němcova, leader du parti civique-démocrate (ODS) et présidente de la Chambre des députés, ces arrestations ont bien une portée politique :« Je ne peux l’expliquer que comme une défense a posteriori de l’occupation de la Tchécoslovaquie par le pouvoir actuel en Russie. »
Les cadres dirigeants du Parti communiste de Bohême-Moravie ont également condamné cette procédure policière et espèrent que la politique officielle de reconnaissance de la faute soviétique est toujours valable.
Le souvenir de l’invasion et de l’occupation de la Tchécoslovaquie reste bel et bien vivant et source de polémiques, comme le prouve l’action d’artistes anonymes bulgares qui ont peint en rose, dans la nuit de mardi à mercredi dernier, un monument dédié aux soldats soviétiques au cœur de la capitale Sofia, et ont inscrit ces mots en tchèque et en bulgare : « la Bulgarie s’excuse ».