A Prague aussi la France prépare la conférence de Paris sur le climat
A la fin de cette année 2015, la ville de Paris accueille la COP 21, la 21e Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Sous ce nom quelque peu barbare se cache une négociation essentielle entre les pays du monde pour parvenir à un accord contraignant pour lutter contre le dérèglement climatique. Le réseau diplomatique français s’active pour communiquer sur cette rencontre aux enjeux fondamentaux, des enjeux qu’a évoqués au micro de Radio Prague l’ambassadeur de France en République tchèque Jean-Pierre Asvazadourian, en marge d’une conférence de presse organisée à l’ambassade sur le sujet :
Qu’est-ce qui va se jouer à la Conférence de Paris ?
« Il s’agit de se donner un but et ce but, c’est la limitation des émissions de gaz à effet de serre,c/lidi/f/asvazadourian_jean_pierre en particulier les émissions de gaz carbonique. L’idée est de contenir le réchauffement global à 2 °C, par rapport à l’ère préindustriel, à la fin de ce siècle. Cela paraît très abstrait mais en fait 2 °C, c’est déjà beaucoup. Il suffit de penser par exemple que 5 °C ou 6 °C seulement séparent notre époque de l’ère glaciaire. Cela montre à quel point chaque évolution de la température peut perturber ou changer profondément le climat. Ce qu’il faut souligner surtout, c’est que ces évolutions climatiques, ces désordres climatiques, sont le résultat de l’activité humaine. Donc l’objectif, c’est de limiter les émissions pour ne pas dépasser les 2 °C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle. »Comment faire pour limiter ces émissions ?
« C’est là le cœur de la négociation, de savoir comment des pays qui ont des activités économiques extrêmement différentes, certains étant des pays industriels, des pays développés, d’autres étant des pays en voie de développement, peuvent s’engager sur cet objectif. Plusieurs éléments doivent être pris en compte. Bien évidemment, les pays les plus développés, ceux qui contribuent le plus aux émissions de gaz à effet de serre, doivent avoir un rôle tout particulier. Je pense aussi au rôle que l’Union européenne se donne, par les engagements qu’elle a déjà pris avec le paquet énergie-climat, cette volonté de limiter ses émissions de façon très significative. Je crois qu’il y a aussi un élément d’exemple nécessaire de la part de l’Union européenne.
Et puis il y a un élément développement. Parce que bien évidemment, il y a des pays auxquels il est difficile de demander des efforts qui peuvent avoir un impact sur leur développement, alors qu’ils n’ont pas contribué par leur activité économique aux émissions. Si on veut convaincre ces Etats, qui souvent sont les plus pauvres et les victimes eux-mêmes des désordres climatiques, il faut dire qu’on va mettre en place des mécanismes qui vont leur permettre d’accéder à des technologies qui leur permettront de poursuivre leur développement, dans le cadre du développement durable. Il y a donc vraiment un élément de solidarité qui est très fort dans cette négociation.
Donc beaucoup de paramètres, beaucoup d’éléments. Le rôle des 195 Etats parties à cette conférence va être essentiel mais ce qui va aussi être essentiel, c’est la contribution de la société civile, en particulier des entreprises. Parce que ce sont elles qui ont des industries, ce sont elles qui développent des processus et nous comptons beaucoup sur le développement de nouvelles technologies, de l’innovation technologique et scientifique qui peut nous aider à franchir ce pas de la transition énergique. »Comment percevez-vous le débat public en République tchèque sur la question environnementale, sur la question du changement climatique ?
« Je crois que l’opinion publique perçoit très bien les enjeux du changement climatique. Grâce aux médias, on sait parfaitement ce qui se passe dans le monde, que des phénomènes extrêmes qui n’existaient pas se multiplient à une fréquence qui est beaucoup plus grande. Donc je crois que l’opinion publique est sensibilisée à ces questions et je suis persuadé que, plus on va arriver vers la fin de l’année, vers le moment où la négociation va prendre sa dynamique fondamentale, plus les opinions publiques seront derrière les gouvernements pour que cette prise de conscience se fasse.
J’ai connu la Tchécoslovaquie dans un premier poste diplomatique juste après la Révolution de velours. Je me souviens parfaitement des défis environnementaux, de l’inquiétude des gens sur certaines questions. Je vois les énormes progrès qui ont été faits. Ces progrès ont été faits grâce au développement de ces économies mais aussi grâce à la prise de conscience des uns et des autres de protéger notre environnement. »
L’ambassade de France en République tchèque a organisé une conférence de presse sur la conférence sur le climat à Paris. Quel rôle peut jouer la diplomatie française à l’approche de cette conférence ?
« D’abord, la France, en tant que pays hôte, se doit de créer les conditions pour que la négociation se déroule dans de bonnes conditions. C’est une négociation complexe à 195. La France est seulement l’hôte de cette conférence et elle souhaite faire le maximum pour créer les conditions d’un consensus. Elle-même fait son propre travail pour atteindre les objectifs qu’elle se fixe, des objectifs de réduction importante de ses émissions.Ce terme de croissance verte représente quelque chose. On est peut-être à la veille d’évolutions technologiques qui vont transformer le monde de demain. Il faut avoir cette foi de penser que les entreprises sont capables d’inventer de nouvelles technologies qui vont nous faire entrer dans un monde différent. On le voit d’ailleurs, il y a beaucoup d’exemples. C’est pour cela d’ailleurs qu’à Paris, de vastes espaces seront ouverts aux entreprises pour qu’elles viennent présenter des solutions. Il s’agit de l’Agenda des solutions.
Ce qu’on souhaite faire ici, comme dans toutes les ambassades de France dans le monde, c’est tout le réseau diplomatique qui est mobilisé, c’est d’échanger avec nos partenaires, de contribuer à la mobilisation des médias, des associations, des villes, des communes, de tous les acteurs de cette conférence. »
Il y aura par exemple une exposition à l’Institut français de Prague. Il est question également d’une rencontre à la Chambre des députés en juin. Pouvez-vous nous en dire plus ?
« Les thématiques de la COP 21, de la conférence climatique, intéressent beaucoup de monde dans ce pays. On a souhaité pouvoir partager dans différents cadres. L’Institut français a aussi cette vocation d’être très ouvert vers un public très large. C’est donc un vecteur de diffusion d’informations, pas uniquement sur la conférence mais plus généralement sur le climat avec la projection de films, de documentaires, qui permettent de comprendre quels sont les enjeux, avec des expositions aussi. Dans le cadre de la Semaine française, un événement qui va regrouper une quarantaine, une cinquantaine de différentes manifestations entre fin mai et début juin, on fera la part belle à l’environnement, parce que je crois que c’est une thématique qui intéresse tout le monde.Par ailleurs, nous organiserons avec la Chambre des députés, avec aussi le bureau de l’ONU qui est ici à Prague, une conférence qui permettra aussi d’échanger des idées avec des représentants des autorités, mais aussi avec des entreprises qui viennent avec leurs projets, des collectivités locales et des membres de l’équipe française qui viendront donner leur sentiment sur l’évolution de cette négociation. L’idée, c’est l’échange avec des acteurs très divers.
Et puis toucher les jeunes est un élément essentiel, d’où une conférence organisée au mois d’octobre à la VŠE (Ecole supérieure d’économie) sur la thématique « Climat et économie ». On voit bien que c’est le cœur aussi de la question et du débat sur la COP 21. L’idée est d’être très ouvert vers des publics très variés, depuis le grand public, des étudiants, et puis aussi des acteurs institutionnels. »