La région d’Ústí nad Labem, un territoire aux deux visages

Litoměřice

Quand on pense à la région d’Ústí nad Labem, une des premières choses qui vient spontanément à l’esprit c’est le chef-lieu qui lui a donné son nom, ville industrielle traversée par l’Elbe, ou encore les coins autour de la ville de Most, aux paysages largement impactés par l’extraction du charbon. Mais cette région est bien plus diversifiée. Dans ce nouvel épisode de notre série consacrée aux régions de Tchéquie, cap sur plusieurs destinations autour de la ville de Litomeřice et au-delà, qui donnent à voir un visage bien différent de la région marquée autrefois par son appartenance aux Sudètes et par la triple culture tchèque, juive et allemande.

Massif central de Bohême - Porta Bohemica | Photo: Jan Kubelka,  Radio Prague Int.

A une heure de route seulement au nord de Prague, le paysage change radicalement des abords de la capitale tchèque. Soudain émergent à l’horizon des petites collines distinctes aux formes caractéristiques : car oui, il s’agit bien d’anciens volcans qui, à l’instar de leur équivalent français plus imposant, forment ce qu’on appelle le Massif central de Bohême. Le long de l’autoroute D8 qui mène à Litomeřice, la colline de Říp, référence mythologique de l’histoire du peuple tchèque, annonce l’entrée dans cette ancienne région volcanique cénozoïque qui surplombe les plaines fertiles de Bohême.

La maison Kalich | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Avec d’un côté plusieurs de ces mamelons volcaniques et de l’autre la confluence de l’Elbe et de la rivière Ohře (Eger, en allemand), la ville de Litomeřice offre des panoramas variés depuis ses points de vue les plus fameux : comme la tour en forme de calice qui surplombe la mairie – dont on nous a fait comprendre qu’elle n’avait en réalité rien à voir avec le symbole hussite, mais tout avec la culture du vin très implantée depuis le Moyen Age dans la région. C’est en tout cas dans ce bâtiment de la place centrale typique à arcades de la ville que l’on retrouve Eva Břeňová qui dirige le centre d’information touristique municipal.

Mírové náměstí  (Place de la Paix) | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

« La ville de Litomeřice est vraiment bien située géographiquement : à une heure de Prague en voiture, mais aussi à une heure de Dresde en Allemagne. C’est un très beau cadre de vie qui est influencée depuis tous temps par la présence de l’Elbe : aujourd’hui, vous pouvez emprunter des bateaux touristiques qui vous emmèneront d’un côté à Ústí nad Labem et jusqu’en Allemagne, et de l’autre côté à Mělník. Il y aussi un bateau qui fait la navette avec la forteresse de Terezín. Litomeřice est un bon point de chute pour les gens qui aiment le tourisme actif : il est possible de faire du vélo ou de la randonnée dans le Massif central de Bohême, et même de monter tout en haut de son plus haut sommet, Milešovka. »

La vendange de Litoměřice | Photo: Miroslav Zimmer,  ČRo

Si comme ailleurs en Tchéquie, les amateurs de bière y trouveront leur compte en matière de boisson houblonnée – d’ailleurs, à une heure de route se trouve la région de Žatec, célèbre pour sa culture, et dont nous reparlerons un peu plus tard, Litomeřice offre des paysages vallonnés idéaux pour la culture de la vigne, malgré sa situation géographique très au nord :

« La région de Litomeřice est très fertile et marquée par l’agriculture. Ici, pas d’usines ou de zones industrielles qui viennent marquer le paysage. Une des caractéristiques des environs de Litomeřice, c’est la culture de la vigne : cette tradition remonte au XIVe siècle lorsque le roi de Bohême Charles IV a offert des vignes à la ville. Cette tradition est ininterrompue depuis. Actuellement, les deux cépages qu’on trouve ici sont le müller-thurgau et le riesling : il est possible de goûter ces vins blancs chez les viticulteurs de la région ou dans le cadre de l’exposition sur la viticulture présentée dans l’ancien château gothique de la ville. »

Les arcades sur la place de la Paix | Photo: Lenka Žižková,  Radio Prague Int.

