A Dijon, la riche tradition des relations franco-tchèques doit servir aussi les échanges économiques
Une journée spéciale s’est tenue à Dijon jeudi dernier. Une « Journée tchèque » était organisée pour célébrer le 95e anniversaire de l’ouverture de la section tchèque au Lycée Carnot, la plus ancienne des trois sections tchèques existant ou ayant existé en France. Un programme culturel mais aussi économique avait été concocté avec pour objectif que la tradition des échanges scolaires franco-tchèques dans la capitale de la Bourgogne puisse servir également au développement des échanges entre les entreprises des deux pays.
Si les Dijonnais, comme l’affirme Marie Chatardová, l’ambassadrice de la République tchèque en France, comprennent effectivement l’humour tchèque, leur ville peut donc bien se targuer d’être la ville la plus tchèque de France, comme cela était inscrit en grand sur le bulletin d’invitation à ces rencontres franco-tchèques.
Etudiant actuellement au campus européen de Sciences Po à Dijon, et traducteur lors de cette journée d’échanges culturels et économiques, Jan Svoboda confirme qu’en tant que Tchèque, il n’est pas totalement dépaysé dans la cité bourguignonne :
« C’est drôle, un peu bizarre même. Mais avec la section tchèque au Lycée Carnot, il m’arrive parfois de rencontrer d’autres Tchèques dans la rue quand je vais faire des courses ou chercher du pain. Et c’est la même chose avec M. Macek, qui est notre directeur à Sciences Po. C’est quand même appréciable d’être dans une grande école en France et de pouvoir parler tchèque. Sans oublier que nous sommes douze Tchèques à Sciences Po ici. Donc, oui, j’ai pas mal d’amis tchèques, et c’est bien ça : Dijon est la ville la plus tchèque en France ! »
Politologue et directeur de l’antenne européenne de Sciences Po à Dijon depuis quelques années déjà, Lukáš Macek est un des plus beaux exemples, ou à tout le moins un des plus visibles, de la réussite des échanges franco-tchèques à Dijon :
« J’ai d’abord passé quatre premières années absolument formidables et cruciales à Dijon entre mes 16 et 20 ans, soit une période assez importante dans la vie d’une personne. Et très franchement, quand j’ai quitté la ville, je ne pensais pas y revenir un jour autrement qu’en touriste nostalgique. Et certainement pas pour y travailler. J’ai alors continué mes études à Paris, puis je suis rentré en République tchèque, où je pensais rester. Mais voilà… Le destin a fait que, à un moment donné, j’ai eu l’opportunité de venir travailler à Sciences Po, qui a été un autre endroit important pour mon évolution dans ma jeunesse. Sciences Po venait de s’installer à Dijon, et c’est ainsi que j’ai pu revenir à la fois à Sciences Po et à Dijon pour y exercer les fonctions qui sont les miennes depuis une dizaine d’années.La journée de jeudi dernier ne devait toutefois pas seulement servir à confirmer la présence tchèque à Dijon. Elles comportaient également un volet économique avec des rencontres entre sociétés françaises et tchèques à la Chambre de commerce et d’industrie Côte-d’Or, comme le précise Philippe Barbe, consul honoraire de la République tchèque pour la zone Bourgogne - Franche-Comté :
« On a atteint l’objectif qui était d’avoir des deux côtés des sociétés et des clusters notamment dans le domaine de l’énergie qui se rencontrent. Certaines demandes concrètes ont été formulées. Par exemple, le cluster des industries mécaniques tchèques a souhaité rencontré des entreprises françaises, ce qui devrait déboucher sur la visite du pôle nucléaire. C’est donc un gage de bonne coopération. La République tchèque réalise une part importante de son PIB dans l’industrie mécanique. C’est important pour la région Bourgogne – Franche-Comté, qui possède un pôle de compétitivité d’industrie nucléaire. Les Tchèques sont à la pointe sur le sujet, et les discussions aujourd’hui nous ont permis de nous apercevoir qu’il existait déjà des ponts entre deux pays qui coopèrent, mais qui pourraient travailler encore plus ensemble. »Ce travail en commun, quel que soit le domaine d’activité, c’est précisément ce à quoi tendent les élites tchèques et françaises depuis l’ouverture de la section tchécoslovaque au Lycée Carnot. Et si bien des choses se sont passées et ont changé depuis 1920, notamment dans la Tchécoslovaquie alors naissante qui a laissé place à une République tchèque qui se doit aujourd’hui de trouver une position et un rôle qui lui conviennent tout à fait dans l'Union européenne, l’idée originale est restée la même quatre-vingt-quinze ans plus tard, comme s’en réjouit madame l’ambassadrice :
« Nous nous appuyons évidemment sur la tradition des relations. Mais la tradition constitue un bon point de départ. Même si c’est important, on ne peut pas vivre et se reposer que sur la tradition. Ce qui me fait plaisir, c’est que lorsque nous avons sollicité la Chambre de commerce à Dijon pour leur annoncer cette journée économique, notre démarche a été accueillie très favorablement. Leur esprit a été très ouvert dès le début. Leur message a été de nous dire ‘nous, les entreprises françaises, nous voulons absolument coopérer avec vos entreprises. Nous ne les considérons pas des concurrents, mais comme une chance pour un développement mutuel’. »