La République tchèque se pose en alliée solide de l’Ukraine
Le ministre des Affaires étrangères tchèque Tomáš Petříček est depuis lundi matin en déplacement en Ukraine. Deux jours de visite, de nombreuses rencontres avec les plus hauts représentants de l’Etat ukrainien, un déplacement jusque dans l’est du pays : le chef de la diplomatie entend ainsi montrer l’importance de ce pays dont la République tchèque accueille de nombreux ressortissants bénéficiant d’un permis de travail et de séjour dans le cadre de programmes spéciaux. Au-delà, Tomáš Petříček était également à Kiev pour assurer ses dirigeants du soutien de Prague par rapport aux pressions de Moscou.
Comme le rappelle dans son édition de cette semaine l’hebdomadaire Respekt, cela faisait quelques années déjà qu’un haut représentant de l’Etat tchèque ne s’était plus rendu en Ukraine. Même le Premier ministre Andrej Babiš, pourtant convié en bonne et due forme, n’a, pour l’heure, pas répondu à l’invitation.
Le chef de la diplomatie tchèque ne s’en est pas caché : sa visite a une portée symbolique, lui qui depuis son entrée en fonctions en octobre dernier a tout fait pour faire oublier ses allures de jeune premier, catapulté à son poste après le refus du président Miloš Zeman de nommer son mentor, Miroslav Poche. A la surprise de certains, Tomáš Petříček a d’ailleurs plutôt réussi à se démarquer et à se retrouver sur des terrains où on ne l’attendait pas, faisant fi de l’inimitié que lui voue par ricochet le chef de l’Etat.
Avec sa visite actuelle, Tomáš Petříček entend ainsi envoyer un message un peu plus à l’Est, à Moscou donc : Kiev peut compter sur son allié tchèque. En novembre dernier déjà, il avait vivement réagi aux tensions en mer d’Azov, suite à l’arraisonnement de trois navires ukrainiens par la Russie dans le détroit de Kertch. Tomáš Petříček, qui était d’ailleurs attendu au port de Marioupol ce mardi, avait alors rappelé la position de principe de la République tchèque sur la question, une ligne qui, on l’aura compris, déplaît fortement au président Miloš Zeman, qui a toujours dénoncé les sanctions de l’Union européenne contre la Russie et considère l’annexion de la Crimée comme un « fait accompli ». Cette fermeté du nouveau ministre sur plusieurs questions de politique étrangère et notamment sur la Crimée lui a d’ailleurs valu de se retrouver en couverture de Respekt, qui dresse un long portrait d’un « rebelle inattendu », comme le présente le magazine.
A Kiev, lundi, aux côtés de son homologue ukrainien Pavlo Klimkine, le chef de la diplomatie tchèque a ainsi réitéré le soutien de Prague à son voisin :« Nous comprenons la situation difficile dans laquelle se trouve l’Ukraine. Elle doit se battre en même temps sur deux fronts. Contre l’agression russe et les rebelles à l’Est d’un côté. Le deuxième front, c’est la modernisation nécessaire du pays. Ces deux combats sont étroitement liés. Sans stabilisation de la société et sans développement de l’économie, il sera difficile de régler ce conflit. La République tchèque est là pour proposer son aide et soutenir l’Ukraine dans ses efforts. »
En l’espèce, la République tchèque soutient l’ambition de l’Ukraine de rejoindre l’Union européenne et se dit prête à poursuivre son programme d’aide humanitaire pour laquelle elle a débloqué huit millions d’euros depuis 2014.
Outre les questions de politique internationale, les relations bilatérales entre Prague et Kiev étaient également au cœur des discussions que Tomáš Petříček a menées avec son homologue ukrainien, mais aussi plusieurs autres dirigeants. Dans un entretien accordé à l’agence de presse locale Ukrinform, le chef de la diplomatie a rappelé que la République tchèque délivrait tous les ans des permis de travail à destination de 21 000 ressortissants ukrainiens et que le gouvernement envisageait de doubler ce quota d’accueil :
« Pavlo Klimkine a rappelé que plus de 100 000 ressortissants ukrainiens vivaient et travaillaient en République tchèque. Je rappellerais qu’il y a également 3 000 étudiants ukrainiens qui étudient dans nos universités et grandes écoles. Ces ressortissants ukrainiens participent au développement de notre économie. Notre gouvernement a, pour ce faire, mis en place divers programmes d’accueil et prévoit leur extension. »Un appel d’air nécessaire pour la République tchèque qui, si elle peut se targuer d’une situation de quasi plein emploi, est dans le même temps confrontée à une importante pénurie de main d’œuvre avec un nombre d’emplois vacants qui s’élevait à 324 000 en début d’année, un chiffre qui ne cesse d’augmenter.