Des millions de documents sur les victimes du nazisme désormais en ligne, dont beaucoup concernant l’ancienne Tchécoslovaquie
Située au milieu de l’Allemagne, Bad Arolsen est une ville de taille réduite mais qui abrite des archives colossales, dans le Centre international sur la persécution nazie. Désormais, une bonne partie de ces millions de documents sont accessibles en ligne et nombreux sont ceux qui sont liés à l’histoire de la Tchéquie et de l’ancienne Tchécoslovaquie.
Depuis peu, il est possible de consulter par Internet quatorze millions de documents numérisés et mis en ligne, soit près de la moitié du total contenu dans ces Archives Arolsen.
Floriane Azoulay est la directrice de cette institution longtemps connue sous le nom de Service international de Recherche (ITS en anglais) :
« Nous avons trois groupes de documents : les documents historiques qui datent de la guerre et de la persécution nazie, mis en sécurité par les Alliés lors de la libération de l’Allemagne et des camps de concentrations. Un deuxième groupe constitué de documents de fichiers concernant des survivants après-guerre et la manière dont ils ont été pris en charge et soutenus par les Alliés. Le dernier groupe de documents est la correspondance entre notre institution et des requérants. Nous recevons encore aujourd’hui environ 20 000 demandes par an. »
Des formulaires, des listes, des cartes, des lettres : plusieurs catégories de documents référencés et repérables en un clic, en très grande majorité relatifs à l’enfer concentrationnaire nazi – le nouveau site des Archives Arolsen rend accessible des morceaux d’histoires pour l’Histoire.Pour mener à bien cet énorme travail de numérisation, les Archives Arolsen ont bénéficié du concours d’Ancestry, un site spécialisé dans la recherche généalogique. Le moteur de recherche permet de retrouver rapidement les documents liés à une personne ou un sujet.
Floriane Azoulay « Nous avons beaucoup de documents qui concernent l’ancienne Tchécoslovaquie, mais je ne peux vous dire combien exactement parce que la plupart des documents peuvent être trouvés par le biais du nom ou du lieu de naissance d’une personne – pas par son pays d’origine. Nous avons par exemple le fichier des détenus de Theresienstadt et beaucoup de fichiers de camps de concentrations qui concernent des ressortissants de l’ancienne Tchécoslovaquie. »
Parmi cette quantité considérable de documents se trouvent ainsi les cartes de déportation vers les camps de la mort d’illustres représentants de la culture, de la science et de la politique de la Tchécoslovaquie d’alors : Karel Poláček, Pavel Haas, Josef Čapek et Karel Ančerl ne sont que quelques noms d’une liste interminable de vies fracassées.D’autres documents ont une valeur historique inestimable, dans un pays où les comptes n’ont pas vraiment été réglés. Y figure par exemple le formulaire rempli par Ferdinand Peroutka, le journaliste et écrivain diffamé par l’actuel président tchèque, à sa libération du camp de concentration de Buchenwald en 1945.
Autre exemple de ces documents historiques : une lettre de septembre 1945 relative au parcours en Asie de František Kriegel, qui deviendra plus tard le seul des ministres communistes à ne pas plier devant les pressions soviétiques de 1968.Une partie de ces documents relatifs à Theresienstadt (Terezín en tchèque) étaient déjà en ligne grâce aux efforts de l’Institut de l’Initiative de Terezín. Les Archives Arolsen permettent d’en retrouver d’autres, par exemple sur ceux qui y ont péri, comme le poète français Robert Desnos, ou qui y sont passés après avoir survécu à la Shoah, comme Marceline Loridan-Ivens, internée à Auschwitz aux côtés de Simone Veil, et dont la carte tchèque d’après-guerre indique « Marcelle Rosenberg, habitant avant sa déportation Château de don. Bollen », pour Château de Gourdon, près de Bollène, dans le Vaucluse.