Korjen : un hommage contemporain à toutes les racines musicales

Korjen, photo: Aleš Opekar, ČRo

Korjen : un mot inexistant sous cette orthographe, mais qui signifie « racine » dans toutes les langues slaves. Et c’est en effet des origines de la musique de l’Est de l’Europe que le groupe Korjen s’inspire, pour en proposer des interprétations largement libérées des traditions.

Korjen,  photo: Jan Šikl/Korjen

Groupe pragois par l’adresse de son studio de répétition, Korjen est international par sa formation : une chanteuse polonaise, Ewa Żurakowska, une Slovaque d’origine morave et arménienne, Svetlana Sarkisjan, une musicienne et chanteuse bosniaque, Aida Mujačić, ces trois femmes étant actuellement accompagnées de deux musiciens tchèques, Marek Novotný et Honza Šikl.

Le répertoire du groupe Korjen ne semble pas connaître de frontières non plus, car il ne s’arrête pas à la richesse musicale des terres slaves mais il explore également la musique traditionnelle de l’Arménie, de l’Estonie et de la Finlande. Un choix parfaitement subjectif et jamais irrévocable : les chansons du groupe sont celles qui tiennent à cœur à ses membres, et cela qu’ils les rapportent de voyage ou d’autres explorations musicales, ou bien qu’ils les connaissent depuis leur plus tendre enfance. Leurs compositions, qu’ils qualifient de « ritual fusion », sont des arrangements contemporains et très personnels de chansons populaires et traditionnelles, dans des compositions alliant musique du monde, funk, jazz et bien plus encore.

Korjen,  photo: Aleš Opekar,  ČRo

Un désir d’authenticité sans chercher à plaire à tout prix

L’approche de Korjen vise à préserver l’esprit de chaque chanson, sa charge émotionnelle, en s’affranchissant de toute limite musicale. Ces expérimentations donnent naissance à des contrastes saisissants, que ce soit entre les différents morceaux du groupe ou bien au sein même d’un morceau. Écoutons ainsi la chanson slovaque Konopa, dans laquelle on appréciera le contraste entre les voix des chanteuses et l’accompagnement musical, sombre et profond.

Tout vient à point à qui sait attendre

Photo: Indies Scope

Enregistré en quelques jours dans une maison de campagne, l’album Sabur – sur lequel figure la chanson que nous venons d’entendre – est finalement sorti fin 2019, après une longue période de maturation. D’ailleurs, le titre de l’album n’est pas anodin : en bosniaque, « sabur » veut dire non seulement patience, mais aussi les fruits que la persistance permet de récolter. Dans le cas de l’album « Sabur », cette attente a d’ailleurs permis une coopération avec l’artiste Łukasz Sabat. Écoutons le morceau Ervum em/Mehmeda majka budila, qui crée un pont inattendu entre une chanson arménienne et une chanson bosniaque, et auquel le son du duduk du musicien polonais confère des vibrations mystiques.

À l’heure actuelle, Korjen compte donc cinq membres de quatre nationalités différentes, mais aussi de personnalités, d’intérêts, d’expériences et de formations musicales très diverses. Une diversité culturelle aussi enrichissante qu’elle peut être complexe à canaliser. Écoutons leur interprétation rock et superbement polyphonique de Zorjushka. Avec Korjen, cette chanson russophone part dans tous les sens tout en finissant toujours par retrouver ses marques.

Korjen,  photo: Jan Šikl/Korjen

Au cours de ses quelque dix années d’existence, le groupe Korjen a connu des périodes d’activité intense, mais aussi de pause, comme c’est le cas actuellement. Les membres avouent cependant un peu mystérieusement avoir en ce moment « plusieurs idées de chansons traditionnelles » à travailler, mais aussi « quelque chose de nouveau » qui a « amorcé de nouveaux sons ». Soyons patients, donc, et souhaitons-leur que cette hibernation forcée permette, une fois de plus, à leurs projets de mûrir pour mieux s’épanouir… lorsqu’il sera temps.