Cinq semaines en ballon

Josef Blažek, photo: ČT Art
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Trois hommes courageux s’embarquent dans un ballon et se lancent dans un voyage à travers le continent africain. Cette expédition imaginaire qui n’a pas été réalisée, n’en est pas moins célèbre. C’est le sujet du premier volume de la série des Voyages extraordinaires de Jules Verne. Le célèbre roman Cinq semaines en ballon vient d’être adapté en bande dessinée par le scénariste Josef Blažek et le dessinateur Karel Zeman.

Le premier volume des Voyages extraordinaires

Josef Blažek,  photo: ČT Art
Il y a plus de 150 ans le roman Cinq semaines en ballon a lancé un auteur presque inconnu et a marqué le début de sa collaboration très fructueuse avec l’éditeur Pierre-Jules Hetzel. Par la suite, plusieurs générations de jeunes et adultes ont assouvi leur soif d’aventures en lisant ce roman qui rend crédibles les exploits les plus improbables mais qui ne manque pourtant pas de bases scientifiques. Le scénariste Josef Blažek a subi, lui aussi, le charme irrésistible des romans de Jules Verne :

« J’aime beaucoup Cinq semaines en ballon. Je pense que c’est un roman réussi, palpitant et plein d’action, et en plus il y a des personnages sympathiques. Dès mon enfance j’ai été attiré par l’aéronautique, les ballons, les dirigeables et c’est pour cette raison aussi que je me suis mis à aimer les romans de Jules Verne. Choisir Cinq semaines en ballon a été donc pour moi tout à fait évident. »

Les romans de Jules Verne à l’époque de la vidéo-culture

'Cinq semaines en ballon',  photo: Nakladatelství Josef Vybíral
Au seuil du XXIe siècle, la soif d’aventures des jeunes lecteurs est toujours aussi grande mais ils lisent de moins en moins. Ils sont assaillis par des moyens de communication sophistiqués, par cette vidéo-culture qui laisse très peu de place à l’imagination, et deviennent souvent dépendants des jeux vidéo. Ils n’aiment pas lire de longs textes et les descriptions. Ils sont impatients et préfèrent l’action et le mouvement. Né en 1980, Josef Blažek comprend et partage sans doute cette impatience des jeunes et cela se manifeste aussi dans la méthode qu’il a utilisée pour adapter et raccourcir le roman de Jules Verne :

« Raccourcir les romans de Jules Verne ne pose pas problème parce qu’il n’y a pas tellement d’action. Il y a beaucoup de descriptions, de passages historiques, politiques, biologiques. Enfant, je n’aimais pas tellement ces passages qui me semblaient un peu rébarbatifs parce qu’ils retardaient l’action. Maintenant j’ai donc la satisfaction d’avoir coupé ces passages ou de les avoir réduits au minimum et de me concentrer sur l’action. Et même dans l’action j’ai choisi ce qui était le plus attractif. Cependant, tout ce qui est important a été conservé. »

Des aventures qui tiennent le lecteur en haleine

'Cinq semaines en ballon',  photo: Nakladatelství Josef Vybíral
Trois explorateurs, trois hommes admirables se retrouvent dans le panier du Victoria, ballon avec lequel ils survolent le continent africain. Il s’agit du docteur Samuel Fergusson, de son serviteur Joseph Wilson dit Joe, et du chasseur Richard Kennedy qui est, au début, très sceptique et pousse Samuel Fergusson à abandonner son projet dangereux. Le sceptique finira pourtant par partager le sort de ses deux amis et volera avec eux au-dessus de l’Afrique, de la côte de l’Océan indien à la côte de l’Océan atlantique, au-dessus de la jungle et du désert et vivra avec eux une série d’aventures aussi dangereuses que drôles. Ils ont à lutter contre des bêtes féroces, ils réussissent à sauver un homme livré aux cannibales, ils trouvent des trésors d’or et découvrent la source du Nil. Et ils échappent par miracle à tous les dangers mortels que l’auteur a accumulés sur leur parcours. Le dessinateur Karel Zeman a eu la tâche difficile de traduire toutes ces aventures par l’image :

