La Tchécoslovaquie se serait-elle qualifiée pour la Coupe du monde 2018 ?

Photo illustrative: ČT

En juin prochain, pas plus la République tchèque que la Slovaquie ne participeront à la phase finale de la Coupe du monde de football en Russie. En février prochain, les deux pays participeront certes bien au tournoi olympique de hockey sur glace aux Jeux de Pyeongchang, mais avec de faibles chances de victoire finale, voire même de médaille. Près de vingt-cinq ans après l’apparition des deux nouveaux Etats sur la carte de l’Europe, le constat apparaît comme une évidence : en matière de sport, la partition de la Tchécoslovaquie a été néfaste des deux côtés de la frontière. Confirmation à travers le football.

L'équipe de Tchécoslovaquie en 1980
Le mercredi 4 avril 1979, Thierry Roland et Bernard Père sont dans les tribunes de Tehelné Pole, le stade du Slovan Bratislava. Les deux journalistes sportifs vedettes de la télévision française s’apprêtent à commenter en direct le match entre les équipes de Tchécoslovaquie et de France qui se tient dans le cadre de la phase éliminatoire du championnat d’Europe 1980. Favorite à domicile devant ses 48 000 supporters entassés debout dans les gradins, la Reprezentace d’Antonín Panenka et Anton Ondruš s’impose alors somme toute logiquement (2-0) contre les Bleus de Michel Platini et Raymond Domenech. Malgré une victoire française (2-1) au match retour au Parc des Princes sept mois plus tard, c’est bien la Tchécoslovaquie qui se qualifie pour la phase finale en Italie, où elle terminera à une honorable troisième place, seulement défaite (1-0) par l’Allemagne de l’Ouest lors de son premier match de poule.

Le Coupe du monde 1934
Trois ans après le sacre européen à Belgrade contre cette même RFA, au terme d’une finale que le tir au but en pichenette décisif de Panenka a fait entrer dans l’histoire, et un an avant le titre olympique aux Jeux de Moscou en 1980, la République socialiste tchécoslovaque compte alors assurément parmi les nations fortes du football européen et mondial. D’ailleurs, peu d’autres nations du Vieux continent peuvent se targuer à l’époque d’une participation à deux finales de Coupe du monde, parmi lesquelles la première, en 1934 à Rome, se serait très probablement transformée en triomphe si son adversaire pour l’obtention du trophée Jules Rimet n’avait pas été l’Italie fasciste de Mussolini scandaleusement favorisée par l’arbitrage (cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/histoire/la-tchecoslovaquie-vice-championne-du-monde-de-football-en-1934), comme en témoigne le commentaire en direct du reporter de la Radio tchécoslovaque, le légendaire Josef Laufer…

Pavel Nedvěd,  photo: Pavel Lebeda,  CC BY-SA 2.0
Aujourd’hui, tous ces faits de gloire appartiennent à l’histoire (très) ancienne. Certes, depuis la partition de la Tchécoslovaquie, la République tchèque n’a jamais manqué la moindre phase finale d’un championnat d’Europe. En 1996 puis en 2004, la génération dorée des Nedvěd, Poborský et Šmicer est même parvenue jusqu’en finale et demi-finales de l’Euro. Mais la Reprezentace n’a participé qu’à une seule phase finale de Coupe du monde, en 2006 en Allemagne. Quant à la Slovaquie, à la population il est vrai moitié moins nombreuse avec ses cinq millions d’habitants, il a fallu attendre le Mondial 2010 en Afrique du Sud pour la voir atteindre un tel niveau lors d’une grande compétition internationale. Depuis, la sélection emmenée par son emblématique capitaine Marek Hamšík a fait également honnête figure – à la différence de la République tchèque – lors de l’Euro 2016 en France, premier tournoi auquel les deux pays étaient présents ensemble.

Mais alors que les Tchèques figuraient à la 48e place du dernier classement établi en novembre par la FIFA, loin derrière les Slovaques 28es, la question, forcément théorique, se pose, à l’heure du vingt-cinquième anniversaire de la partition, de savoir quelle pourrait être la valeur d’une sélection au sein de laquelle évolueraient les meilleurs joueurs tchèques et slovaques actuels.

Le dernier grand tournoi auquel les footballeurs tchécoslovaques ont participé reste la phase finale de la Coupe du monde 1990 en Italie, où ils avaient été éliminés par la RFA en quarts de finale, victimes d’un penalty litigieux. Ensuite, la Tchécoslovaquie, qui a disputé son dernier match officiel contre la Belgique en novembre 1993 à Bruxelles, ne s’est pas davantage qualifiée pour l’Euro 1992 que pour le Mondial 1994. Capitaine à l’époque de cette československá Reprezentace, Ivan Hašek affirme aujourd’hui ne rien regretter :

Ivan Hašek,  photo: Tomáš Adamec,  ČRo
« Bien sûr, sportivement, nous serions beaucoup plus forts si nous jouions ensemble. C’est évident. Mieux vaut être unis que séparés. Mais la politique, c’est autre chose… Les gens voulaient se séparer et les choses se sont passées comme elles devaient se passer. »

Ivan Hašek, capitaine également du Sparta Prague, n’est pas plus nostalgique des grands matchs contre le Slovan Bratislava ou des longs déplacements à Košice, dans l’est de la Slovaquie, du temps d’un championnat fédéral :

« Oui, c’est vrai que c’étaient des matchs intéressants, très chauds. Le niveau de la première division tchécoslovaque était plus élevé qu’il ne l’est aujourd’hui dans les deux pays. Il y avait quinze millions d’habitants. Et puis en Slovaquie, il n’y avait pas que le Slovan et Košice. Il y avait aussi des clubs comme Prešov ou Banská Bystrica, autant d’endroits en Slovaquie où il était très difficile pour nous, le Sparta, de gagner. Et puis les déplacements se faisaient en bus… C’était intéressant, mais je ne regrette pas pour autant. Maintenant, il y a deux championnats, un en Tchéquie et un autre en Slovaquie… »

Et aussi donc deux sélections qui, comme le plus souvent depuis la fin de la Tchécoslovaquie, manqueront l’une comme l’autre à l’appel de la prochaine Coupe du monde…