Agroalimentaire : face à l’embargo russe, le ministre de l’Agriculture appelle à la solidarité nationale

Photo: Archives de Radio Prague

« Achetez et mangez tchèque » : tel est en somme le contenu de l’appel lancé, mercredi, par le ministre de l’Agriculture. Pour faire face aux complications générées par l’embargo décidé la semaine dernière par la Russie sur les denrées alimentaires en provenance de l’Union européenne, Marian Jurečka a recommandé à toutes les administrations publiques d’acheter des produits tchèques pour alimenter leurs cantines. Selon le ministre, il s’agit là d’une manière de soutenir les agriculteurs et autres professionnels tchèques du secteur agro-alimentaire.

Photo: Archives de Radio Prague
Les fonctionnaires et élèves des écoles publiques tchèques ne mangeront probablement pas plus de « knedlíky », la spécialité locale, à la rentrée en septembre, mais ils trouveront peut-être plus de viande, de produits laitiers et autres fruits et légumes tchèques dans leur assiette. C’est du moins ce qu’espère le ministre de l’Agriculture :

« Je suis persuadé que même à l’échelle européenne, nous parviendrons à trouver une solution dans les semaines à venir. Dans cette affaire, je m’efforce au moins d’appeler les Tchèques et les personnes responsables de l’achat des produits alimentaires pour le secteur public et de l’Etat à donner la priorité aux produits tchèques provenant de producteurs tchèques. »

Sur le réseau social twitter, Marian Jurečka a écrit que les gens « faisaient dans leur culotte » inutilement et redoutaient trop les retombées des sanctions qui restreignent les échanges avec la Russie. Un peu plus tard, il a précisé sa pensée pour la Radio tchèque :

Marian Jurečka,  phoro: Jiří Mastík,  ČRo
« Je suis bien entendu très attentivement l’évolution de la situation. J’ai été un des premiers à appeler mes homologues d’autres pays à convoquer un conseil européen des ministres de l’agriculture afin de trouver une solution. D’un autre côté, notre solde commercial des produits agroalimentaires est négatif de 23 milliards de couronnes (835 millions d’euros). Nous parlons ici des retombées directes et indirectes, qui peuvent être d’un peu plus d’un milliard de couronnes. Ne serait-ce qu’à la lecture de notre balance commerciale négative, on voit que le marché tchèque est capable, pour peu que nous achetions intelligemment, de régler ce problème. Mais cela dépend aussi beaucoup de nous. »

La Chambre d’agriculture, elle, redoute, l’arrivée massive sur le marché tchèque de produits en provenance de l’Europe de l’Ouest. S’il n’est donc naturellement pas opposé à l’appel du ministre, le président de la Chambre, Miroslav Toman (qui est également son prédécesseur), estime néanmoins que le plus urgent se trouve ailleurs et il n’a pas mâché ses mots pour le faire savoir :

Photo: Commission européenne
« Je considère le problème sous deux angles. Le premier, ce sont les retombées immédiates, qui sont de l’ordre de 300 millions de couronnes (10,9 millions d’euros) et touchent essentiellement l’industrie laitière. Après, il y a des choses à plus long terme, et là, bien sûr, nous pouvons coopérer avec le ministère de l’Agriculture pour trouver des solutions sur le marché intérieur et chercher des marchés tiers. Mais pour l’instant, quand vous avez des camions qui reviennent de la frontière russe et que vous avez ici des réserves pour les trois mois à venir, c’est facile de donner des conseils. Ce qui m’intéresse plutôt, c’est de savoir où nous pouvons envoyer ces camions pleins qui reviennent de Russie. L’idée du ministre est très bonne et va plaire à tout le monde. Mais la réalité pour l’heure est que, dans l’état actuel des choses, la situation menace concrètement l’existence de deux laiteries en Bohême du Sud. Cela a de graves conséquences pour les agriculteurs, pour les employés et ainsi de suite. Les politiques ont pris des décisions que nous respectons, mais nous aurions aimé qu’ils réfléchissent aussi à leurs retombées économiques. »

Comme beaucoup, le président de la Chambre d’agriculture, qui a rencontré mercredi son collègue de l’association des régions tchèques afin d’encourager lui aussi la consommation de produits locaux dans les institutions publiques, estime que la solution se trouve à Bruxelles. Il demande donc à ce que des compensations soient versées aux agriculteurs et producteurs frappés par les fluctuations du marché en conséquence de la guerre commerciale entre la Russie et l’Union européenne, et ce afin de pouvoir stabiliser leur production, éviter des pertes financières trop importantes et les licenciements.