Juncker à Prague: pas de reprise avant 2010
Le premier ministre tchèque et président du Conseil de l'UE, Mirek Topolánek, a reçu ce jeudi à Prague le premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker. M. Juncker est par ailleurs le président permanent de l’Eurogroupe, le groupe des pays ayant adopté la monnaie unique. Parmi les sujets abordés entre les deux chefs de gouvernement : la préparation du sommet de printemps de l’Union européenne qui se déroulera les 19 et 20 mars 2009 à Bruxelles et celle de la réunion au sommet du G20 qui aura lieu à Londres le 2 avril, ainsi que les questions économiques actuelles, en gros - la crise.
« Je dois dire que les différentes prévisions vont chaque jour en se détériorant. La crise finanicière et économique a ceci de particulier que pour la première fois dans l’histoire économique, elle peut être observée partout et en même temps. Si nous n’arrivons pas à faire en sorte que le flux du crédit recommence à circuler normalement, nous n’arriverons pas à juguler les effets de la crise économique. Si la réglementation nouvelle se met en place et si les programmes conjoncturels des deux côtés de l’Atlantique commencent à produire graduellement leurs effets je crois pouvoir dire que les premiers signes de reprise pourront être observés vers la fin de l’année 2010. Mais la reprise sera d’abord timide avant de prendre de l’importance. »
Limiter les plans de relance pour ne pas plomber les finances publiques : selon Jean-Claude Juncker, il ne faut pas trop abuser de l’actuelle « chorégraphie réglementatrice » :« En évoquant le sommet du G20 à Londres le 2 avril prochain, j’ai fait part au premier ministre tchèque de mon aversion contre des demandes supplémentaires visant à augmenter les « paquets conjoncturels » européens. Le programme de relance européen atteint entre 3,4% et 4% de notre PIB. Nos finances publiques en Europe commencent à en souffrir. Il faut maintenant mesurer les effets que ces paquets conjoncturels produiront en 2009 et 2010 avant de nous lancer dans une programmation supplémentaire. La nouvelle chorégraphie réglementatrice du monde finacier doit se trouver au centre des préoccupations du G20 à Londres. »
Les difficultés économiques actuelles avaient fait craindre à certains que l’Europe puisse être divisée entre les pays de la zone euro et ceux qui ont tonjours leur monnaie nationale. En tant que président de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker s’est dit opposé à ce genre de divisions « de type soviétique » :« Parlant de l’Europe centrale et de l’Europe de l’est, j’ai redit au premier ministre tchèque ma conviction qu’il ne s’agit plus en Europe de diviser en groupes disctincts les différents membres de l’UE. Diviser en blocs, Europe de l’est ou de l’ouest, entre anciens et nouveaux Etats membres, constitue un retour à une simplification soviétique dont je pensais qu’elle avait disparu de nos imaginations géographiques avec la chute du mur de Berlin. »
Autre sujets brûlants abordés par Mirek Topolánek et Jean-Claude Juncker : les paradis fiscaux et le secret bancaire. Le Luxembourg, ainsi que la Belgique et l’Autriche militent activement au sein de l’UE pour conserver leur secret bancaire :
« Les paradis fiscaux constituent un réel problème et je crois donc sage l’intention de la communauté internationale de lutter contre les paradis fiscaux. Il y en a beaucoup et il y en a partout. On dit souvent que le Luxembourg constitue un paradis fiscal, parce qu’on s’est mis d’accord dans certains quartiers de l’opinion publique européenne sur l’idée qu’un pays qui pratiquerait le secret bancaire serait un paradis fiscal. Or le secret bancaire n’est pas synonyme de paradis fiscal. Constituent des paradis fiscaux les territoires qui n’imposent pas les acteurs qui évoluent sur ces places et qui n’imposent pas une stricte réglementation prudentiel et de surveillance. »« Je ne peux pas m’imaginer une seule seconde que l'Union européenne serait d'accord de mettre la Belgique, l'Autriche et le Luxembourg sur une liste noire alors que ces pays respectent la norme européenne communément admise. »
A Prague, Jean-Claude Juncker a déjà obtenu le soutien de son homologue tchèque, président en exercice du Conseil de l’UE. Mirek Topolánek a comparé le secret bancaire au secret confessionnel pour faire comprendre qu’il était difficile de le remettre en question.Les actifs toxiques : l’expression n’est pas rassurante en elle-même – c’est la hantise des gouvernements des deux côtés de l’Atlantique. Pour résumer, ils s’agit d’actifs financiers devenus invendables ou « illiquides » et qui plombent le bilan des banques et institutions. Jean-Claude Juncker :
« C’est un problème dont nous devons nous occuper avec beaucoup d’intensité, les règles et les instruments appliqués pouvant différer d’un pays à l’autre, pour rétablir la confiance sur les marchés financiers. Nous le ferons, chacun à son rythme et selon le mode qui lui convient le plus. Et la présidence tchèque fera en sorte que nous nous mettions rapidement d’accord sur un nombre de principes élémentaires. Comme le ministre tchèque des Finances a réussi à mettre d’accord ses 26 autres collègues sur les problèmes posés par les taux de TVA réduits, je ne doute pas un seul instant que le gouvernement tchèque réussira à nous mettre d’accord sur d’autres points. »