A quand le premier partenariat enregistré ?
Nous revenons aujourd'hui sur une loi qui a animé les passions non seulement au Parlement mais aussi au sein de la société tchèque dans son ensemble, une loi qui a été adoptée de justesse la semaine dernière par les députés tchèques, qui sont ainsi passés outre le veto du président de la République. Un président qui la considérait comme « une erreur tragique ». Cette loi, c'est celle sur le partenariat enregistré pour les couples homosexuels.
Dimanche dernier, Pavel Vitek et Janis Sidovsky affichaient leur sourire sur la première page du quotidien Nedelni Svet. Ce chanteur et son manager, ensemble depuis huit ans, ne cachent pas la joie que leur a apporté le vote des députés le 15 mars dernier, un jour qui restera historique pour la communauté gay en RT. Et déjà, ils ont organisé la cérémonie qui suivra l'enregistrement de leur partenariat, au château de Karlstejn, où ils se sont déjà mis d'accord avec le chatelain.
Ce couple, comme beaucoup d'homosexuels en RT, n'y croyait plus. Après toutes les vicissitudes rencontrées par le projet de loi, depuis près d'une dizaine d'années, le veto présidentiel avait été le coup de massue. Pour Vaclav Klaus, ce partenariat est une « erreur tragique » et son adoption est « une défaite pour tous ceux qui croient que la famille est fondamentale, unique et sans rival dans notre société. » Pourtant, cette loi, même si elle satisfait la communauté homosexuelle et ses représentants est encore loin de ce qu'ils espéraient.
On écoute Tereza Kodickova, porte-parole de la Ligue gay et lesbienne : « Evidemment je suis satisfaite qu'une loi ait enfin été adoptée, mais personnellement je dois dire que je trouve le contenu de cette loi assez faible. La question est de savoir maintenant combien de couples vont vouloir conclure un tel partenariat dans ce contexte, parce que de facto ce que cela permet surtout de vivre légalement dans le même logement. Ce qui est important aussi c'est le lien juridique qu'il permet entre le partenaire et les enfants du deuxième partenaire, ce qui n'est pas l'adoption bien sûr mais qui était un point important pour beaucoup. Ensuite, il y a cette possibilité d'héritage et quelques avantages sociaux, mais de grands sujets importants comme les biens en commun et des retombées fiscales ont été laissés de côté. C'est pour ça que je suis curieuse de voir combien de personnes vont se décider à conclure ce partenariat enregistré pour couples homosexuels. »La précision « homosexuels » a son importance ; la loi voté la semaine dernière à la Chambre basse ne concerne en effet que les personnes de même sexe, contrairement à la loi française, par exemple, qui permet également aux couples hétérosexuels de conclure un PACS. Le texte de loi précise que des membres de la même famille, en première lignée en tout cas, ne peuvent conclure un partenariat.
La République tchèque est donc, avec la Slovénie, l'un des premiers pays post-communistes à adopter une telle législation sur le statut des couples homosexuels. Les lois hongroise et croate disposent quant à elles d'un partenariat ouvert également aux couples hétérosexuels. Mais, une semaine à peine après son adoption, la loi tchèque montrait déjà quelques imperfections.
« Des sanctions ne sont pas prévues pour les personnes qui conclueraient un deuxième ou plusieurs partenariats. C'est interdit, mais aucune sanction n'est prévue par la loi, ce qui selon moi n'est pas difficile à rectifier avec un amendement. »
Selon Tereza Kodickova, ces problèmes ne devraient cependant pas freiner l'entrée en vigueur de la loi et retarder le premier partenariat enregistré dans le pays. Mais il existe d'autres lacunes dans cette loi, dont une majeur : le problème du conflit d'intérêt n'est pas réglé par le texte. Cela signifie par exemple que le patrimoine du partenaire d'un homme politique ne tombera pas sous les mêmes règles que le patrimoine de l'épouse d'un homme politique.
Tereza Kodickova: « Evidemment nous connaissons l'existence de ce problème et nous espérons que le législateur va faire quelque chose très vite pour le résoudre, même si avec les élections qui approchent qui sait comment tout ça va finir ? On est un peu angoissés. Le chemin a été tellement sinueux jusqu'ici pour en arriver à l'adoption de ce texte que maintenant on ne se risque plus à faire le moindre pronostic sur comment cela va être résolu... »
Le partenariat enregistré a été adopté, ce qui constitue une révolution en soi dans la société tchèque, mais il semble bien que l'application du texte dans la pratique se heurte encore à quelques obstacles et qu'un peu de temps soit nécessaire avant que l'on célèbre la première union homosexuelle, à Karlstejn ou ailleurs en République tchèque.