Chantal Poullain ou la carrière tchèque d'une Française
Depuis 1978, elle est l'ambassadrice du charme français en République tchèque. Ces jours-ci, Chantal Poullain fête son cinquantième anniversaire et elle continue d'enrichir la culture tchèque de diverses facettes de sa personnalité.
« C'était un coup de foudre, » dit Chantal Poulain à propos de sa rencontre, en 1978 dans un théâtre de Genève, avec le comédien tchèque Bolek Polivka, rencontre qui a complètement changé sa vie. Elle abandonne tout et se marie avec Bolek au festival de Baltimore aux Etats-Unis. Pour les autorités tchèques, cependant, l'acte de mariage sera répété encore deux ans plus tard à Brno en Moravie. Pour l'homme qu'elle aime la jeune femme renonce à la liberté et la vie aisée qu'elle pourrait mener en France ou dans un autre pays occidental et s'installe de l'autre côté du rideau de fer, dans un pays d'une culture bien différente de la sienne. Plus, elle ose se lancer dans une carrière théâtrale, cherche à gagner les faveurs d'un public dont elle ne connaît pas la langue et ... elle réussit. Elle joue au théâtre, elle obtient plusieurs rôles importants au cinéma notamment dans des films de la réalisatrice Vera Chytilova. Energique, sensible, distraite et passionnée elle sait faire valoir dans le contexte tchèque sa beauté «venue d'ailleurs» et son accent français :
« Pour moi c'est en même temps un handicap et une chose qui me pousse continuellement à penser à chaque mot. Je n'ai pas d'automatisme. Chaque spectacle, c'est des « oeufs frais ». Je suis sûre que mon tchèque sera toujours « couci-couça » comme on dit en français. Parfois je pense en français et je le dis en tchèque. Mes textes je les traduits toujours en français. J'ai besoin d'une traduction française pour être convaincue que ce que je comprends en tchèque est vraiment exact. Mais quand je joue, cela me fait penser à chaque mot. Je ne joue pas à avoir un accent, je sais que c'est une chose qui me colle à la peau, et que je l'aurais toujours. Je n'ai jamais étudié le tchèque, j'essaie au maximum de travailler les longueurs, mais je n'y arrive pas. Ce qui est obligatoire, et ce sont les metteurs en scène qui prennent cette décision, c'est qu'il faut qu'il y ait toujours une explication: Pourquoi Chantal ? Pourquoi elle a cet accent ? Je suis toujours une étrangère, je ne joue jamais un personnage tchèque. Je suis toujours Française. »
Quelque chose de dur dans son regard, sa silhouette élégante et fière valent souvent à Chantal Poullain des rôles de femmes hautaines, autoritaires et cruelles, mais elle sait être convaincante aussi dans les emplois moins dramatiques et plus tendres et donner à ses prestations la légèreté et l'humour. C'est le réalisateur Jiri Menzel qui a découvert cette facette de son talent en lui confiant le rôle de la gouvernante dans son film « La fin du bon vieux temps ».
«Je trouve toujours une certaine sympathie pour mes personnages qu'ils soient mauvais ou méchants. Je cherche toujours pourquoi, pourquoi ils sont comme ça. Il y toujours une raison profonde, une souffrance quelque part. Il y a toujours quelque chose qui provoque. Donc il y a toujours pour moi quelque part une sympathie.»La cinquantaine trouve Chantal Poullain en pleine forme. On parle beaucoup de son dernier rôle au théâtre Ungelt où elle campe une femme d'un certain âge qui engage un professeur de danse pour apprendre à danser. Beaucoup de choses ont changé dans sa vie. Elle s'est séparée de Bolek Polivka, père de son fils Vladimir, jeune homme déjà adulte qui cherche maintenant sa place dans la vie. Elle est cependant restée en République tchèque et est devenue sans doute la Française la plus populaire dans notre pays. Son visage apparaît sur les couvertures de journaux, elle est interviewée et suivie par la presse à scandale. On est au courant de sa vie artistique, de sa passion pour les voitures puissantes, de ses activités caritatives pour les enfants malades. Bon gré mal gré, « Chantalka », tel est le surnom tchèque qu'on lui a donné et qu'elle a admis, est devenue une partie intégrante de notre culture et de notre réalité.