La CEDH condamne la République tchèque pour discrimination à l’égard des Roms

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné mardi la République tchèque pour discrimination. L’affaire concerne une requête introduite par 18 ressortissants tchèques d’origine rom qui furent placés dans des écoles spéciales destinées aux enfants atteints de déficiences intellectuelles et ne pouvant pas suivre un cursus scolaire ordinaire.

Dans son arrêt rendu mardi, la Grande Chambre de la cour strasbourgeoise a condamné la République tchèque à payer la somme de 4000 euros à chacun des requérants pour dommage moral, ainsi que 10 000 euros conjointement pour frais et dépens. Cette décision met fin à une procédure entamée il y a près de dix ans par 18 Roms tchèques originaires de la région d’Ostrava. Marcela Mikova est l’une de ces 18 plaignants :

« Mon fils a été orienté vers une école spéciale, là où l’enseignement est plus lent. En deux ans il a perdu beaucoup de temps. Sans ces deux ans dans une école spéciale, il aurait eu une chance de continuer, de faire ensuite des études supérieures. Je ne l’ai pas fait pour l’argent. L’argent c’est pour lui, pour qu’il en fasse ce qu’il veut. »

David Strupek,  photo: Jana Sustova
La décision de la Cour a été prise à la majorité des juges présents, 13 voix pour, 4 contre, dont celle du juge tchèque. Les écoles spéciales n’existent plus depuis deux ans dans le système tchèque, mais dans la pratique la discrimination existerait toujours. L’avocat tchèque David Strupek :

« Ce qui est très important dans cette décision est que pour le juge européen, peu importe le nom ou le statut légal de l’école. Ce qui est fondamental, c’est l’éducation que reçoive les enfants. Si les enfants roms, dans des écoles primaires, sont placés dans ces « classes pour enfants à besoins scolaires spécifiques », il peut toujours s’agir de discrimination, si l’enseignement ne correspond pas aux capacités intellectuelles des enfants, tout comme c’était le cas dans les écoles spéciales ».

Geraldine Scullion,  photo: Jana Sustova
« Un tremblement de terre juridique » : c’est l’expression employée par certains pour décrire la décision du juge européen. Une décision qui pourrait avoir des répercutions dans tous les pays membres du Conseil de l’Europe, comme le souligne la directrice du Centre européen pour les droits des Roms, Geraldine Scullion :

« La discrimination scolaire est un phénomène qui existe ailleurs qu’en République tchèque. C’est courant en Hongrie, en Slovaquie, en Roumanie, dans les pays où il y a une forte proportion de Roms mais pas seulement. Cela existe même en Irlande, ce n’est pas qu’en Europe centrale, c’est aussi en Europe occidentale. »

Et la directrice de ce centre basé à Budapest d’indiquer qu’un cas similaire au cas tchèque, concernant des Roms de Croatie cette fois, est en passe d’être traité par la CEDH.