Eurosceptique, la République tchèque ?
Eurosceptique, la République tchèque ? Voilà la question à laquelle nous avons cherché une réponse avec Elsa Tulmets, chercheuse française qui étudie l’Union Européenne et l’intégration des pays membres à l’Institut des Relations Internationales de Prague.
Cette question est d’autant plus d’actualité que le pays préside l’Union Européenne depuis le 1er janvier dernier. En cause, notamment, le comportement du président de la République Václav Klaus, qui avait refusé d’accrocher le drapeau européen sur le château de Prague ou qui s’était même déclaré « dissident de l’Union Européenne ». Dans un entretien réalisé par un collaborateur externe de Radio Prague, Elsa Tulmets incite pourtant à ne pas se focaliser sur la personnalité du président.
« Il faut avoir conscience que le Président Václav Klaus essaye de mobiliser les médias, il essaye de faire en sorte que les médias s’intéressent à sa personnalité, par le biais de ses déclarations. Il n’est pas très représentatif de la population tchèque : si on regarde les sondages européens, au moins la moitié de la population tchèque s’intéresse aux questions européennes et est satisfaite de l’adhésion de la République tchèque à l’Union Européenne. »Loin d’un front uni contre l’Union Européenne, Elsa Tulmets observe au contraire des clivages et des positions divergentes sur la scène politique tchèque, entre les partis et au sein des partis, à propos des questions européennes. Il y a ainsi une « polarisation » de la vie politique à propos de l’Union Européenne.
« Cette polarisation a lieu aussi bien au niveau des partis politiques, mais aussi entre des personnalités et même au sein de certains partis politiques, on remarque des tendances différentes sur les questions européennes. Même au sein du gouvernement de coalition, on remarque que l’ODS d’un côté a plutôt tendance à être « euro-réaliste », comme les hommes politiques eux-mêmes se définissent, et d’autres hommes politiques, du parti des Verts ou du parti chrétien-démocrate, eux sont vraiment pro-européens et l’affirment haut et fort. Même au sein du gouvernement de coalition, il y a des divisions sur ces questions. L’ODS a toujours affirmé être pour une Europe libérale, une Union Européenne ouverte, il prône aussi l’élargissement à d’autres pays candidats (Balkans occidentaux, Turquie, etc.). Donc dans l’actuelle discussion sur la crise économique et financière, on remarque aussi des positionnements très forts à ce niveau-là, très différents entre les partis politiques et au sein de la coalition gouvernementale, des manières d’analyser la situation qui ne sont pas exactement similaires. »
Egalement occulté par ce débat sur « l’euroscepticisme » figure le programme de cette présidence de l’Union Européenne. Pour ces six mois, la Tchéquie a en effet élaboré un programme précis, qu’elle tente de mettre en œuvre depuis janvier.
« C’est une approche assez spécifique que la République tchèque essaye de défendre. Lorsque l’on s’intéresse à l’idée principale défendue par la présidence tchèque, c’est celle d’une Europe sans barrières, qui a tendance à contredire celle défendue par d’autres Etats, notamment d’une Europe protectrice qui a été défendue par la présidence française de l’Union Européenne. La campagne de communication sur la présidence tchèque a été reformulée à la fin de l’année 2008, autour de ces « trois E », c’est-à-dire Economie (la gestion de la crise économique et internationale), Energie (les questions d’environnement, de climat et d’approvisionnement en gaz dans l’Union Européenne) et l’Europe dans le monde. »