Anar Mammadli, militant azerbaïdjanais des droits de l’homme, lauréat du Prix Václav Havel
Le Prix Václav Havel destiné à une personnalité ou à une organisation active dans la défense des droits de l’homme, a été décerné pour la deuxième année consécutive par le Conseil de l’Europe lundi à Strasbourg. Cette année, c’est le militant azerbaïdjanais Anar Mammadli qui a été mis à l’honneur. Deux jours après cette cérémonie, Prague accueillait une conférence intitulée « Les droits de l’homme : 25 ans plus tard » qui s’est tenue en présence du premier lauréat du prix, le dissident biélorusse Ales Bialiatski, et de deux des trois finalistes de l’édition 2014. Mais comme pour Ales Bialiatski emprisonné en 2013, cette année encore, le lauréat a été dans l’impossibilité de participer à l’événement. Ce sont donc le père et un proche collaborateur d’Anar Mammadli, lui aussi actuellement en prison, qui sont venus chercher la récompense en son nom. Radio Prague les a rencontrés lors de la conférence.
« Je suis convaincu que le prix aura un effet positif sur l’avenir d’Anar en contribuant à la visibilité de son cas. C’est un honneur que son effort soit récompensé par un prix aussi prestigieux, attribué par le Conseil de l’Europe. C’est un encouragement également pour les autres organisations non gouvernementales en Azerbaïdjan. »
Asaf Mammadov constate que la situation en Azerbaïdjan ne cesse de se dégrader avec la multiplication des arrestations des critiques du régime d’Ilham Aliyev :
« L’emprisonnement des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et plus généralement des critiques du régime, est l’entrave principale à l’évolution démocratique du pays. Il y a quelques années, la société était plus libre qu’elle ne l’est aujourd’hui quand une grande partie des responsables des ONG sont en prison. En outre, ces organisations ne disposent pas de moyens de financement en raison de la mainmise du ministère des Finances sur la procédure d’allocation des fonds. Les partis politiques d’opposition ont déjà été démantelés il y a plusieurs années, et désormais la société civile ne peut plus agir. »Également présent à Prague, en provenance de la Belgique où il est basé, Emin Mammadli, collègue d’Anar Mammadli au Centre pour l’observation des élections et pour la démocratie, fait, lui, le bilan des dernières élections présidentielles d’octobre 2013 :
« Grâce à nos 900 bénévoles, nous avons pu nous rendre dans 40% des bureaux de vote dans le pays pour constater de nombreuses violations des règles de procédure, comme par exemple l’introduction dans les urnes de plusieurs bulletins de vote par une même personne. Les élections se sont déroulées en présence d’observateurs internationaux de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), du Parlement européen et du Conseil de l’Europe. Ces deux derniers n’étaient sur place que le jour-même de l’élection, ce qui est insuffisant car une élection ne se joue pas seulement le jour J. En plus, leur rapport a conclu qu’il s’agissait d’élections libres. Leur méthodologie était biaisée. Ils sont passés à quelques endroits au hasard puis sont repartis sans pouvoir se faire une idée précise de la situation. Tandis que l’OSCE et notre centre ont effectué un vrai travail d’observation, tout en sachant que nous avons déployé trois fois plus d’observateurs que l’OSCE. »
Les représentants des deux autres finalistes du Prix Václav Havel 2014, de l’ONG israélo-palestinienne B’Tselem qui recense les violations des droits de l’homme dans les territoires occupés, et du Service jésuite aux réfugiés de Malte ont également parlé de leur situation à Radio Prague. Leurs récits seront au programme prochainement.