Bohumil Hrabal ou la pesanteur de l’histoire tchèque

Photo: ČTK

Célébré ce vendredi 28 mars, le centenaire de la naissance de Bohumil Hrabal, écrivain tchèque très connu, est très remarqué dans la presse. Nous vous présenterons des extraits des textes publiés à cette occasion par trois grands périodiques nationaux. La popularité des grands partis politiques établis en République tchèque ne cesse de diminuer. Un commentaire publié dans l’hebdomadaire Týden s’interroge sur les raisons de ce déclin. Enfin, nous avons également retenu dans la presse une analyse des résultats d’une enquête menée auprès des étudiants à l’université.

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Dans un des textes consacrés au centième anniversaire de la naissance de Bohumil Hrabal, l’hebdomadaire Respekt rappelle l’extraordinaire popularité dont l’écrivain, décédé à Prague en 1997, jouissait dans les années 1960 auprès des lecteurs tchèques ; une époque où de longues files d’attente devant les librairies accompagnaient la parution de chacun de ses ouvrages. Avec Miloš Forman et Milan Kundera, Bohumil Hrabal était l’intellectuel tchèque le plus connu dans le monde. Dans les pages du magazine, nous pouvons ainsi lire :

« Bohumil Hrabal aurait pu se ranger aux côtés des célébrités littéraires mondiales. Il était invité à des symposiums et à des lectures à Paris, à Londres, à Rome, pendant que le film ‘Les Trains étroitement surveillés’ tourné d’après son livre éponyme a remporté un Oscar en 1967. Toutefois, après l’invasion en 1968 de la Tchécoslovaquie par les chars russes et l’instauration du régime de ‘normalisation’, Hrabal a été inscrit sur la liste des écrivains interdits. »

Evoquant cet épisode de la vie de Bohumil Hrabal, Respekt rappelle que l’écrivain a mal supporté cet isolement, et c’est pourquoi il a accepté un compromis humiliant avec le régime, lequel l’a ensuite tant bien que mal autorisé à publier ses livres. A l’époque, ce compromis avait d’ailleurs été mal accueilli par une partie de la dissidence et de l’opinion publique. Dans son éditorial, l’hebdomadaire constate que cette expérience reflète non seulement la pesanteur de la récente histoire tchèque, mais qu’elle soulève également une question d’ordre plus général : savoir à quelles conditions on peut céder à l’ennemi en contre-partie d’un profit.

« Bohumil Hrabal est non seulement l’écrivain tchèque le plus traduit, mais il est aussi un des romanciers dont la cote de popularité dans son pays reste toujours élevée. Et ce en dépit du fait que d’autres écrivains aujourd’hui en vogue, comme Jan Balabán ou Michal Wieweg, donnent aux éditeurs de plus grandes garanties financières. »

C’est également ce que remarque l’auteur d’une note publiée dans le quotidien Lidové noviny, qui précise :

« On trouve sur le marché des dizaines d’éditions et de rééditions des livres de Hrabal. Les bibliothèques, pour leur part, offrent non seulement des textes de l’écrivain, mais aussi des adaptations cinématographiques de certaines de ses œuvres. ‘Moi qui ai servi le roi d’Angleterre’ (Obsluhoval jsem anglickéo krále) et ‘Retaille’ (Postřižiny) sont à la fois les deux livres et les deux films ‘hrabaliens’ actuellement les plus demandés. Une nouvelle édition de l’ensemble de l’œuvre de Hrabal en sept volumes vient également d’être lancée. »

Par ailleurs, le journal remarque que tout un éventail d’événements -conférences, expositions, rencontres – ont été préparés tant par des spécialistes de l’œuvre de Hrabal que par ses fans pour commémorer le centenaire de sa naissance.

