Illustration : le monde féérique de Helena Zmatlíková
C’est une des illustratrices tchèques les plus emblématiques de livres pour enfants : née il y a 100 ans, Helena Zmatlíková a marqué, par ses dessins, l’esprit de plusieurs générations de petits lecteurs. Le château de Chvaly, à Prague, présente sa rétrospective, préparée par son fils Ivan Zmatlík.
« Ma mère dessinait depuis toute petite. A l’école, elle n’était pas une bonne élève : au lieu de suivre les cours, elle dessinait ses camarades de classe et ce qu’elle voyait par la fenêtre ».
Metteur en scène et dramaturge, Ivan Zmatlík raconte que sa mère Helena était, elle aussi, attirée par le théâtre :
« Elle voulait devenir actrice, comme sa mère. Pendant la guerre, elle a appris le métier de couturière et a étudié les arts appliqués. Elle faisait de la céramique par exemple et proposait aux journaux ses dessins humoristiques, tout en suivant des cours de théâtre donnés par la célèbre comédienne du Théâtre national Eva Vrchlická. A un moment donné, ma mère a même été tentée par le métier de monitrice de ski, mais finalement, peu avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale, elle a trouvé du travail à la maison d’édition Melantrich. Son directeur a révélé le talent de ma mère et lui a suggéré de se consacrer pleinement aux arts plastiques. »
Formée notamment à l’école des beaux-arts privée, fondée à Prague dans l’entre-deux-guerres par l’artiste ukrainien Grigori Moussatov, Helena Zmatlíková a construit sa carrière au sein de la plus importante maison d’édition tchèque de livres pour enfants, Albatros. Pendant 50 ans, elle a illustré près de 270 livres, dont les Aventures de Pinocchio, Le Petit Prince, mais surtout Les enfants de Bullerbyn, Fifi Brindacier et autres œuvres encore d’Astrid Lindgren.
Si les illustrations de Helena Zmatlíková ont grandement contribué à la popularité de la romancière suédoise en Tchéquie, elles sont également inséparables de l’œuvre de l’écrivain tchèque Eduard Petiška. Ses personnages aux grands yeux, humains ou animaliers, ont séduit des lecteurs même à l’étranger, comme nous le raconte Ivan Zmatlík :
« Ses illustrations sont très appréciées par exemple au Japon. Le livre d’Eduard Petiška sur un petit garçon qui observe, tout au long de l’année, le pommier de son jardin, y est régulièrement réédité depuis cinquante ans. Un jour, ma mère avait rencontré une délégation japonaise et leur a demandé ce que les Japonais trouvaient de particulier sur ce livre. Ils ont répondu qu’ils aimaient bien que ce soit l’histoire d’un pommier concret et non pas de tout un verger, comme ce serait probablement le cas au Japon. Mais les livres illustrés par ma mère ont été traduits dans de nombreuses autres langues, en anglais et dans les langues slaves bien sûr. Ils ont été publiés dans les pays scandinaves et baltes mais aussi en Corée. »
« On me demande souvent si ma mère dessinait pour moi, quand j’étais petit, mais non, jamais. En revanche, elle corrigeait avec beaucoup de soin mon écriture quand j’ai commencé ma scolarité. Souvent, elle prenait le pinceau et recouvrait de couleur blanche toutes les imperfections. »
Décédée en 2005 à l’âge de 81 ans, Helena Zmatlíková avait rarement l’occasion de montrer ses illustrations originales au public. L’exposition qui se tient jusqu’au 12 mai prochain au château de Chvaly, dans le quartier pragois de Horní Počernice, retrace sa carrière de plasticienne depuis les années 1940 jusqu’au début du nouveau millénaire. Un espace de jeu et de dessin, inspiré des livres d’Astrid Lindgren, y a été aménagé.