La bière tchèque de plus en plus consommée dans le monde
La popularité de la bière tchèque à l’étranger est telle aujourd’hui qu’on peut la déguster même en Corée du Sud ou à Cuba. Mais les brasseurs manquent à l’appel.
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Le Brésil, le Vietnam ou même le Kenya sont autant de pays où vous pouvez trouver de la bière tchèque traditionnelle. Les destinations vers lesquelles la bière blonde tchèque est exportée, ainsi que son volume, augmentent. Entre le début de l’année et la fin des vacances d’été, les brasseries ont exporté un volume d’une valeur totale de plus de cinq milliards de couronnes (195 millions d’euros). Les exportations ont progressé de 50% en l’espace de dix ans. Mais les brasseurs manquent sur le marché du travail.
Ladislav Veselý, maître brasseur, a produit sa bière dans le monde entier. Afin de garder une empreinte tchèque au-delà des frontières, il continuait d’utiliser des matières premières d’origine tchèque. Il raconte :
« Quand je produisais à l’étranger, j’essayais vraiment de me procurer les ingrédients en République tchèque. Brasser de la bière de type pils avec de la levure de fermentation sèche, ce n’est pas l’idéal. Quand j’étais au Japon, j’importais de la levure pressée depuis l’Institut de recherche brassicole. »La bière tchèque fait des émules chez les consommateurs étrangers. Sa popularité croit rapidement par exemple en Corée du Sud. Ces cinq dernières années, les exportations vers ce pays ont plus que quadruplé. Directrice exécutive de l’Association des brasseurs et malteurs tchèques, Martina Ferencová confirme cette tendance :
« La bière tchèque a bonne presse en dehors de ses frontières. Les brasseries sont conscientes que leurs chiffres n’augmenteront plus en République tchèque, donc elles cherchent des débouchés sur les marchés étrangers. Et ils pêchent dans des eaux de plus en plus lointaines. L’année dernière, nous avons remarqué qu’on pouvait trouver de la bière même en Antarctique. »
Selon elle, le problème est que la Tchéquie souffre d’un déficit de brasseurs :
« La situation est telle que chaque semaine s’ouvre une nouvelle microbrasserie à côté de trente autres grandes brasseries. Des experts sont nécessaires, mais il n’y en a pas assez pour satisfaire la demande. Il s’agit d’un travail compliqué qui demande beaucoup de compétences manuelles, auxquelles les formations d’apprentissage aujourd’hui ne préparent pas parfaitement. »C’est le cas par exemple du Lycée professionnel des technologies agroalimentaires à Prague qui accueille, cette année, quarante-cinq nouveaux étudiants. Selon Milan Chmelař, directeur de l’établissement, les brasseries sont en concurrence pour les futures technologies de production :
« Dans tous les cas, les étudiants en brasserie seront de plus en plus demandés. C’est une quête de main-d’œuvre. Les brasseries savent qu’en travaillant avec nous, elles peuvent identifier un élève et établir une coopération avec lui. Même si cela se passe dans un contexte concurrentiel, cela a des conséquences réelles sur l’avenir de l’élève. Elles passent même des petites annonces pour recruter des étudiants. »
La brasserie Samson le confirme alors qu’elle recherche elle-même des étudiants. D’après le directeur Daniel Dřevikovský, une fois diplômés, beaucoup d’anciens étudiants intègrent progressivement le marché du travail :« Nous attachons une grand importance à former nous-mêmes les jeunes, à leur offrir des opportunités. Nous permettons également aux étudiants de tirer des expériences professionnelles en se familiarisant avec le laboratoire ou la chaîne de production de la brasserie. Cela leur arrive de revenir nous voir même plusieurs années plus tard. »
Les microbrasseries ont plus de mal à trouver un brasseur formé. Pourtant, elles continuent de fleurir à raison en moyenne d’une brasserie par semaine. Face à cela, des brasseurs se retrouvent à travailler pour plusieurs brasseries différentes en même temps. Les formations de reconversions professionnelles, de plus en plus populaires en République tchèque, sont également un moyen de pallier au manque de brasseurs.
Par exemple, Pavel Palouš travaille à la brasserie Cobolis à Prague. Il a lui-même formé plusieurs personnes :« Une centaine de personnes ont suivi la formation. Aujourd’hui, cela représente vingt brasseries qui se sont développées grâce à nos diplômés. L’intérêt pour cette activité est très grand, mais il n’est pas propre qu’à la République tchèque. »
Il y a également un intérêt croissant pour les cours de tirage de bière. Selon Martin Hložek, le patron de Plzeňský Prazdroj, la plus grande brasserie existante en République tchèque, les pubs s’intéressent non seulement à la manière de brasser mais aussi de servir ou de stocker la bière. Il explique :
« Nous avons de grands centres de formation à travers tout le pays, où des dizaines de propriétaires, d’amateurs viennent plusieurs fois par mois afin qu’on leur explique. Avec plusieurs collègues, nous œuvrons pour améliorer le traitement et la manipulation de la bière, qui est une denrée sujette aux mauvais traitements. Qu’il s’agisse des conditions de stockage, de la propreté des verres, de la façon de servir, etc. »
Même si les propriétaires se débattent avec le flot de consommateurs, les Tchèques sont de plus en plus nombreux à préférer la bière en bouteille à celle servie en pression. En République tchèque, plus de 60% de la bière est aujourd’hui consommée dans des bouteilles en verre ou en plastique et en canettes.