La Tchéquie comme « porte vers les marchés européens pour les startups algériennes »
Yacine Oualid, ministre algérien de l’Économie de la connaissance, des Startups et des Micro-entreprises, était à Prague cette semaine. Il a répondu aux questions de RPI. Extraits :
RPI : Votre visite à Prague se déroule dans le prolongement de celle du ministre tchèque de l’Industrie et du Commerce, Jozef Síkela, à Alger à l’automne 2022. Lors de cette visite, une déclaration commune portant sur le renforcement de la coopération entre la Tchéquie et l’Algérie dans le domaine de l’énergie a notamment été signée. Cela concernait entre autres l’approvisionnement en gaz. Qu’est-ce qui a changé depuis ? Où en est actuellement cette coopération ?
Yacine Oualid : « Tout d’abord, merci de m’offrir l’opportunité de parler à vos auditeurs sur Radio Prague International qui, je le rappelle, est une radio écoutée en Algérie. Les discussions avancent très bien entre la partie tchèque et la partie algérienne. Même si le secteur de l’énergie ne fait pas partie des prérogatives de notre ministère, nous restons quand même confiants sur le fait que le ministère de l’Industrie et du Commerce tchèque et le ministère de l’énergie algérien trouveront bientôt un compromis quant à l’augmentation des approvisionnements en gaz. »
« En parallèle, nous nous sommes engagés à accentuer et à améliorer les échanges et la relation entre les deux pays sur le plan économique. Notre ministère a été invité par le ministère de l’Industrie et du Commerce et par le ministre de la Science et des technologies et, comme vous pouvez vous en douter, l’objectif est de renforcer la relation en matière de technologies et de développement des startups — surtout celles en rapport avec les énergies renouvelables. L’Algérie est un partenaire énergétique important et fiable pour l’Europe. Nous voulons continuer à l’être tout en proposant des sources d’énergie autres que les énergies classiques, fossiles : des énergies moins polluantes et qui utilisent des nouvelles technologies. Et c’est une des raisons de ma visite aujourd’hui à Prague. »
Justement, quel est l’objectif particulier de votre visite en République tchèque ?
« L’un des objectifs est de pouvoir découvrir toutes les opportunités de coopération en matière de nouvelles technologies et de développement de l’écosystème startup. Nous avons l’ambition de faire de l’Algérie un hub pour les startups au niveau africain. Nous voulons également que la République tchèque soit une porte vers les marchés européens pour les startups algériennes. Nous avons déjà commencé à préparer un mémorandum d’entente dans ce sens pour, justement, faciliter la mobilité des talents entre les deux pays. Pour partager les différentes expériences en matière de développement de l’innovation, en matière de promotion des startups entre la Tchéquie et l’Algérie.
Durant ma visite, nous avons eu l’occasion de voir deux importants ministères, l’agence CzechInvest, beaucoup d’acteurs économiques : des startups, mais également des fonds d’investissement, des VC (Venture Capital)…
Concrètement, quelles startups avez-vous visitées ?
« Nous avons visité une startup qui s’appelle eMan. Nous avons rencontré un certain nombre de VC. Nous avons également rencontré l’association tchèque des acteurs du numérique. La rencontre nous a permis de découvrir un peu plus de choses sur cet écosystème en pleine ébullition en République tchèque, qui est bien sûr l’un des écosystèmes les plus dynamiques d'Europe centrale. Nous avons déjà entamé des sujets de coopération avec certaines parties au niveau de la République tchèque. À la fin de l’année, nous organisons le plus grand événement dédié aux startups en Afrique. Cela s’appelle Africa Start-up conference. Nous avons invité officiellement la partie tchèque à y participer via ses agences gouvernementales, mais aussi via ses startups. Cela sera pour nous une première étape vers la concrétisation de cette collaboration. Et également une manière pour nous de permettre à des startups tchèques de découvrir le marché africain à travers l’Algérie. »
La Tchéquie peut-elle vous inspirer ? Certains projets tchèques concrets, dans le domaine des startups, des technologies, des innovations, vous semblent-ils particulièrement intéressants ? L’ancienne ambassadrice tchèque à Alger a évoqué, lors de sa visite dans votre ministère en 2021, le projet Smart cities. Elle a aussi comparé la République tchèque à d’autres pays où la coopération avec l’Algérie est en cours — l’Italie, par exemple, ou les Pays-Bas. Quelle est la spécificité de la Tchéquie parmi vos partenaires ? Y a-t-il des projets tchèques concrets qui vous inspirent ?
« Effectivement, nous avons des projets concrets, notamment de coopération via le programme Erasmus. Avec la République tchèque, avec laquelle on entretient des relations très importantes en matière de développement culturel, nous avons également d’autres projets dans ce domaine.
À Prague, nous avons par ailleurs discuté avec l’entreprise tchèque de distribution d’électricité de leur retour d’expérience sur les Smart grids, qui est aujourd’hui un projet en cours en Algérie. Bien sûr, nous sommes extrêmement intéressés pour en savoir un peu plus sur l’expérience tchèque en la matière. »
« Concernant la coopération, l’Algérie a également des ambitions pour développer son industrie automobile — avec plusieurs investissements en cours de la part de certains groupes industriels. Nous attendons également un retour de la partie tchèque concernant cette industrie qui est pour nous très importante — parce que le marché intérieur est considérable —, mais également parce que les capacités d’export vers les autres pays africains sont tout aussi importantes. Notamment avec les nouveaux investissements que l’Algérie est en train de faire en matière de logistique, que ce soit la route transsaharienne ou les projets de chemins de fer, qui relient aujourd’hui l’Algérie avec un certain nombre de pays africains. Tout cela positionne l’Algérie pour être un véritable pôle en la matière et, bien sûr, c’est également un sujet qui est sur la table des négociations entre les différentes parties. »
« Nous avons également beaucoup apprécié les activités actuellement entreprises par l’agence CzechInvest, notamment en matière d’internationalisation et de soutien aux startups. Et dans ce domaine précis, nous prévoyons beaucoup de coopérations avec l’agence pour lui permettre de faciliter l’accès au marché africain des startups tchèques via l’Algérie. Nous avons discuté d’un programme de soft landing pour faciliter la mobilité des talents entre les deux pays. Et nous allons soutenir les actions de cette agence sur le continent africain. »