Fragilités : une nouvelle exposition dans la galerie du Rudolfinum
Ce jeudi 20 octobre s’ouvre au public l’exposition ‘Fragilités’ au Rudolfinum jusqu’au 8 janvier 2023. C’est un projet mené depuis deux ans qui voit le jour dans ce bâtiment mythique pragois. On y retrouve les œuvres de 17 artistes d’origines diverses, dont Susanna Fritscher :
« Mon nom est Susanna Fritscher, je suis artiste, invitée dans cette ambitieuse exposition ‘fragilités’ à la Galerie du Rudolfinium. Mon nom le dit un peu, je suis d’origine autrichienne, mais je suis arrivée très jeune en France où j’ai fait mes études. Je vis toujours à Montreuil en banlieue parisienne où j’ai mon atelier. C’est vraiment la France qui a porté mon travail d’artiste. »
Pouvez-vous présenter votre œuvre ?
« L’œuvre est intitulée ‘Open to the sky’. C’est une œuvre qui est composée de filaments, d’une matière qui est presque sans poids, qui est ultra légère, très fine et transparente, et qui emplie l’espace. Elle est tellement légère qu’elle se soulève au moindre courant d’air, et par la transparence, par cette lumière extrêmement lumineuse, elle capte aussi la lumière, elle n'est pratiquement visible que par le fait d’étinceler à la lumière et le fait de se soulever à l’air.
Quand Elena Sorokina et Silvia Van Espen, les curatrices de cette exposition sont venues vers moi, il y avait un prototype dans mon atelier, mais c’est une œuvre inédite que je n’ai jamais encore montée, c’est une œuvre un peu sœur ou qui découle d’une autre qui s’appelait ‘Frémissements’, exposée au centre Pompidou, mais pour laquelle le matériau était quand même autre. »
Elena Sorokina est la co-curatrice de cette exposition ‘Fragilités’ :
« C’est une exposition sur laquelle on a commencé à travailler il y a deux ans. Nous avons compris à quel point c’est quelque chose qui anime les artistes, qui est important pour les artistes et qui est aussi important pour le ressenti que l’on a tous eu pendant le covid, et on a donc commencé à réfléchir ensemble, sur ‘qu’est-ce que c’est finalement la fragilité’, parce que l’on pense la connaitre, tout le monde sait, chacun peut imaginer et ressentir ce que c’est, mais, finalement est-ce qu’on la connait vraiment ? On s’est posé cette question, et on a posé cette même question à des artistes. »
Comment avez-vous choisi les artistes qui sont exposés aujourd’hui ?
« En fait, le choix des artistes, c’est vraiment presque comme si on demandait à un artiste ‘comment est-ce que tu peinds ton tableau ?’. En fait c’est un processus qui constitue finalement le cœur du travail de commissaire, c’est-à-dire connaitre les artistes, connaitre leur travail en profondeur, à voir quel rapport peut-on constituer entre l’univers de chaque artiste et la préoccupation de commissaire. C’est un processus finalement très long, parce que l’on pose souvent cette question, ‘comment est-ce que vous avez choisi les artistes, est-ce que les artistes vous ont couru après pratiquement etc.’ En fait c’est vraiment notre travail. C’est comme l’artiste qui travaille la peinture, donc on réfléchit, c’est intuitif, c’est intellectuel, c’est basé sur la connaissance, c’est aussi basé sur le ressenti de chaque commissaire. En fait c’est quelque chose de très complexe. »
Comment avez-vous choisi le lieu du Rudolfinum pour cette exposition ?
« C’est le Rudolfinum qui nous a invités à faire une proposition. J’avais déjà en tête ce thème de fragilité qui m’a beaucoup intéressé depuis un moment. Surtout au départ, c’était la fragilité dans la sculpture, donc des matières, à la fois fragiles ou bien qui évoquent, qui transmettent la fragilité, ce qui n’est pas la même chose. Et donc c’est à partir de cette rencontre quelque part, mon intérêt profond pour ce sujet et le désir de l’institution de faire une exposition avec nous, que les choses se sont passées. »
Comment avez-vous réussi à relier toutes ces œuvres de tous ces artistes différents ?
« Il y en a plusieurs. Je vois les expositions comme vraiment des tissus, c’est plutôt du tissage pour moi, plus qu’un seul fil. Il y a beaucoup de choses qui se rencontrent en fait, donc il y a des liens. J’adore construire des liens, donc dans chaque exposition il y a des liens visibles, invisibles, évidents, moins évidents, et donc chaque exposition est un univers, est un petit monde, avec toutes ces énergies, avec tous ces liens, et c’est cela qui est fascinant.
Ici, je pourrais vous en parler pendant deux heures de tous les liens, et ce ne serait pas suffisant. Mais par exemple, si l’on simplifie les choses, il y a un cœur historique avec des artistes femmes, d’après-guerre. Donc à partir de ces artistes qui travaillaient l‘organicité, et c’est quelque chose qui était très important à l’époque, et c’est très important pour nous, parce qu’en fait, cela ne correspondait pas à la mode, à des tendances de l’abstraction de l’époque de l’après-guerre, de l’abstraction géométrique. Donc ces femmes qui travaillent l’organicité, qui travaillent leur corps, qui sont fascinées de voir comment leur corps est fragile, qui travaillent aussi l’empreinte directe comme sculpture. Il y a une autre chose aussi qui relie ces femmes, c’est justement le fait qu’elles aient été reconnues tardivement. Parce que leur travail, pour leur époque, c’était tellement innovant, il était tellement révolutionnaire, donc expérimental, que la reconnaissance pour elles est venue très tardivement. Et donc je parle de Alina Szapocznikow, Geta Brătescu, Maria Bartuszová, Louise Bourgeois, et Anna Zemánková bien sûr, qui est une artiste qui est née en République tchèque. »
Est-ce que certaines œuvres ont été créées spécialement pour cette exposition ou est-ce que vous avez présenté des œuvres déjà existantes ?
« La plupart des œuvres sont des œuvres déjà existantes, mais il y a quand même par exemple l’œuvre de Dominik Lang, qui a créé une situation spécialement pour l’exposition, donc cette ouevre est basée sur une pièce qu’il a déjà exposée qui s’appelle ‘Sleeping City’, il a déjà montré cette pièce à la Biennale de Venise en 2011, et il nous a proposé autre chose, qui est plus dans le dialogue, plus connecté à ce que nous nous cherchions, donc quelque chose de plus animé finalement, mais c’est une œuvre qui existait déjà avant. Sinon concernant les autres œuvres, il y a des installations que l’on réactive, mais la plupart des œuvres sont déjà existantes. »
https://www.galerierudolfinum.cz/en/exhibitions/upcoming-exhibition/fragilites/
