En Tchéquie aussi, vers une interdiction des châtiments corporels infligés aux enfants
A l’instar d’autres pays, comme la France, et alors que le Comité européen des droits sociaux appelle les Etats à légiférer, la Tchéquie pourrait bientôt interdire la fessée et tous autres châtiments corporels contre les enfants. C’est en tout cas le sens d’un amendement au Code civil approuvé par le gouvernement de Petr Fiala et qui doit maintenant être soumis au Parlement.
La plupart des États membres de l’ONU ont déjà entériné cette mesure, comme l’exige la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant. Selon eux, les châtiments corporels sont contraires à la dignité humaine.
La Tchéquie est l’un des derniers pays où cette interdiction n’est pas inscrite dans la loi. Un état des choses qui pourrait bientôt être amené à changer après le feu vert de la coalition gouvernementale. Une évolution que Klara Šimáčková Laurenčíková, commissaire aux droits de l’Homme au sein du gouvernement, accueille avec satisfaction :
« Il s’agit d’un message important pour la société dans son ensemble et pour tous les adultes qui élèvent des enfants dans leur famille ou qui travaillent avec eux dans le cadre de leur profession. Toutefois, le plus important est d’intégrer ce message dans la législation. Dans les pays qui, bien avant nous, ont déjà inscrit dans la loi le caractère inacceptable des châtiments corporels et autres traitements dégradants infligés aux enfants, on constate effectivement une diminution progressive de la violence dans les relations étroites au sein des familles, ainsi qu’une baisse de l’agressivité dans les groupes d’enfants. Ce sont des conséquences prouvées : une société qui s’exprime clairement sur cette question envoie un message clair. Les personnes qui ont elles-mêmes grandi dans une atmosphère de violence ou qui ont été l’objet de fréquentes punitions physiques n’ont souvent pas les outils nécessaires pour réguler la colère et le stress chez leurs propres enfants, mais aussi en elles-mêmes. »
Preuve que cette interdiction ne va pas de soi dans la société tchèque où les châtiments corporels restent banalisés, le ministre de la Justice Pavel Blazek a tenu à préciser : « Cela ne signifie pas que si un parent se trouve à un arrêt de bus avec un enfant, qu’il lui parle d’une certaine façon et que les gens autour n’apprécient pas, ils pourront appeler la police. L’État ne va pas interférer dans l’éducation des familles plus qu’aujourd’hui. »
Ainsi, dans la pratique, cela ne signifie pas que l’État poursuivra des parents pour une tape occasionnelle sur la main, comme de nombreux opposants le craignent. Les législateurs et les experts espèrent avant tout que ce changement aura un effet préventif et dissuasif. L’amendement vise surtout à sensibiliser les parents au fait qu’il existe d’autres moyens d’exercer son autorité sur un enfant.
Une enquête menée l’an passé auprès des médecins de la clinique psychiatrique de l’Hôpital général universitaire de Prague a montré que près de 58 % des parents avaient déjà eu recours à des châtiments corporels contre leur enfant, les parents de grandes fratries et les jeunes couples étant les plus susceptibles d’y recourir. En outre tous les ans, ce sont des centaines, voire des milliers d’enfants en Tchéquie qui contactent le numéro spécial d’urgence qui leur est destiné en cas de violences physiques. Quelque 500 enfants y font également appel pour cause de violences psychologiques.
La législation actuelle stipule que « les mesures éducatives ne peuvent être utilisées que sous une forme et à un degré appropriés aux circonstances, qui ne mettent pas en danger la santé ou le développement de l’enfant et qui ne portent pas atteinte à sa dignité humaine. » Il sera désormais précisé que les châtiments corporels, les contraintes mentales et autres mesures humiliantes portent atteinte à la dignité humaine de l’enfant.
L’amendement en question sera désormais soumis à l’approbation du Parlement. Il pourrait entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2025.