Litomeřice est une ville historique qui a eu la chance de voir son architecture préservée à travers les âges même les plus récents : à Litomeřice, même le régime communiste au pouvoir après 1948 n’a pas osé toucher au centre historique qui a la chance, au contraire de nombreuses autres villes du pays, d’être quasi intact, dépourvu de l’éternelle boîte en béton qui fait office de magasin d’alimentation, telle une verrue plantée au milieu des bâtiments anciens. Ici, l’alignement des maisons médiévales et Renaissance à arcades est intouché, comme le note l’historien et conservateur du musée de la ville, Jan Peer :

Mírové náměstí  (Place de la Paix) | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

« Litomeřice est une des villes les plus importantes du nord-ouest de la Bohême. Elle a été ville royale, puis chef-lieu de la région à une époque. En outre, elle se trouve sur l’Elbe donc elle est une ville commerciale – notamment avec le commerce du sel. Elle s’est enrichie jusqu’à la moitié du XIXe siècle, époque à laquelle des villes comme Lovosice, Děčín ou Ústí ont commencé leur industrialisation. Les activités ont bougé un peu plus vers là-bas. Litomeřice n’a pas réussi à basculer vers l’industrie, surtout parce que les conditions n’y sont pas idéales. Mais cela a aussi été contribué à préserver Litomeřice et son noyau historique. Le centre-ville s’est un peu développé au XIXe siècle au-delà des anciennes fortifications qui ont été détruites. Mais même là, on trouve aussi de très belles maisons bourgeoises. Après la Deuxième Guerre mondiale, il y a certes eu quelques destructions en lien avec la construction d’une voie de chemin de fer et d’une route, mais pas comme cela a pu être le cas dans d’autres villes tchèques. »

Litoměřice | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Ce n’est pas seulement par son centre élargi bien préservé que se distingue la ville : si Litomeřice est encore une ville des Sudètes, l’histoire de sa population est différente des autres villes de la région :

Une maison sur la place de la Paix | Photo: Lenka Žižková,  Radio Prague Int.

« Avant la Deuxième Guerre mondiale, en 1930, il y avait près de 19 000 habitants à Litomeřice, dont près de 11 000 germanophones. C’est un peu plus de la moitié, mais ce n’est pas une immense majorité de germanophones comme c’était le cas dans d’autres villes des ex-Sudètes, comme Ústí nad Labem, Karlovy Vary, Liberec, Teplice… Litomeřice se trouvait dans les Sudètes, mais à la lisière de la Bohême tchécophone. La population était mélangée. On ne peut pas dire que c’était une ville allemande, plutôt une ville germano-tchèque. Ainsi, il y a encore des gens qui se rappellent de cette époque via leurs aïeux. Dans d’autres villes frontalières, les liens se sont décousus. Quant à la communauté juive de Litomeřice, elle était très réduite. Il y avait une synagogue qui a survécu jusqu’à la fin de la guerre mais qui a malheureusement été détruite par un bombardement soviétique en mai 1945. »

Musée - Ancien Hôtel de Ville | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Le musée de la ville de Litomeřice, où nous avons retrouvé l’historien Jan Peer, est un superbe bâtiment qui vient d’être entièrement restauré : ouvert au public avec une exposition temporaire qui rappelle l’histoire des divers remaniements à travers les époques, il est actuellement en attente de la création et de l’installation d’une exposition permanente, à l’horizon d’un ou deux ans :

L’ancienne salle de réunion des conseillers municipaux | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

« Le musée se trouve dans un bâtiment Renaissance qui date des années 1537-1539 et un des premiers bâtiments municipaux de ce style en pays tchèques. D’où son importance. Nous nous trouvons dans l’ancienne salle de réunion des conseillers municipaux. Elle date de 1539-1541, entièrement réalisée en bois, et totalement unique en son genre parce qu’elle a été préservée jusqu’à ce jour. Depuis le Moyen Age, à l’époque de la Renaissance et jusqu’en 1838, le bâtiment faisait office d’hôtel de ville. La mairie a déménagé à cette époque dans l’édifice où elle se trouve toujours aujourd’hui. »

L’église Saint-Etienne | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

A Litomeřice, on recommandera de faire un tour également dans toutes les ruelles autour de la place principale, de visiter l’ancien château gothique qui sert aujourd’hui de centre culturel, de faire un tour par le parc Václav Havel où se trouve un buste de l’ancien dissident et premier président tchécoslovaque après 1989, de longer les murs de la brasserie locale à deux pas de là, et de continuer sa balade jusqu’à la place du Dôme, où se trouve l’église Saint-Etienne, les maisons canoniales de style maniériste et la résidence épiscopale de style baroque : ces six hectares d’édifices liés au pouvoir religieux rappellent par leur magnificence que Litomeřice fut certes une cité de province, mais néanmoins puissante à l’époque où l’Eglise était l’institution qui, à côté du pouvoir royal, régissait la vie des gens.

