« En tchèque, la prononciation est primordiale, sinon on confond un églantier avec un suppositoire »
Est-il vraiment si difficile d’apprendre le tchèque ? Oui ! C’est du moins l’avis d’Olga Schmalzried – Podzimková, professeure de tchèque dans la région de Bruxelles depuis plusieurs années déjà. Selon elle, cependant, plus encore qu’une bonne maîtrise de la grammaire, c’est d’abord une bonne prononciation dans la langue de Comenius qui doit prévaloir. Olga Schmalzried – Podzimková était de passage à Prague mi-septembre à l’occasion de la conférence intitulée « Krajané a český jazyk » - « Les Tchèques de l’étranger et la langue tchèque ». Elle a parlé de ce qu’elle connaît sans doute le mieux, l’enseignement du tchèque en Belgique. Et elle était donc bien placée pour nous confirmer que l’apprentissage du tchèque n’est effectivement pas évident pour tout le monde :
« Mais quand j’ai commencé à des cours de tchèque à des étrangers et que j’ai dû considérer ma langue avec leurs yeux, je me suis dit : ‘Ouf, je suis contente que ce soit ma langue maternelle ». Je n’aurais pas voulu à l’avoir à apprendre. C’est pourquoi je leur tire mon chapeau. Il est bien connu que les Tchèques admirent chaque étranger qui leur dit ‘Dobrý den’ (bonjour). Ma façon de faire est d’y aller lentement mais sûrement. C’est vrai que l’analyse est très importante en tchèque. Il faut savoir quel mot est le sujet et quel autre l’objet. Mais les francophones font aussi des erreurs avec les accords du participe passé notamment quand l’objet précède le sujet. Là, je suis très forte parce que, grâce au tchèque, j’ai l’habitude d’analyser la structure des phrases. Mais il faut surtout que cet apprentissage se fasse dans la gaieté. Les gens viennent au cours à sept heures du soir après leur travail, il faut donc qu’ils s’amusent et que ce soit intéressant. Et moi, parce que c’est un travail que j’adore, ‘je les emporte dans les courants’ et je pense qu’ils repartent deux heures plus tard moins fatigués qu’ils ne sont arrivés au cours. »
« Pour moi, il est aussi très enrichissant d’observer quel regard ces étudiants étrangers portent sur ma langue. C’est vraiment un échange. Et depuis toutes ces années que je donne des cours, j’ai appris une chose : la grammaire, d’accord, est importante. Mais si on fait des erreurs grammaticales, ce n’est pas grave, on peut comprendre. Si je dis ‘vidím Praha’ au lieu de ‘vidím Prahu’– ‘je vois Prague’, tout le monde me comprendra. Certes, on dira que je ‘parle comme un Tatar’ (je ne sais pas s’ils n’ont pas de grammaire, mais c’est ce que nous disons), mais si je prononce mal, on ne comprendra rien du tout. Par exemple ‘rada’ signifie ‘conseil’, alors que ‘ráda’ (elle accentue la longueur du premier ‘a’, ndlr), c’est une femme qui est contente. Ce n’est donc pas du tout la même chose. De même, ‘šípek’ (prononcez ‘chïpéque’) est un églantier, tandis que ‘čípek’ (prononcez ‘tchïpéque’) est un suppositoire… Il ne vaut donc mieux pas se tromper, hein ? En tchèque, la prononciation est vraiment la base de tout. Il faut surtout tenir les longueurs. Nous avons peu de voyelles par rapport au français, mais toutes les voyelles sont ouvertes. Il faut donc bien ouvrir les poumons, comme un accordéon, pour aérer… et c’est tout ! »Rediffusion du 09/10/2014