Créé en 860 en France, l’évangéliaire de Strahov bientôt en fac-similé
L’évangéliaire de Strahov, le plus ancien livre existant sur le territoire de la République tchèque, déposé dans un coffre-fort de la bibliothèque du monastère de Strahov, va être reproduit en fac-similé. Si jusqu’à présent, les personnes intéressées ne peuvent feuilleter ce précieux document du IXe siècle que dans sa forme numérisée sur Internet, 199 exemplaires en fac-similé seront à leur disposition dès le mois de janvier 2012. Une occasion unique d’admirer le manuscrit vieux de plus de 1 100 ans s’est présentée à l’occasion de la signature du contrat sur les droits de reproduction entre le monastère de Strahov et la société Tempus Libri chargée de réalisation de reproductions exactes. Le parcours de l’évangéliaire richement enluminé, créé en 860 dans le scriptorium du monastère de Tours, en France, et apporté à Prague par les premiers prémontrés, fondateurs du monastère de Strahov, dans cette page d'histoire :
Dans le passé, l’évangéliaire a plusieurs fois déménagé : les prémontrés fuyant les hussites l’ont caché à Wroclaw, en Pologne, et il est sûr qu’ils l’ont caché en dehors du pays pour le mettre à l’abri des Suédois qui ont pillé le monastère de Strahov au XVIIe siècle, raconte Gejza Šidlovský :
« L’évangéliaire de Strahov est l’un des manuscrits les plus rares au monde: d’autres qui lui ressemblent sont conservés dans la bibliothèque apostolique au Vatican, un autre, moins décoratif, se trouve dans la bibliothèque métropolitaine du château de Prague. Créés par des moines copistes dans les scriptoriums des cloîtres en France et en Allemagne, les évangéliaires sont des manuscrits les plus décorés et les plus précieux du haut Moyen-âge. Pour nous, aujourd’hui, c’est quelque chose d’extraordinaire et d’incroyable de pouvoir toucher un objet créé il y a plus de 1100 ans. Il fournit un témoignage de l’époque des saints Cyrille et Méthode. En le touchant, on se rend compte de la grandeur de la culture introduite par le christianisme. Or c’est aussi un témoignage qui nous vient de Trèves où le manuscrit de Strahov a été enrichi de quatre enluminures des évangélistes et qui sont un exemple de l’art pictural de la période ottonienne du milieu du Xe siècle. Et nous voilà à l’époque de saint Adalbert qui était très proche de l’empereur Otton Ier. Il n’est dont pas exclu que les deux hommes aient touché ce livre car Trèves était une ville impériale et saint Adalbert y a aussi séjourné. » L’évangéliaire de Strahov est rédigé en latin. Le texte est en lettres d’une onciale très régulière, soit une variation de l’écriture latine empruntant des formes majuscules, typiques pour l’époque carolingienne. Ce livre rare et unique qui ne quitte jamais la bibliothèque de Strahov pourra dorénavant faire l’objet de recherches, d’études et de lecture grâce aux fac-similés qui seront produits au nombre de 199 par la société Tempus Libri : la seule société en République tchèque spécialisée dans la création de reproduction exactes de livres rares de sorte que le fac-similé reproduit l’original non seulement en ce qui concerne l’aspect physique, mais aussi les technologies et les matières utilisées. Les parties en or seront faites en or et grâce aux cristaux et agates, chacune des 199 reproductions sera un original, remarque Tomáš Žilinčář de la société Tempus Libri :« Le manuscrit sera numérisé. On utilisera des technologies sans contact. Le processus est extrêmement exigeant, chaque point est scanné séparément, une page prend environ 40 minutes, alors que l’évangéliaire en compte 444. Les pages numérisées seront ensuite imprimées et complétées à la main, y compris la décoration et la reliure. »Le prix d’un fac-similé de l’évangéliaire de Strahov s’élèvera à 350 000 couronnes. Qui sont les personnes potentiellement intéressées par cet achat ? On écoute Tomáš Žilinčář :
« Nos clients sont des personnes qui sont attirées par la rareté, l’exclusivité, le luxe : ce sont des collectionneurs, des artistes qui savent apprécier un tirage relativement faible, et on note bien évidemment aussi un certain intérêt de la part des bibliothèques, des institutions et des musées. »Plusieurs exemplaires de fac-similés de l’évangéliaire de Strahov seront offerts au monastère qui est détenteur des droits. Une vingtaine de pièces seront vendues aux enchères et les moyens obtenus reversés au profit de fondations.