Il y a 77 ans, la tragédie de Lidice, cet Oradour-sur-Glane tchécoslovaque
Alors que la France commémore, ce lundi, le 75e anniversaire du massacre d’Oradour-sur-Glane, les Tchèques se souviennent, ce même jour, des victimes de la tragédie de Lidice. Ce village de 500 habitants situé non loin de Prague a été rasé deux ans avant le massacre de la commune de Haute-Vienne, le 10 juin 1942.
Un mémorial a été construit à l’emplacement de la commune rasée, tandis qu’un nouveau village a été construit, dans les années 1950 et 1960, un peu plus loin du lieu du drame. Directrice du Mémorial de Lidice, Martina Lehmannová explique pourquoi dans une émission de la Télévision tchèque :
« Lorsque les femmes de Lidice, déportées à Ravensbrück et survivantes de la marche de la mort, sont rentrées à la fin de la guerre, elles savaient que leur village avait été détruit. Mais elles s’attendaient à voir des ruines de maisons. Or, quand elles sont arrivées à Lidice, ce fut un choc, car il n’y avait strictement rien, même pas les restes d’un seul mur, rien, juste un vaste champ. Lorsqu’un mémorial a été érigé plus tard à l’emplacement du village, ses auteurs ont trouvé important de conserver ce vide, cet espace sans bornes. Cela mobilise l’imagination des visiteurs. Ils se demandent comment était le village et comment étaient les gens qui y habitaient. Les réponses ne viennent pas facilement. »
La tragédie de Lidice suscite une vague d’émotion et de solidarité dans le monde entier. Plusieurs villes et villages au Pérou, au Venezuela, au Mexique, aux Etats-Unis ou encore en Israël changent de nom et décident de se rebaptiser au nom du village tchèque meurtri. De surcroît, un peu plus de 500 femmes, originaires pour la plupart de pays d’Amérique latine, s’appellent Lidice de leur prénom. En juin 2017, six d’entre-elles se sont déplacées en Tchéquie pour commémorer les victimes du massacre.La mobilisation en faveur des rescapés de Lidice, celle qui a permis de construire le nouveau village, a été initiée par le médecin et homme politique britannique Barnett Stross, originaire de la ville de Stoke-on-Trent, comme nous le raconte Martina Lehmannová :
« Le 12 juin 1942, soit deux jours après le massacre, il a lancé un appel en faveur de la construction d’un nouveau village de Lidice. Il a réussi à récolter des milliers de livres sterling à cet effet. En août 1945, un appel d’offres pour la construction du village a été lancé par les autorités tchécoslovaques - le premier du genre dans le pays après la Libération. En 1947, Barnett Stross est venu en Tchécoslovaquie pour assister à la pose de la première pierre du nouveau village de Lidice. Parallèlement, un musée du mémorial de Lidice a été fondé. Les familles des victimes ont été nombreuses à offrir au musée tout ce qui était lié à l’ancien village : des objets personnels des habitants, des photographies et documents. »L’histoire du village martyr a ému et inspiré plusieurs plasticiens, tels que Gerhard Richter, Joseph Beuys ou Wolf Vostel. Leurs œuvres sont au cœur d’une collection unique d’œuvres d’art du monde entier qui est à voir à la Galerie de Lidice, aménagée dans l’une des maisons du nouveau village. La création de cette collection a d’ailleurs été initiée par Barnett Stross. Le Britannique a laissé encore une trace à Lidice où il se rendait régulièrement jusqu’à sa mort en 1967, une roseraie :
« Les roses ont été plantées ici dès 1955. Barnett Stross a choisi les roses, parce qu’elles sont belles et fleurissent justement au mois de juin. Cette roseraie est devenue un véritable symbole de Lidice. Il est comme un pont de paix et d’amitié comme il fut jadis appelé, car il relie le nouveau Lidice à l’emplacement de l’ancien village. »Situé à une vingtaine de kilomètres au nord de Prague, non loin de la ville de Kladno, le site de Lidice est accessible toute l’année. De nombreux événements sont organisés par le mémorial, de même qu’un concours annuel de dessin destiné aux enfants du monde entier.
http://www.lidice-memorial.cz/
https://www.mdvv-lidice.cz/en/