George W. Bush à Bratislava
Après l'Allemagne, la Slovaquie : le président américain est arrivé mercredi à Bratislava, où il s'est entretenu, jeudi, avec le président russe Vladimir Poutine. C'était la toute première fois qu'un président américain se rendait dans la capitale slovaque.
La Slovaquie a dépensé près de huit millions d'euros pour cette rencontre au sommet. Mais pour de nombreuses personnes de cette ville de 450 000 habitants, les retombées positives sur la notoriété de leur capitale et de leur pays valent bien quelques sacrifices. Le point de vue d'un Slovaque sur la présence du président américain dans son pays :
« Je pense que c'est un vrai coup de projecteur sur la Slovaquie et que c'est une façon de se faire un maximum de publicité. C'est bon à la fois pour la Slovaquie et pour l'ensemble de l'Europe, qui va acquérir une autre position. Et la Slovaquie aussi pourra ainsi atteindre un niveau supérieur, au niveau de l'information. Les gens vont apprendre plus de choses à propos de cette région. »C'est la première fois qu'un président américain foule le sol slovaque, un peu plus de douze ans après la création de ce jeune Etat, suite à la partition de la Tchécoslovaquie. Un évènement important pour ce fidèle allié de Washington, comme le souligne Jacques Rupnik, directeur de recherche au CERI de Paris :
« L'importance pour la Slovaquie est énorme. Un pays qui a été créé en 1993, qui s'est établi comme état indépendant... C'est un signe de reconnaissance vis-à-vis du pays, mais aussi vis-à-vis de son parcours, c'est un pays qui a connu quelques difficultés - c'est un euphémisme - sur le plan de la démocratie dans une première phase. Et puis qui, ces dernières années, a retrouvé un second souffle, et les changements démocratiques ont été assez impressionnants. Elle est là, la reconnaissance de la Slovaquie. »
Un sommet qui viendrait récompenser les efforts de la Slovaquie ? Pour l'ancien dissident tchèque et écrivain Ivan Klima, présent lui aussi pour l'occasion, le choix de la cité danubienne pour un tel sommet est pleinement justifié :« Je pense que c'est une façon d'encourager le gouvernement démocratique slovaque qui s'est lancé dans des réformes courageuses. La décision de Bush d'organiser cette rencontre à Bratislava est une façon d'approuver publiquement cette politique de réformes en Slovaquie. »
Un avis partagé par un autre ancien dissident tchèque, le diplomate Alexander Vondra :
« La situation est telle à l'heure actuelle que si j'avais été à la place de Bush ou de Poutine et que j'avais dû décider de l'endroit, j'aurais bien sûr choisi Bratislava plutôt que Prague. Ici, l'atmosphère est agréable, écouter les hommes politiques ici est un plaisir, c'est aussi un plaisir de voir ce que fait le gouvernement, comment il réforme la société. Il a une vision, un programme et il est prêt à l'appliquer. C'est la grande différence. A Prague, on peut bien manger, on peut s'intéresser à la culture, mais la politique, c'est ici qu'elle se fait comme il se doit. »
Alors, ce succès de la Slovaquie ferait-il de l'ombre à la République tchèque ? Prague est-elle en train de perdre du terrain sur Bratislava ? Jacques Rupnik :
« Il n'y a pas de véritable rivalité, peut-être une émulation entre les deux. C'est vrai que si vous prenez la situation au moment du divorce, les Tchèques pensaient que, eux, étaient plus avancés dans la démocratie et l'économie de marché, et que la Slovaquie allait vers un autoritarisme nationaliste. Dix ans après, ils sont entrés ensemble dans l'Union européenne, et c'est plutôt la Slovaquie qui donne l'impression d'être beaucoup plus dynamique dans les réformes, alors que la situation tchèque est beaucoup plus bloquée, empêtrée dans des difficultés politiques. Il y a un dynamisme ici en Slovaquie qui n'existe pas à Prague. Donc c'est un retournement inattendu, en tout cas pour les Tchèques. »