Litoměřice | Photo: Jan Kubelka,  Radio Prague Int.

A la découverte des environs de Litomeřice

Le camp de transit de Terezín | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Une fois que vous aurez fait le tour de tous les recoins de la ville de Litomeřice, n’hésitez pas à découvrir ses environs. Evidemment, on conseillera vivement de se rendre à Terezín, à cinq minutes de voiture de la ville : nous avons parlé à maintes reprises de ce camp de transit nazi, ghetto juif érigé comme « ville idéale des Juifs » par Hitler, telle une sinistre scène de théâtre créée pour donner le change à la communauté internationale, mais où furent déportés des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux artistes. Ce lieu tragique ne fera pas donc pas l’objet d’une visite dans cette rubrique, mais nous vous  recommandons toutefois de retrouver tous les sujets que nous avons consacré à Terezín et de ne pas manquer cette visite, aussi dure et poignante soit-elle.

Le château « français » de Ploskovice

Château de Ploskovice | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

En quittant Litomeřice vers l’ouest, il faut faire une halte au château de Ploskovice que l’on doit à un des plus grands architectes de l’époque baroque en pays tchèques, Kilian Ignác Dietzenhofer. Inspiré de Versailles – en plus modeste bien sûr – il a été construit entre 1720 et 1725 à la demande de la princesse Anne-Marie de Toscane, épouse du dernier Médicis, le grand-duc Jean Gaston. Ce petit air français n’a pas échappé aux professionnels du repérage pour les tournages étrangers : il y a quelques années, le château a servi de décor à la dynamique série de la BBC The Musketeers, librement inspirée du roman d’Alexandre Dumas, et y figure donc pour les scènes censées se passer dans le palais royal français…

Château de Ploskovice | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

D’ailleurs, on notera qu’une bonne partie de la série a été tournée dans la région, comme au château de Doksy ou dans les anciennes casernes de Terezín. En tout cas, Ploskovice vaut le détour, pour ses intérieurs, certes, mais aussi pour son jardin à la française mais aussi sa grotte artificielle, au système d’alimentation en eau ingénieux. Un petit café-restaurant sympathique permet au visiteur de se restaurer avant de repartir pour une autre visite d’une demi-journée.

Monter en haut de la colline de Sedlo avant de visiter la petite ville d’Úštěk

En quittant Ploskovice, vous pouvez opter pour une bonne randonnée jusqu’au sommet de la colline de Sedlo (726 mètres d’altitude), un de ces innombrables anciens volcans qui donnent à la région son caractère. Sur le chemin qui mène tout en haut, les arbres ressemblent à une forêt vierge et les formations rocheuses disséminées un peu partout évoquent des jouets qu’auraient laissé traîner des géants ou d’anciens sites de culte datant de la préhistoire...

Úštěk | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Mais il est aussi possible de poursuivre sa route jusqu’à la charmante petite ville d’Úštěk (Auscha en allemand). Comme d’autres communes de la région, elle est un témoignage à la fois de la présence des populations germanophones dans les anciennes Sudètes, mais aussi de la forte présence de la communauté juive jusqu’à ce que la tragédie de la Deuxième Guerre mondiale, les déportations et l’extermination systématique par les nazis ne viennent durablement modifier la composition de la population du pays. Il y a quelques années, un projet intitulé Les Dix étoiles a permis de rénover une quinzaine de bâtiments liés au judaïsme dans dix lieux différents du pays.

La synagogue | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Parmi ceux-ci, la ville d’Úštěk qui compte une ancienne synagogue de style classique (1794) qui était dans un état de déréliction depuis 1945. Entièrement réhabilitée, elle a été rouverte au public en 2014 et sert même de temps à autres à des offices religieux. A l’étage inférieur du lieu de culte a été reconstituée la chambre du maître d’école ainsi que la petite salle de classe destinée aux enfants de la communauté. Il est également possible de visiter à côté la maison du rabbin, transformée en musée où l’on découvre que la communauté juive d’Úštěk était certes peu nombreuse, mais importante par ses activités, comme le soulignait au moment de l’inauguration l’ancien secrétaire de la Fédération des communautés juives, Tomáš Kraus.

