Jiří Šedivý, premier « Européen de l’Est » chargé de diriger l’Agence européenne de défense
Ancien ministre de la Défense et ancien représentant de la République tchèque auprès de l’OTAN, Jiří Šedivý a été nommé, la semaine dernière, nouveau directeur exécutif de l’Agence européenne de défense (AED). Spécialiste des questions de sécurité européenne et transatlantique, Jiří Šedivý deviendra, à compter du mois d’avril, le premier Européen de l’Est à prendre les commandes de cette structure dont la mission consiste à soutenir la politique de sécurité et de défense commune de l’Union européenne.
« Un grand succès pour la diplomatie et la défense tchèques ! Une excellente nouvelle aussi pour la coopération européenne en matière de défense. » C’est en ces termes, sur son compte twitter, que le ministre des Affaires étrangères, Tomáš Petřiček, a annoncé, en fin de semaine dernière, la nomination de Jiří Šedivý.« Son expérience diplomatique et ministérielle et sa profonde connaissance du domaine de la défense et de la sécurité européenne et transatlantique en font le candidat idéal pour diriger l’AED dans les prochaines années », a pour sa part commenté Josep Borell, le Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, lequel assure la présidence de l’agence, qui emploie quelque 140 personnes à Bruxelles.
Ancien diplomate âgé de 56 ans, Jiří Šedivý, qui succèdera à l'Espagnol Jorge Domecq à la tête de cette structure qui chapeaute les projets coopératifs en matière de défense européenne de vingt-six Etats membres – à l’exception du Danemark – et les aide à développer les ressources militaires, possède, il est vrai, un curriculum vitae bien fourni.
Avant d’avoir rempli, depuis 2012 et jusqu’à l’année dernière, les fonctions de représentant de la République tchèque auprès de l’OTAN, Jiří Šedivý, diplômé de l’Université Charles à Prague et du département polémologie (War Studies) du King’s College de Londres, a notamment dirigé l’Institut des relations internationales relevant du ministère des Affaires étrangères avant d’enseigner au Centre européen d’études de sécurité George C. Marshall, en Allemagne. Nommé en 2006 ministre de la Défense, puis, l’année suivante, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, il est ensuite rapidement devenu secrétaire général adjoint de l’OTAN en charge de la politique de défense. C’est donc un authentique expert qui a été retenu par les représentants des pays membres.
Invité de la Télévision tchèque lundi, Jiří Šedivý, dont la nomination fera de lui un des Tchèques les plus haut placés dans la hiérarchie de l’UE, s’est exprimé sur les différents sujets qui font l’actualité européenne, à commencer, bien entendu, par le coronavirus. Le futur nouveau directeur exécutif de l’AED s’est dit convaincu que l’Europe n’était pas affaiblie, à ses yeux, par la propagation de la maladie :
« Je pense que c’est tout un ensemble de choses et un concours de circonstances. Bien sûr, il y a les retombées du coronavirus qui captivent et détournent dans une certaine mesure l’attention politique, mais qui influencent aussi toute une série d’activités de structures de l’UE, comme par exemple celles du Parlement européen. Puis il y a la nouvelle vague de migration et l’incapacité à se mettre d’accord sur les mesures à prendre ne concourt pas à faire en sorte que l’UE soit capable de protéger plus activement ses intérêts et d’exprimer sa capacité d’action. »
Toujours à propos du coronavirus, Jiří Šedivý a confirmé que les médecins militaires tchèques étaient très demandés en Europe. L’Armée dispose en effet d’une unité d’élite spécialisée dans la protection contre les armes de destruction massive, que celles-ci soient biologiques, radiologiques, nucléaires ou chimiques. Selon lui, le Centre de protection biologique basé à Těchonín (http://www.army.cz/en/armed-forces/organisational-structure/general-staff/biological-defence-department-at-techonin-61370/), dans le nord-est du pays à proximité de la frontière avec la Pologne, qui compte parmi les mieux équipés en Europe et où se trouvait autrefois un laboratoire du Pacte de Varsovie sur les agents infectieux, est conçu pour faire face à des menaces bien plus graves que celle du coronavirus.« Nous ne sommes jamais dans une situation complètement sûre, il y aura toujours des menaces qui pèseront sur notre sécurité. Néanmoins, nous sommes très loin d’une situation où l’existence de l’Europe serait menacée. La paix règne en Europe depuis 1945 et les menaces aujourd’hui sont différentes de celles de l’époque. Elles sont de plus en plus souvent de caractère non militaire, elles sont reliées aux nouvelles technologies et se passent dans l’espace cybernétique. Mais je peux dire que nous sommes bien protégés. »
Premier représentant d’un pays ayant appartenu à l’ancien bloc soviétique à être nommé aux fonctions de directeur exécutif de l’AED, Jiří Šedivý, appelé à rester en poste jusqu’en 2025, a reconnu que la Russie, sans avoir besoin pour cela de recourir à la force militaire, continuait de représenter une menace pour la sécurité européenne et pour l’ensemble de la démocratie occidentale.
Et ce à la différence notamment de la Turquie, « un membre dans tous les cas très problématique, mais qui en aucun cas ne devrait être exclu de l’OTAN, sous peine de représenter à l’extérieur de l’Alliance un problème bien plus grand. »