De son côté, l’édition de jeudi du quotidien Mladá fronta Dnes évoque les endroits de Prague liés à l’écrivain, qu’il s’agisse de ceux où il a habité ou des brasseries dans lesquelles il avait l’habitude de se rendre pour boire de la bière et bavarder avec ses amis. A la page du journal qui dessine une carte de cette « Prague de Hrabal », nous avons pu lire :

« Prague porte beaucoup de traces de Hrabal. Ses débuts remontent à 1935, lorsqu’il s’est s’inscrit à la Faculté de droit de l’Université Charles. Depuis, il a changé plusieurs fois de logement pour se fixer finalement à Libeň, un quartier populaire auquel il est demeuré fidèle pendant de longues années... Et quand on dit Bohumil Hrabal, on pense souvent aux différentes brasseries de Prague qu’il aimait fréquenter, parmi lesquelles on ne citera que celle appelée Au tigre d’or (U zlatého tygra), dans la Vieille Ville. »

Mladá fronta Dnes constate également que toutes ces brasseries qui ont joué un rôle tellement important dans la vie de Bohumil Hrabal font désormais partie des biographies officielles de l’écrivain présentées et enseignées dans les écoles tchèques.

Les Tchèques sympathisent de moins en moins avec les partis établis

Andrej Babiš,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
Les préférences des partis qui se sont établis sur l’échiquier politique après la chute du régime communiste en 1989 ne cessent de décliner. Selon un récent sondage, ce sont le mouvement gouvernemental ANO, le Parti communiste et le parti de L’Aube (Úsvit), les trois formations dont les programmes contestent le plus l’évolution du pays ces vingt-cinq dernières années, qui disposeraient de la majorité avec 107 des 200 sièges à la Chambre des députés. Dans l’hebdomadaire Týden, David Jareš examine les motifs de cette évolution en constatant :

« Lors des récentes élections législatives, le mouvement ANO du milliardaire Andrej Babiš a remporté un grand succès en se classant deuxième derrière les sociaux-démocrates. Et on voit qu’aujourd’hui, les gens sympathisent avec ce parti plus encore qu’auparavant. Ce serait en premier lieu une réaction à l’incapacité des partis démocratiques établis d’imposer des valeurs et des programmes clairement définis. Le malheur, donc, ce n’est pas seulement le succès remporté par des partis s’appuyant sur des programmes populistes, le mouvement ANO étant de surcroît lié à un empire médiatique et industriel sans précédent en Europe, mais c’est aussi l’inertie dans laquelle les partis établis ont plongé qui est déplorable. »

Pour l’auteur de l’article, il existe pourtant une chance que les partis concernés, l’ODS (Parti civique démocrate), TOP 09 à droite et le ČSSD (Parti social-démocrate) à gauche, se réveillent en procédant à des remaniements en leur sein, pour défendre plus fermement les valeurs démocratiques qui sont les leurs. Il y a également une chance que les gens comprennent que les promesses faites par les partis dits « de protestation » ne sont que chimère. L’éditorialiste espère parallèlement que, ne serait-ce que certains membres de ces formations, finissent à leur tour par partager les valeurs libérales et démocatiques ».

Le salaire compte le plus pour les étudiants tchèques

Photo: Commission européenne
Le salaire est le premier critère de choix pour les anciens étudiants universitaires à la recherche d’un emploi. C’est ce que signale une des dernières éditions de Mladá fronta Dnes, qui se réfère aux résultats d’une récente enquête menée par la société Studenta Media. Cette priorité est défendue par près de 69% des étudiants interrogés. S’ensuivent les perspectives d’évolution de carrière, l’attractivité de la position professionnelle et le milieu du travail. Le journal précise :

« Même si le salaire joue pour les anciens étudiants un rôle très important, ceux-ci n’ont plus de revendications salariales exagérées, comme c’était souvent le cas dans le passé. Selon l’étude effectuée, ils s’attendent à un salaire mensuel variant entre 18 000 et 25 000 couronnes, l’équivalent de 600 à 900 euros, à condition de voir leur salaire augmenter au bout de leur première année de travail. Les étudiants souhaitent prioritairement travailler dans une petite ou une moyenne société, le mieux dans une société internationale. Une faible part seulement d’entre eux, quelque 12%, souhaitent travailler dans la fonction publique. »

La mobilité déclarée des étudiants est présentée dans ce texte comme un trait nouveau et particulièrement positif. Une petite moitié de ces jeunes seraient effectivement prêts à aller travailler à l’étranger, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et l’Allemagne étant pour eux les destinations privilégiées. L’auteur de l’article constate également que l’enquête concernée fait mentir les théories sur la crise de la famille traditionnelle, car la moitié des étudiants interrogés envisagent d’en fonder une ces cinq prochaines années.