« C’était un travail intéressant. Personnellement, j’aime beaucoup Jules Verne. Evidemment j’ai été obligé d’étudier un peu comment se présentait un ballon, et surtout je devais inventer l’aspect des personnages. Il fallait les différencier afin que le lecteur n’ait pas de mal à les reconnaître. J’ai donc dû choisir la coupe des vêtements, la forme caractéristique des têtes et des barbes afin qu’il soit évident que c’était par exemple le professeur Fergusson où le célèbre chasseur Kennedy qui parlait. »

La trame dépouillée du roman

'Cinq semaines en ballon',  photo: Nakladatelství Josef Vybíral
Le scénariste Josef Blažek a eu la tâche ingrate de réduire le roman de Jules Verne en bande dessinée. Ecrit à une époque où les gens avaient encore le temps de s’arrêter et de lire, le roman a dû être donc considérablement raccourci. Le livre qui était en son temps entre autres une source de connaissances sur l’Afrique, sa faune, sa flore, sa population, sa géographie et son histoire, a été dépouillé de tous ses passages descriptifs. Le scénariste a rejeté tous les éléments retardataires et n’a conservé que sa trame. Voici comment il décrit sa méthode :

« En préparant le scénario j’ai abîmé tout un livre, je griffonnais sur des pages entières, je barrais les passages que je voulais éliminer et soulignais au crayon au contraire les épisodes que je considérais comme importants. Et ce travail a abouti à la rédaction du scénario de la BD. Ensuite j’ai réparti les épisodes sur les pages en mettant l’accent sur les tournants principaux de l’action et aussi sur l’alternance du jour et de la nuit pour souligner la durée de l’expédition qui est quand même de cinq semaines. Et puis j’ai commencé à dessiner des esquisses simples que j’envoyais à Karel Zeman. »

Une collaboration rapide et efficace

'Cinq semaines en ballon',  photo: Nakladatelství Josef Vybíral
Il semble que la collaboration entre le scénariste et le dessinateur ait été rapide et efficace. C’était une collaboration à distance où chacun connaissait bien son rôle. Le dessinateur Karel Zeman constate que les deux auteurs n’ont même pas eu besoin de se rencontrer :

« C’était une très bonne collaboration. Nous ne nous sommes rencontrés pour la première fois qu’au moment où le travail sur la BD a été achevé. Le travail à distance, le contact par email a été absolument parfait. J’esquissais une page et j’envoyais le projet à Josef Blažek et il m’adressait ses remarques et ses suggestions. En tenant compte de ces suggestions, j’ai ajouté des couleurs et nous procédions ainsi page par page. »

L’adaptation du roman Cinq semaines en ballon n’est que le début d’un projet beaucoup plus important. Josef Blažek et Karel Zeman envisagent de récidiver et de réaliser toute une série d’adaptations des romans de Jules Verne. Le prochain volume sera une adaptation du livre Le Sphinx de glace, roman plein de mystère qui peut être considéré comme un hommage à Edgar Allan Poe et une suite libre de son roman Les Aventures d’Arthur Gordon Pym.

Le charme irremplaçable du texte intégral

Les jeunes lecteurs tchèques auront donc la possibilité de connaître Les Voyages extraordinaires de Jules Verne sans se donner la peine de lire leur texte dans leur intégralité. Nous qui avons dévoré jadis le texte intégral de ces livres, nous qui avons partagé dans nos têtes d’enfant les aventures dangereuses de ces héros sans peur et sans reproche, nous savons que même les passages descriptifs et encyclopédiques ont une place importante dans la structure de ces romans. Les versions raccourcies de ces livres ne peuvent donner qu’une image incomplète de ces ouvrages et leur ôtent beaucoup de ce charme qui nous a conquis et grâce auquel Jules Verne est devenu un des meilleurs amis de notre jeunesse. Peut-être, la bande dessinée qui marie le dessin et le texte, sera un premier pas, un moyen qui leur ouvrira le chemin vers le monde fabuleux de la littérature.