Dopage : les sportifs tchèques plutôt favorables à la non-exclusion de la Russie des Jeux de Rio
Les premiers sportifs tchèques se sont envolés depuis Prague pour Rio dans la nuit de dimanche à lundi. Mais à désormais moins de deux semaines de l’ouverture des XXXIes Jeux d’été, l’actualité olympique reste d’abord marquée par la décision prise par le Comité international olympique (CIO) dimanche de finalement autoriser la Russie à prendre part à ce qui est censé être la grande fête du sport malgré le scandale de dopage organisé par l’Etat russe. Comme ailleurs dans le monde, cette décision controversée a suscité des réactions les plus diverses en République tchèque aussi.
Avant cela, le Comité olympique russe avait dévoilé, mercredi dernier, une liste de 387 sportifs sélectionnés dans trente sports, athlétisme compris, pour le rendez-vous olympique. Pour être présents à Rio, ceux-ci devront toutefois remplir plusieurs conditions, et notamment celle de ne jamais avoir été sanctionnés pour dopage. Entretemps, jeudi, le Tribunal arbitral du sport a rejeté l’appel des soixante-huit athlètes russes qui demandaient à être repêchés pour les Jeux après leur exclusion collective par la fédération internationale d’athlétisme (IAAF), une décision prise en juin dernier dont un certain nombre de sportifs et experts pensaient que le CIO s’appuierait dessus dimanche pour rendre son verdict.
Cela n’a pas été le cas, à la déception par exemple de la nageuse tchèque Simona Baumrtová. Celle-ci, qui est arrivée au Brésil ce lundi et qui pratique une discipline, la natation, où le dopage a toujours été très présent, a expliqué la raison de la déception que suscite chez elle la décision du CIO au micro d’un de nos collègues de la Radio tchèque :« Deux de mes adversaires parmi les plus fortes sont russes. Une d’entre-elles, qui est aujourd’hui âgée de dix-huit ans, a été contrôlé positive lorsqu’elle en avait douze… Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais ce n’est pas facile de participer aux courses et de rivaliser contre de telles adversaires. Personnellement, je suis favorable à une exclusion de tous les sportifs russes. »
Pour justifier sa décision, le CIO a expliqué que si les sportifs russes doivent assumer les conséquences de la responsabilité collective de leur pays et que, par conséquent, la présomption d'innocence ne peut leur être appliquée, en revanche la justice individuelle doit être appliquée et tout sportif doit pouvoir prouver que la responsabilité collective ne doit pas être appliquée dans son cas… Une position en porte-à-faux que le champion du monde kayak monoplace Jiří Prskavec, partisan d’accorder aux Russes le bénéfice du doute, affirme comprendre :
« Il a été envisagé de sanctionner des sportifs dont on ne peut pas être sûr qu’ils sont concernés par le dopage. Je m’efforce de me mettre à la place des sportifs propres. Si toute l’équipe tchèque se dopait mais pas moi, je serais très déçu si toute l’équipe tchèque était exclue des Jeux, car ce serait un rêve qui se brise et beaucoup de travail pour rien à cause d’une décision injuste. C’est pourquoi je pense que les choses ne devraient pas se passer de la sorte. »Si l’on s’en tient aux premières réactions, la décision prise par le CIO a été accueillie plutôt favorablement par une majorité de sportifs tchèques, nombre d’entre eux, comme Jiří Prskavec, s’efforçant de se mettre dans la peau de leurs homologues russes innocents. Le champion olympique de VTT Jaroslav Kulhavý partage lui aussi cet avis :
« Je pense qu’il faut agir, prendre des décisions et sanctionner s’il existe des preuves que des sportifs russes concrets ont triché en se dopant. Mais pour les JO, je peux comprendre qu’il est difficile d’exclure tous les sportifs d’un même pays, surtout lorsqu’il s’agit d’un pays comme la Russie. Je suis convaincu qu’il y a des sportifs russes qui sont propres. On ne peut donc pas, selon moi, les interdire de participer, mais il faut parallèlement prendre rétrospectivement les décisions qui doivent être prises s’il y a lieu. »
Du côté des dirigeants, le président du Comité olympique tchèque s’est lui aussi voulu très mesuré dans ses propos. Jiří Kejval défend la position du CIO, estimant qu’en matière de dopage, les différences sont importantes selon les disciplines sportives :
« Je pense que compte tenu de la situation dans laquelle nous nous trouvons, la décision du CIO est acceptable pour toutes les parties concernées. Le fait de laisser la responsabilité aux fédérations internationales de décider si les sportifs russes peuvent participer ou doivent être tous suspendus, comme cela est le cas en athlétisme ou en haltérophilie, est une décision qui se justifie, car les fédérations sont les mieux informées de la situation concrète dans leur sport et donc les mieux placées pour savoir ce qu’ont fait les sportifs russes par le passé et s’ils ont respecté les règles ou pas. »En somme, si les sportifs tchèques reconnaissent que si la décision d’exclure la Russie des épreuves d’athlétisme leur semble justifiée compte tenu de l’ampleur du problème dans ce milieu concret, en revanche la plupart d’entre eux tiennent à ce que le principe de présomption d’innocence soit respecté pour tous les autres sportifs dans les autres disciplines. Peut-être aussi parce que eux-mêmes savent bien que les Russes ne seront de toute façon pas les seuls dopés et tricheurs présents à Rio.