A Prague, les Barbarians ont œuvré au développement du rugby tchèque
Le rugby tchèque a mis les petits plats dans les grands pour célébrer le 90e anniversaire de la fondation de sa fédération. Son équipe nationale recevait en effet les légendaires Barbarians britanniques mardi soir à Prague pour un match de gala sans précédent dans l’histoire de la Reprezentace. Et malgré la défaite sans appel (0-71), l’objectif a été atteint : faire la promotion d’un sport, le rugby, qui, s’il reste encore très largement mineur, séduit néanmoins de plus en plus de Tchèques. Reportage.
Lukáš Rapant : « Pour la République tchèque, c’était un gros match. Dans notre carrière, personne n’a jamais joué un tel match, pas même les mecs qui sont depuis dix ans en équipe nationale. Cela permet aussi aux jeunes de voir tout le boulot qu’ils ont encore devant eux. C’était un super match ! »
L’émotion était presque palpable mardi soir dans les couloirs des vestiaires du petit stade de Markéta. La République tchèque ne participera très probablement jamais à la Coupe du monde de rugby. Alors, du capitaine Robert Volves au pilier Lukáš Rapant, tous ses joueurs étaient unanimes pour confirmer que ce match contre les Barbarians constituait un moment très particulier dans leur carrière. Et peu importe le score final, là n’était pas l’essentiel, comme l’assurait leur entraîneur Tomasz Putra :« Après le match, j’ai d’abord demandé aux joueurs s’ils avaient pris du plaisir et ils m’ont tous répondu que c’était le meilleur souvenir de leur vie. Ils étaient dans cet état d’esprit-là : conscients que pouvoir affronter quelques-uns des meilleurs joueurs au monde est quelque chose de fabuleux. »
Chose rare en République tchèque : le match, disputé devant plus de 7 000 personnes et dans un stade à guichets fermés, a été retransmis en direct par la Télévision tchèque. Et à en croire Julien et Benjamin, deux Français amateurs de rugby qui travaillent actuellement à Prague, le déplacement, malgré le froid et l’absence de suspense, valait vraiment le coup :
« Les Tchèques se sont bien défendus. Bon, j’aurais bien aimé qu’ils marquent quand même un essai… Mais ils ont eu des problèmes en attaque. Ils ont eu beaucoup de mal à percer la ligne défensive des Barbarians et ont fait beaucoup de fautes de main. Cela leur a coûté beaucoup d’essais et explique la différence de soixante-dix points. Cela n’enlève rien à l’ambiance, qui est très agréable. C’est familial et très différent de ce que l’on connaît dans nos grands stades en France ou en Angleterre à Twickenham, où j’avais l’habitude d’aller. Ici, on se sent bien et on peut communiquer avec les gens. »Samedi dernier, c’est dans un tout autre cadre, à Wembley, et contre un adversaire autrement plus prestigieux, les Springboks sud-africains, que les Barbarians évoluaient. Pour autant, le fait de se retrouver à Prague trois jours plus tard, dans la capitale d’un petit pays que peu de leurs joueurs, pour la plupart issus de l’hémisphère sud, connaissaient avant d’y mettre leurs crampons, ne les a pas dépaysés. Mieux même, Robbie Deans, le coach néo-zélandais des « Baa-Baas », assurait que eux aussi avaient pris un intense plaisir, et ce même si les raisons n’étaient pas les mêmes que pour leurs adversaires tchèques :
« C’était très bien pour tout le monde. Pour nous comme pour la République tchèque. Les Tchèques ont joué avec beaucoup de fierté de la première à la dernière minute. L’esprit du rugby est ici très bon. Pour nous, il était bien de découvrir un nouveau pays et une nouvelle culture grâce au rugby. Nous avons trouvé un état d’esprit qui est le même que chez moi en Nouvelle-Zélande. Nous avons eu un entraînement remarquable avec les enfants la veille du match. Leur enthousiasme était fantastique, et c’est exactement pour ça aussi qu’existent les Barbarians. C’est un club qui sert à la promotion du rugby dans le monde, pour promouvoir un ‘meaning’ - un état d’esprit et toutes les valeurs qui font le rugby. »Probablement meilleur joueur de l’histoire du rugby tchèque, ancien troisième ligne de Montferrand avec lequel il a disputé une finale du championnat de France, Jan Macháček est désormais entraîneur et formateur à Prague. Et lundi matin, il était ravi de la disponibilité et de l’enthousiasme manifestés par les joueurs et l’encadrement des Barbarians lors de l’entraînement avec des dizaines d’enfants :
« C’était prévu, mais je suis toujours surpris quand je vois des joueurs de leur niveau comment ils savent s’organiser et parler avec les jeunes et comment ils savent rester abordables et ouverts. »
Et à la vue des centaines d’enfants et de femmes présents dans les tribunes mardi soir, on se dit que le rugby pourrait bien avoir de l’avenir en République tchèque aussi.