La synagogue | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

« Ils ont été les premiers entrepreneurs à avoir lancé le commerce du houblon. Úštěk était une importante région de culture du houblon avant d'être concurrencée par la région de Žatec, qui a créé une nouvelle variété de houblon qui a fini par évincer du marché le houblon d’Úštěk. Mais même avant cela, la communauté, qui se composait en fait de plusieurs familles importantes, était très prospère, ses produits étaient célèbres dans le monde entier et c'est pourquoi elle a pu se permettre de construire une si belle synagogue. »

Ptačí domky  (les maisons à oiseaux) | Photo: Miloš Turek,  Radio Prague Int.

Témoignage poignant de l’importance de la communauté, le cimetière juif à quelques kilomètres du centre-ville, en haut d’une petite colline balisée de panneaux qui rappellent l’histoire juive de la région, notamment les persécutions liées à l’annexion des Sudètes en 1938 puis l’occupation de la Tchécoslovaquie après mars 1939. Sur le chemin entre la synagogue et le cimetière, on remarquera au-dessus de sa tête, perchée à flanc de falaise, une rangée de petites maisons en grande partie faites de bois. Construites au milieu du XIXe siècle par des ouvriers italiens recrutés pour construire une voie de chemin de fer, il s’agit de dépendances accrochées à la paroi rocheuses comme des nids d’oiseaux – d’où leur joli nom en tchèque, ptačí domky (les maisons à oiseaux).

Ptačí domky  (les maisons à oiseaux) | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Le Calvaire d’Ostré et le château de Helfenburk

Le Calvaire d’Ostré | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Ce n’est pas à vol d’oiseau que vous arriverez au Calvaire d’Ostré, à 3,5 kilomètres de là, au terme d’une heure et demie de marche, en grande partie sur chemins boisés. Ce lieu de pèlerinage a été construit par un architecte baroque d’origine italienne, Octavio Broggio, entre 1703 et 1707 à la demande des Jésuites. Au terme de votre balade, vous traverserez le petit village avant d’y accéder via un chemin de croix dont les stations ont été édifiées au XIXe siècle, qui mène à la terrasse inférieure de l'édifice. De là, un large escalier en grès avec des niches et les vestiges de statues baroques monte jusqu’au sommet. Sur la plate-forme supérieure se trouvent deux chapelles et un saint-sépulcre à l'arrière-plan. Depuis le haut du site, par temps idoine, il est possible d’admirer toute la vallée d’Úštěk et le paysage accidenté du Massif central de Bohême.

Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

A 2,5 km d’Ostré (soit moins d’une heure de marche) se trouvent également les ruines du château de Helfenburk (à ne pas confondre avec le château éponyme situé en Bohême du Sud à 250 km de là…). Construit dans la première moitié du XIVe siècle par une famille de la noblesse, il est devenu propriété de l’archevêché de Prague en 1375. Pendant la période turbulente des guerres hussites, le château est devenu un refuge pour l’archevêque, après quoi il est repassé aux mains de la noblesse. Il est accessible librement toute l’année grâce à une association locale qui s’occupe de son entretien. A ne pas manquer aussi pour son panorama sur la nature environnante.

Château fort de Helfenburk | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

De Zubrnice à Ústí nad Labem en petit train automoteur

Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Depuis Úštěk ou Litoměřice, il vous faudra une vingtaine de minutes à peine pour vous rendre à Zubrnice (Saubernitz en allemand). Ce charmant petit village où vivent environ 200 âmes présente de nombreuses bâtisses imposantes traditionnelles : si une partie de ces édifices datent du Moyen Age (documentés au plus loin jusqu’à la moitié du XIVe siècle), c’est aussi l’architecture folklorique faite de maisons à colombages ou à structures en bois qui ravira les visiteurs.

