En un an, l’école en ligne n’a pas vraiment convaincu les Tchèques
Depuis la première fermeture des écoles il y a bientôt un an, la plupart des élèves en République tchèque ont passé la majorité de leur temps à la maison, suivant les cours à distance. Face à l’usure croissante, le ministre de l’Education peine à trouver une solution consensuelle.
C’est désormais une routine que les étudiants tchèques et leurs professeurs connaissent bien : se connecter à un logiciel de réunion en ligne, vérifier que le partage d’écran fonctionne bien, allumer si possible sa caméra et veiller à ne pas laisser son micro ouvert. Il faut dire qu’ils ont eu le temps de s’y faire.
Après une première expérience de l’enseignement à distance lors du premier confinement, et un bref retour dans les établissements en septembre, la majorité des élèves sont repassés au régime distanciel à l’automne. Et depuis la fin des vacances de Noël, à l’exception des écoles maternelles, des écoles dites spéciales (fréquentées par des élèves présentant un handicap mental plus ou moins important) et des deux premières classes du primaire, c’est uniquement en ligne que l’année scolaire se poursuit.
Martina Kubičková est professeure de français et d’éducation physique au gymnasium de Jindřichův Hradec, en Bohême du Sud. Comme ses collègues, elle a été contrainte de s’adapter pour continuer à faire progresser ses élèves. Après plusieurs mois de cette expérience inédite, elle en dresse un bilan plutôt mitigé :
« Ce n’est pas aussi bien que quand on est à l’école, mais je pense que cela fonctionne quand même. Certains élèves, ceux qui sont motivés, progressent malgré tout. Peut-être même préfèrent-ils ce type d’enseignement. Mais dans l’ensemble, il faut bien reconnaître que les élèves moins motivés sont beaucoup plus nombreux. ».
Elève de Martina Kubičková, Viola fait partie des motivés. Elle estime « être mieux à la maison qu’à l’école pour préparer mes examens ».
Viola est une « maturantka », une lycéenne qui, en mai prochain, si rien ne change d’ici-là, passera sa « maturita », l’équivalent tchèque du baccalauréat. S’il est d’ores et déjà acquis que les restrictions ne seront pas assouplies avant début mars, le ministre de l’Education, Robert Plaga, envisage néanmoins de laisser les élèves de dernière année rependre leurs cours. Probablement à compter du 1er mars.
Condition sine qua non, les élèves et leurs professeurs devront se soumettre tous les sept à quinze jours à un test salivaire auto-administré. La mesure concernerait près de 100 000 élèves et 30 000 professeurs et autres employés scolaires.
Dans une deuxième phase, un programme de dépistage régulier encore à l’étude pourrait permettre à 150 000 autres élèves du secondaire de reprendre le chemin de l’école. Une priorité désormais aux yeux du Premier ministre Andrej Babiš, alors que beaucoup lui reprochent de ne pas s’être préoccupé plus tôt et davantage du maintien ou de la réouverture des écoles :
« Il est extrêmement important que les enfants puissent retourner à l’école et refaire du sport. Nous devons trouver une solution, en dépit du niveau du risque épidémiologique et du nombre d’hospitalisations. Nous devons aussi réfléchir sur la logistique des tests dans les écoles, où même des tests PCR pourraient être effectués gratuitement. Nous essayerons d’organiser, dans un délai que je ne peux pas encore préciser, le retour progressif de tous les élèves et étudiants. Il faut bien préparer ce retour qui, évidemment, représente un grand risque. Mais il n’y a pas d’autre solution, car la pandémie a des conséquences très graves pour la jeune génération. »
Autre chantier en cours pour le ministre de l’Education : l’allègement des examens de fin de cycle secondaire que réclament un certain nombre d’élèves et d’enseignants.
Le moral, de plus en plus en berne, des étudiants de l’enseignement supérieur pose question lui aussi. Eux ont réussi leur baccalauréat, mais leur sort n’en reste pas moins incertain, ne sachant toujours pas quand ils peuvent espérer revoir un amphithéâtre. Le 31 janvier dernier, l’hebdomadaire Respekt consacrait un dossier aux étudiants de première année qui, jusqu’à présent, n’ont pratiquement connu que des visioconférences.
Le magazine rapportait plusieurs parcours : Sofie, 20 ans, étudiante à la Faculté des sciences humaines de l'Université Charles qui n’a pu faire connaissance avec ses camarades de promotion que le temps d’un séminaire ; Daniel, 19 ans, qui organise des réunions virtuelles et utilise les jeux-vidéo multi-joueurs pour garder le contact avec ses amis.
Beaucoup racontent la difficulté de trouver un juste milieu entre une surcharge de travail et l’apathie totale. Pour ces étudiants, difficile donc de se projeter, et même tout simplement de s’intégrer dans ce nouvel univers qu’est l’université.