La République tchèque plus que jamais vent debout contre les quotas migratoires

Robert Fico, Ewa Kopaczová, Bohuslav Sobotka, Viktor Orbán, photo: ČTK

Vendredi dernier, les premiers ministres des quatre pays du groupe de Visegrad se sont réunis à Prague, à l’invitation de la République tchèque, pour un sommet extraordinaire sur la crise migratoire. Objectif : adopter une position commune face à l’arrivée massive de réfugiés à l’intérieur de l’espace Schengen, notamment à partir de la Hongrie. A quelques jours de la réunion des ministres européens de l'Intérieur du 14 septembre, les pays centre-européens ont réaffirmé leur opposition à un système de quotas pour l’accueil des réfugiés.

Robert Fico,  Ewa Kopaczová,  Bohuslav Sobotka,  Viktor Orbán,  photo: ČTK
L’Europe est plus que jamais divisée sur la question de l’accueil des réfugiés et la gestion de la crise migratoire à laquelle elle fait face à l’heure actuelle. Et le sommet extraordinaire des quatre pays du groupe de Visegrad, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne, vendredi dernier à Prague, n’a fait que confirmer cet état de fait. Le sommet visait notamment à montrer que ces quatre pays parlent d’une seule voix sur la question, alors que d’après le nouveau plan de répartition que la Commission européenne devrait présenter devant le Parlement de Strasbourg, mercredi, ce serait désormais un nouveau contingent de 120 000 réfugiés qui devraient être répartis entre les Vingt-Huit, sur la base de quotas obligatoires. 2 978, c’est le nombre de réfugiés qui pourraient être attribués à la République tchèque. Mais pour les premiers ministres slovaque, polonais et hongrois, c’est non, comme ils l’ont réaffirmé vendredi, de concert avec le chef du gouvernement tchèque Bohuslav Sobotka :

« Il est très important que la voix des pays du groupe de Visegrad se soit faite entendre dans le cadre du débat actuel dans l’UE. Nous sommes tombés d’accord sur des propositions concrètes que nous allons présenter aux autres pays de l’UE. Nous voulons insister sur le fait que la base du problème, ce ne sont pas les quotas, mais le fait que l’UE a perdu sa capacité de régulation des migrations. Chaque pays développé, qu’il s’agisse des Etats-Unis ou d’autres, doit avoir la possibilité de réguler l’immigration et de décider qui a droit à une aide, qui peut bénéficier du droit d’asile et qui est un migrant économique et n’a pas droit d’entrer dans le pays. »

Bohuslav Sobotka et Viktor Orbán,  photo: ČTK
Face à cette position de principe de ces quatre pays d’Europe centrale, les réactions n’ont pas tardé à fuser chez leurs voisins, et notamment en Allemagne, où le vice-chancelier Sigmar Gabriel a déclaré que l’Union européenne devrait envisager de revoir sa politique de subventions vis-à-vis des pays membres qui refusent de se serrer les coudes en pleine crise migratoire. Une déclaration qui fait bondir à Prague. On écoute le premier ministre tchèque, Bohuslav Sobotka :

« J’estime qu’on ne peut pas se comporter ainsi au sein de l’Union, qu’on ne peut pas menacer les pays qui sont en désaccord avec une proposition concrète de la Commission, que ceux-ci ne recevront plus de subventions. Ce n’est pas ainsi que la République tchèque se représente ce que doit être l’Union européenne. Nous avons clairement fait savoir que nous étions prêts à être solidaires et à accueillir, sur la base du volontariat, 1 500 réfugiés. Mais le projet d’origine de résolution de la crise par l’Union n’a même pas été pour l’heure mis en place. »

Bohuslav Sobotka et Milan Chovanec,  photo: ČTK
La République tchèque, tout comme les autres pays du groupe de Visegrad, estime que des mesures énergiques doivent être prises par l’UE pour lutter contre les réseaux de passeurs, et renforcer les contrôles aux frontières de Schengen. Alors que seules 60 demandes d’asile ont été déposées dans le pays depuis le mois de juin, confirmant que la République tchèque ne représente qu’un pays de transit pour les réfugiés, Prague et Bratislava ont proposé de faciliter le passage des réfugiés syriens entre la Hongrie et l’Allemagne, comme le précise le ministre de l’Intérieur tchèque Milan Chovanec :

« Si Berlin est d’accord, nous sommes prêts à faire transiter tous les Syriens depuis la Hongrie vers l’Allemagne par le biais d’un corridor ferroviaire. »

Photo: ČTK
Cette réaffirmation de la position tchèque de fermeté vis-à-vis de la crise migratoire s’inscrit dans un contexte général dans le pays où un dernier sondage montre que trois quarts des Tchèques seraient pour une réintroduction des contrôles dans l’espace Schengen. D’un autre côté, l’ancien président tchèque Václav Klaus, eurosceptique revendiqué, a lancé samedi une pétition contre l’immigration, appelant le gouvernement tchèque à « garantir l’intangibilité des frontières » et à « rejeter les quotas » voulus par la Commission européenne. Une pétition d’ailleurs soutenue par son successeur au Château de Prague, l’actuel chef de l’Etat tchèque, Miloš Zeman, qui s’est exprimé dans ce sens dimanche. Le premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka a toutefois tenu à se distancer de ces propos en affirmant que cette pétition était « inutile ».

Les voix de soutien aux réfugiés peinent à se faire entendre, malgré diverses initiatives comme le texte récemment signé par quelques milliers de chercheurs et membres de la sphère académique qui appelle les Tchèques à ne pas se laisser tenter par les sirènes de la xénophobie, ou diverses ONG tchèques qui tentent d’apporter leur aide aux réfugiés lors de leur arrivée sur le sol européen.