« La délégation tchèque est la plus importante dans l’histoire de Taïwan »
La présidente de la Chambre des députés Markéta Pekarová Adamová mène cette semaine une imposante délégation tchèque sur l'île de Taïwan. Une visite importante pour les relations bilatérales entre Prague et Taipei, avec plus de 150 personnes qui l'accompagnent pour développer ces liens tant au niveau économique qu'universitaire ou culturel. Entretien avec notre confrère François-Xavier Boulay de la rédaction francophone de Radio Taïwan International.
Vous avez l’habitude des délégations parlementaires étrangères ces dernières années à Taipei. Cette visite tchèque représente-t-elle quelque chose d’ordinaire ou d’exceptionnel ?
François-Xavier Boulay : « Les deux à la fois, en cela que, effectivement, Taipei reçoit de plus en plus de délégations étrangères, que ce soit de pays qui reconnaissent officiellement Taïwan ou non. Pour ce qui est de l’Europe, hormis le Vatican, aucun pays ne reconnaît Taïwan comme un Etat officiellement. Il y a donc de plus en plus de délégations qui viennent pour les relations académiques ou économiques – avec surtout les semi-conducteurs –, comme c’est le cas pour la délégation tchèque. »
« Mais si les médias locaux parlent tous de la délégation tchèque, c’est aussi pour souligner avant tout qu’il s’agit de la plus importante délégation en nombre dans l’histoire de Taïwan – quasiment deux fois plus de membres que la délégation du président du Sénat tchèque en 2020. »
Plus de 150 personnes en tout, dont des députés et hommes d’affaires… Qu’en dit-on dans la presse locale de cette délégation sinon ?
« Dès l’arrivée sur le tarmac à l’aéroport, les médias étaient présents en nombre. Le ministre des Affaires étrangères Joseph Wu a accueilli en personne cette délégation ainsi que le président du parlement. Sans avoir de relations diplomatiques officielles, cela reste très très important pour Taïwan de pouvoir compter sur les pays qui, comme le souligne la diplomatie taïwanaise, partagent les mêmes valeurs de liberté, de démocratie et de droits de l’Homme. Surtout que cette visite tchèque intervient au moment même où Taïwan perd un nouvel allié diplomatique en Amérique latine : le Honduras. »
Vous parliez du volet économique important de cette visite – il y a aussi un volet culturel avec le directeur du Musée national tchèque qui fait partie de la délégation. En est-il question également dans la presse locale ?
« Oui, aussi. L’accent est bien sûr mis sur l’inauguration du Czech hub, cette plateforme pour les échanges bilatéraux, économiques, académiques ou pour l’innovation et les ONG. Mais on parle également de ce volet culturel, qui est très important pour Taïwan. Le Musée national du Palais de Taipei est très intéressé par la multiplication des échanges. C’est toujours compliqué pour Taïwan de prêter des œuvres pour des expositions à l’étranger, parce que certaines œuvres ont été récupérées à la période de conflit inter-détroit avec la Chine et il existe toujours le risque de voir ces chefs d’œuvre confisqués à l’étranger en faveur de Pékin. Cela n’est jamais arrivé jusque-là mais il n’y a pas de risque zéro. »
On parle surtout d’œuvres qui proviennent de la Cité interdite…
« Exactement. Dans le développement de la culture taïwanaise – du monde chinois en général -, un quart des chefs d’œuvre de la Cité interdit ont pu, du point de vue de Taïwan, être sauvées de la révolution de Mao Tse Toung et des communistes chinois. Taipei espère justement qu’ils ne deviennent pas un objet politique dans le cadre de tensions entre les deux rives ou sur la scène internationale en général. »