Adoption des enfants par des parents homosexuels : un vide juridique temporaire ?

Photo: Archives de Radio Prague

Si la légalisation des mariages de personnes de même sexe se poursuit progressivement en Europe, notamment en France, en Grande-Bretagne ainsi que dans certains États des États-Unis, la question de l’adoption par les couples homosexuels fait toujours débat. En République tchèque, un tiers des Tchèques y semblent désormais favorables. Il s’agit d’un changement d’opinion assez considérable par rapport à l’année 2005, quand seulement un cinquième des personnes interrogées avaient répondu positivement.

Photo: Archives de Radio Prague
En 2005, 70% des personnes interrogées étaient défavorables à une éventuelle adoption d’un enfant par un couple homosexuelle. Actuellement, il ne s’agit plus que de 57%. C’est ce qu’a révélé mardi le Centre pour l’étude de l’opinion publique. Même si les opposants se font donc moins nombreux, et que « le partenariat enregistré », équivalent du Pacs en France, est entré en vigueur en 2006 en République tchèque, les situations diverses concernant les relations juridiques entre un enfant et un couple ou un parent homosexuel, n’ont néanmoins pas encore été élucidées. C’est au mois de mai qu’un collectif de députés s’est lancé dans la rédaction d’un amendement visant à légaliser l’adoption dans le cadre d’un couple de même sexe. Plus précisément, il s’agit du cas où un enfant, issu d’un précédent mariage ou d’une union hétérosexuelle, pourrait être adopté par le partenaire d’un de ses parents. Cette situation peut se produire par exemple lors du décès d’un parent de l’enfant, qui pourrait alors être adopté par le partenaire de ce parent décédé. Jana Černochová, députée du parti civique démocrate et partisan du projet de loi traitant de l’adoption d’enfants par des personnes homosexuelles, s’est exprimée sur ce vide juridique fin mai :

Jana Černochová | Photo: David Sedlecký,  Wikimedia Commons,  CC BY 3.0
« Ce projet de loi veut chercher une solution à une réalité qui existe déjà, en la transférant dans le droit commun, dans la législation en vigueur. Outre les obligations qui découlent juridiquement du « partenariat enregistré » (le PACS), le partenaire pacsé doit recevoir également des droits, dans le cas où il voudrait s’occuper de l’enfant biologique de son partenaire. Je pense que c’est tout à fait normal. Des pays tels que l’Allemagne ou l’Espagne, qui sont catholiques, ou la Grande Bretagne protestante, ont déjà cet ajustement juridique que nous voulons faire valoir, et personne ne semble étonné de cela. »

Pour Jiří Čuňek, sénateur chrétien-démocrate, ce projet de loi est inutile dans la mesure où la loi autoriserait déjà l’adoption d’enfants dans le cadre d’une famille monoparentale. Toujours selon lui, la volonté des parents serait favorisée au détriment de l’opinion de l’enfant.

Jiří Čunek,  photo: Jana Šustová,  ČRo
« Il est évident qu’il en va de l’intérêt de l’enfant d’être éduqué au sein d’une famille ‘complète’, c'est-à-dire dans le meilleur des cas dans le cadre d’un mariage, entre un homme et une femme, qui vont présenter à l’enfant ce qu’est une famille ‘normale’ par leur propre exemple. Une quelconque autre variante, que ce soit une femme ou un homme vivant seul ou autre, n’est que secondaire et n’intervient que dans le cas où le premier groupe ne pourra être en mesure d’adopter l’enfant. »

Jana Černochová est persuadée du contraire, en affirmant que les familles rassemblant des parents homosexuels sont bel et bien une réalité, et qu’il n’est pas possible de bafouer les droits de ces enfants, qui n’auraient juridiquement qu’un seul parent :

« Les enfants sont déjà éduqués au sein de ces familles de parents de même sexe, mais sans que le partenaire pacsé puisse revendiquer des droits sur l’enfant biologique de leur partenaire, ce qui est une mauvaise chose. [Il n’est pas possible de contourner leurs droits avec la législation actuelle.]Vous allez être peut-être étonné mais il y a beaucoup de familles dont les parents sont de même sexe et qui éduquent des enfants. Il s’agit donc surtout de parvenir à ce que ces enfants aient les mêmes droits que les enfants vivant avec des parents hétérosexuels. »

Jana Černochová nous explique le cheminement qu’aura cet amendement en vue de son éventuelle adoption :

« Etant donné que ce sujet est considérée par la société comme un sujet sérieux, alors je suppose qu’à la réunion de juin nous allons rassembler des signatures sous cet amendement, qui sera par la suite introduit dans le processus législatif normal. Ce sera bien évidemment dans le cas où la Chambre des députés ne rejette pas le projet dès la première lecture. Et c’est ce à quoi je crois profondément. »

Selon les premières rumeurs parlementaires, cet amendement ne sera très probablement pas approuvé par la Chambre des députés. Des allégations concernant ‘le fondement biologique du monde’ sont entendues à gauche comme à droite. Néanmoins, il est de plus en plus difficile d’ignorer la réalité, et il devient nécessaire d’agir en conséquence pour combler ce vide juridique, qui entrâine une inégalité des droits non seulement auprès des parents, mais aussi auprès des enfants.