Le train de la ligne à voie étroite | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Ce village-musée en plein air est particulièrement bien entretenu et peut aussi être l’occasion de distraire les plus jeunes visiteurs accompagnant leurs parents : en bordure de village, se trouve ainsi un petit musée du chemin de fer mais aussi un petit train à moteur. D’avril à fin octobre, ces trains automoteurs historiques circulent tous les samedis, dimanches et jours fériés sur une ligne dont le terminus se trouve à Ústí nad Labem, chef-lieu de la région.

Zubrnice | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Et si vous souhaitez pousser un peu plus loin : Žatec et Kadaň

Žatec | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.

On comprendra que vous ayez envie de rester dans les environs de Litoměřice qui ont déjà beaucoup à offrir en termes de visite, mais pour ceux qui veulent prolonger leur séjour dans la région d’Ústí un peu plus longtemps, pour bien voir combien celle-ci est différente de la réputation imméritée qu’on lui accole parfois, il faut absolument faire un tour à Žatec, cette petite ville dont la culture locale, le houblon Saaz et ses paysages viennent d’être classés au patrimoine immatériel de l’UNESCO. Son charme désuet et son apparence encore un peu déglinguée avaient d’ailleurs séduit le réalisateur néo-zélandais Taika Waititi pour son film Jojo Rabbit sorti en 2019.

Žatec | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.
La synagogue de Žatec | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Au milieu de ces belles façades qui demanderaient quand même un petit coup de peinture s’élève, à quelques mètres de la place centrale, un splendide édifice flambant neuf : 86 ans après son abandon et sa destruction partielle lors de la Nuit de cristal, la synagogue de Žatec a été rachetée et entièrement rénovée par un entrepreneur local, Daniel Černý :

« Avant la vente aux enchères, j’ai visité les deux bâtiments, la synagogue et la maison du rabbin, j’ai tout inspecté de fond en combles. A la cave, je me suis dit que j’étais totalement fou de vouloir l’acheter. Je venais de finir de payer mon hypothèque, mais je voulais faire quelque chose de bien. Alors j’ai acheté la synagogue pour 3,8 millions de couronnes et je ne regrette pas du tout mon choix. »

Pas vraiment étonnant, mais clairement mérité, que le projet ait été désigné comme le sauvetage patrimonial de l’année 2023 par l’Institut national du patrimoine tant le résultat est bluffant. Et la maison du rabbin transformée en musée permet une visite passionnante à la découverte de l’histoire de la communauté juive locale : dans la chambre du rabbin, une projection vidéo au-dessus de son bureau montre ses mains qui écrivent, le tout accompagné d’une voix – comme si c’était la sienne – qui commente son travail.

L’exposition à la maison du rabbin | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

Plus loin, dans une autre pièce – moment émouvant – il est possible de manipuler et de lire les facsimilés de documents d’identité de Juifs de Žatec, dont la plupart ne sont pas revenus des camps ou encore d’en apprendre davantage, grâce à une carte lumineuse et interactive, sur l’évolution de la communauté et des lieux d’habitats des différentes familles de la ville au fil des ans. Un vrai effort muséographique de qualité a été réalisé dans ce lieu qui fait revivre la diversité ethnique et culturelle irrémédiablement perdue de la ville – et par extension de toute la région.

L'église de l'Exaltation-de-la-Sainte-Croix,  la colonne de la Sainte Trinité,  l’hôtel de ville | Photo: Anna Kubišta,  Radio Prague Int.

On filera ensuite à Kadaň (Kaaden en allemand), à 25 minutes de route de Žatec (et à 30 minutes supplémentaires de la frontière allemande) : ville royale et marchande au Moyen Age, tôt habitée par des Allemands appelés à peupler la ville et à la faire fructifier, elle est devenue totalement allemande après les guerres hussites qui ont dévasté le pays.

La ruelle du Bourreau est la plus étroite de Tchéquie | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.

Sous les remparts de la ville, en partie préservés, coule la rivière Ohře (Eger), où il fait bon aller prendre un verre lorsque les chaleurs estivales deviennent trop écrasantes. On ira admirer la traditionnelle place principale et sa colonne de la Sainte-Trinité, et les ruelles adjacentes dont la plupart des bâtiments ont été élégamment restaurés. D’ailleurs la ruelle du Bourreau, une des voies piétonnes qui part de la place, est – dit-on – la plus étroite de Tchéquie : 66,1 centimètres de largeur à son point le plus étroit !

Kadaň | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.
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Auteur: Anna Kubišta
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